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Ombellifères : résultats des essais 2016

Une rencontre de terrain autour des cultures d'ombellifères (fenouil, aneth, coriandre, persil, carvi, anis vert…) a été organisée dernièrement par la chambre d’agriculture de la Drôme.
Ombellifères : résultats des essais 2016

Les plantes de la famille des ombellifères, qui se conduisent selon un itinéraire technique de grande culture, peuvent être une opportunité de diversification pour des producteurs habitués à conduire des plantes sarclées. Et ce d'autant que les prix sont porteurs actuellement, notamment pour les marchés des graines alimentaires bio avec des espèces comme la coriandre, le fenouil doux et l'anis vert. Dernièrement, à l'initiative de la chambre d'agriculture de la Drôme, une vingtaine de producteurs, techniciens, acheteurs et étudiants ont pu visiter l'essai de désherbage du fenouil doux, essai installé à Mévouillon sur les terres de la ferme expérimentale Ardema(1). Les objectifs de cet essai, financé par le Pep Ppam(2), consistent à évaluer la faisabilité de la culture du fenouil doux, en bio et sans irrigation, en zone de montagne (en terre argilo-limoneuse de fond de vallée). Sont aussi comparées cinq modalités de gestion des adventices.

Echanges autour d’échantillons de graines de qualité différentes. © CA26

Différentes modalités testées

Cet essai aura permis de déterminer la faisabilité de désherber avec la herse-étrille en post-levée, ce qui n'avait jamais été testé jusqu'alors (seul le mode pré-levée était pratiqué). Ainsi, sur fenouil, il est possible de passer la herse-étrille au stade 6 à 8 feuilles, à condition de le faire de manière très peu agressive (vitesse lente d'environ 3 km/h) car la plante est frêle à ce stade.
L'intérêt du passage de la herse-étrille en post-levée est illustré par la différence de rendement entre la modalité 1 et les modalités 2 et 3, et de même entre les modalités 4 et 5. Son passage est plus intéressant à un stade juvénile du fenouil (6 feuilles) plutôt qu'à un stade plus tardif (8 feuilles), vu la différence de rendement entre les modalités 2 et 3.
Concernant le rendement, la modalité la plus productive en graines commercialisables est la modalité 4, qui correspond à un semis en rangs espacés de 60 cm (modalité de référence). Toutefois, la modalité 2, qui correspond à un semis en plein, donc non binable, mais ayant reçu deux passages de herse-étrille (un en pré-levée et un en post-levée) a obtenu un rendement assez proche  voir le graphique et tableau.
D'autre part, le meilleur rendement en grosses graines (diamètre supérieur à 2,24 mm) est aussi obtenu avec la modalité 4 (binée) mais tout juste devant celui de la modalité 2 (semée en plein).
Le très faible écart de rendement entre les modalités 2 et 4 nous conduit à dire que, pour une culture conduite en sec, mieux vaut réaliser un semis en plein et deux passages de herse-étrille (pré-levée + post-levée à 6 feuilles) plutôt qu'un semis à 60 cm qui sera biné. Le surcoût de la semence pour la modalité en plein sera largement compensé par l'absence de binages.

Des rendements pénalisés par la sécheresse

Il faut souligner que le fenouil doux a été pénalisé par la forte sécheresse de fin d'été (août et septembre). A titre indicatif, le manque d'eau a été tel dans les Baronnies qu'il a conduit à la mort de nombreux plants de lavande et lavandin. Pour le fenouil doux, ce manque de pluies a conduit à des rendements extrapolés à l'ha très faibles : de 100 à 180 kg contre 600 kg obtenus dans un essai précédent, également conduit en sec, en 2014. Le rendement en graines en 2016 est donc très décevant, à cause de cette sécheresse. Toutefois, avec un rendement de 600 kg de graines triées /ha, comme en 2014, et avec un prix moyen de 3 euros par kg (moyenne entre le premier choix et les écarts de triage), il est possible de réaliser un chiffre d'affaires très intéressant (1 800 €/ha) avec le fenouil doux conduit en sec et semé en plein.
Cependant, la conduite du fenouil doux en rangs espacés de 60 cm et irrigué (itinéraire de référence chez les producteurs) reste l'itinéraire technique qui permet au maximum de sécuriser la formation et le grossissement des graines. Cependant, il nécessite plus de binages afin de contrôler le surplus de développement des adventices. A titre de comparaison, en culture bio irriguée et en rangs espacés de 60 cm, le rendement moyen visé est de 800 kg de graines triées par ha. Il peut dépasser la tonne les bonnes années.

Culture de carvi

Une parcelle d'essai de culture de carvi a également été montrée aux participants. Toutefois, cette plante de montagne ou des pays nordiques (Scandinavie, Canada), qui a un fort besoin de vernalisation, n'a pas fleuri à l'été 2016, du fait d'un hiver trop doux. La parcelle est conservée pour une évaluation du rendement en graines à l'été 2017.

Marchés et qualité des graines

Deux acheteurs étaient présents à cette journée : André Hyvrier, représentant la société Elixens (basée à Crest), laquelle a établi un partenariat bio-solidaire avec les producteurs de la Sica Bioplantes ; et Lætitia Bonin, représentant l'Herbier du Diois (basée à Châtillon-en-Diois). Tous deux ont témoigné de leur expertise sur la culture et la commercialisation des ombellifères à destination du marché des épices.

Coriandre graine : qualité recherchée en alimentaire (graines marron clair). © CA26
S'agissant de la coriandre, c'est la culture d'ombellifère la plus abordable d'un point de vue technique pour de nouveaux producteurs (non gélive donc semis d'automne possible). Ils ont indiqué que le marché est porteur (prix d'achat : 2,80 €/kg de graine 1er choix : entière et bien triée) mais les besoins des acheteurs sont déjà pourvus dans l'ensemble.
Concernant, le fenouil doux, c'est une culture assez technique et par conséquent le marché est très porteur. Le prix d'achat tourne autour de 4 à 5 €/kg de graines triées 1er choix et 1,80 €/kg pour les écarts de triage. A noter, Elixens et l'Herbier du Diois recherchent des graines uniquement issues de variétés à faible teneur en estragol.
Pour l'aneth, culture plutôt facile, le marché est porteur mais les besoins des acheteurs sont globalement pourvus.
A propos de l'anis vert, culture très technique, les graines sont recherchées par les acheteurs.
Enfin, pour le carvi, culture là aussi très technique, le marché est dominé par la Finlande et le Canada. Il n'y a pas encore de culture compétitive en France.

Qualité des graines condimentaires

André Hyvrier et Lætitia Bonin ont ensuite dressé un bilan sur la qualité recherchée en graines condimentaires, avec des échantillons à l'appui. Celles-ci doivent en effet être entières, bien triées et d'une couleur claire afin d'être valorisées au mieux. La maîtrise des adventices, le stade de récolte, la qualité du séchage (atteindre 12 % d'humidité) et du triage (trieur alvéolaire si possible) ont un impact sur la qualité.

Fenouil doux : à gauche qualité recherchée en alimentaire (graines vertes) et à droite ce qu’il faut éviter. © CA26
Si l'on prend l'exemple de la coriandre, le stade de récolte conseillé correspond au changement de couleur des graines de violet à marron. Le battage est important car les graines se cassent facilement en deux. A ce propos, la Fnams(3) a édité une fiche technique détaillant les réglages de la moissonneuse-batteuse adaptés à la récolte de la coriandre.
Pour le fenouil doux, le stade de récolte optimal correspond à des graines jaunes verdâtres (vert clair), avec le premier étage d'ombelle mûr et le deuxième en cours de mûrissement. 


(1) Ardema : association de recherche et de développement en montagne sèche.
(2) Pep Ppam : pôle d'expérimentation et de progrès en plantes à parfum, aromatiques et médicinales.
(3) Fnams : fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences.

 

Contacts 
- Conseils techniques et références technico-économiques : Cédric Yvin (tél : 06 27 61 31 55 - mail : [email protected]) et Pierre-Yves Mathonnet (tél : 06 20 88 81 06 - mail : [email protected]), conseillers spécialisés Ppam à la chambre d'agriculture de la Drôme.
- Acheteurs de graines condimentaires biologiques : André Hyvrier, responsable des établissements drômois d’Elixens France (tél : 04 75 83 41 39 – mail : [email protected]) et Lætitia Bonin, conseillère plantes aromatiques bio à l’Herbier du Diois (tél : 04 75 21 09 94 - mail : [email protected]).
- Acheteur de feuilles fraîches pour la surgélation : Samuel Rello, société Gel’Pam (tél : 06 32 36 01 23 - mail : [email protected]).

Surgélation / Des marchés pour la production de feuilles fraîches

Benjamin Lemaire (ex-Gel’Pam, désormais à l’Iteipmai(1), a présenté les opportunités de culture de coriandre, aneth et persil à destination de feuilles fraîches qui seront surgelées à l’usine Gel’Pam (Groupe Ardo) à Pierrelatte. La coriandre peut ainsi être semée en fin d’été (à partir du 15 août) pour éviter une montée à fleur trop rapide. La récolte des feuilles a lieu à partir du 15 octobre et jusqu’à fin novembre.
L’aneth peut être semée également à partir du 15 août pour une récolte des feuilles 6 à 8 semaines après.
Le persil est, lui, à semer au printemps, pour cinq récoltes de feuilles dans l’année. Bisannuel, il peut aussi être conservé l’hiver pour jouer le rôle de Cipan(2), notamment pour les parcelles situées en « zone vulnérable nitrates ». 
(1) Iteipmai : institut technique interprofessionnel des plantes à parfum.
(2) Cipan : culture intermédiaire piège à nitrates.