ÉVÈNEMENT
Coupe du monde de boucherie : la ruée vers l’or  

Les 2 et 3 septembre prochains, l’équipe de France de boucherie participera au World butchers’ challenge, la Coupe du monde de boucherie, en Californie. Avec un espoir, celui de décrocher le deuxième titre de son histoire.

Coupe du monde de boucherie : la ruée vers l’or  
Les candidats auront 3h15 pour préparer un buffet de viandes long de plus de sept mètres. ©CFBCT

À la conquête de l’Ouest américain ! Début septembre, les membres de l’équipe de France de boucherie défendront chèrement leurs chances pour décrocher un deuxième titre mondial à l’occasion du World butchers’challenge, organisé à Sacramento en Californie. C’est dans l’arène du Golden 1 Center que les Français tenteront de s’imposer, après le titre remporté en 2016 et surtout au terme de plus de trois ans de préparation. Créé en 2011, cet évènement – aujourd’hui devenu le plus grand rendez-vous de la boucherie au monde – était à l’origine une compétition entre la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Elle s’est ouverte au Royaume-Uni en 2013, puis à la France en 2016. Après trois ans d’absence, la compétition fait son grand retour. Cette année, ce sont quatorze équipes qui se disputeront le titre : l’Allemagne l’Australie, le Brésil, le Canada, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l’Irlande, l’Islande, l’Italie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pays de Galles et le Portugal.

Les olympiades de la viande

Pour cette grande compétition, les concurrents disposeront de 3h15 pour préparer puis présenter aux membres du jury un buffet de viandes (bœuf, porc, agneau) de plus de sept mètres de long à partir de carcasses d’une demi-vache, d’un demi-porc, d’un agneau et de cinq volailles. « Un exercice à la fois physique et technique demandant de la coordination entre chaque membre de l’équipe et une grande créativité dans la présentation », indique la Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs (CFBCT) dans un communiqué. Chaque équipe senior est composée de six bouchers et de deux remplaçants. L’équipe de France, championne d’Europe en titre, a été composée sur dossiers par le capitaine, Joël Lucas, Meilleur ouvrier de France (MOF), en concertation avec la CFBCT et l’Association des MOF bouchers, membres fondateurs de l’association nationale pour la promotion des concours en boucherie-charcuterie-traiteur (ANPCBCT). Après la présentation d’un dossier de candidature, les postulants ont été évalués sur leurs capacités techniques et leur esprit d’équipe au sein de l’École nationale supérieure des métiers de la viande (ENSMV) à Paris. « J’avais comme responsabilité de sélectionner des candidats venus de toute la France, sur une épreuve durant laquelle ils avaient comme mission de faire une préparation bouchère à base de bœuf en peu de temps, explique Joël Lucas. Ils étaient notamment jugés sur leur rapidité, leur dextérité et leur technique. »

Mettre en valeur la boucherie française

Une fois l’équipe constituée, les entraînements se sont succédé, à raison de deux à trois par mois, dès 2019 (avec une coupure due à la crise sanitaire). « Chacun a un poste défini, les recettes sont élaborées et nous améliorons désormais quelques détails comme le visuel et le goût », note Joël Lucas. À force d’entraînement, une vraie cohésion d’équipe s’est créée, pour le plus grand bonheur du capitaine. « Nous avons pu créer au fil du temps de forts liens affectifs et professionnels, et un esprit d’équipe qui s’avérera important pour la compétition », confie-t-il. Récemment, les candidats français se sont réunis pour faire un essai grandeur nature. Au programme : créativité et persévérance. « L’épreuve demande de réaliser une centaine de préparations bouchères où nous essayons de mettre en valeur le travail à la française », indique Joël Lucas. Les 2 et 3 septembre prochains, chaque pays représenté comptera dans son effectif un juge, qui notera les différentes prestations des adversaires. Pour suivre l’évènement, la compétition sera retransmise en direct sur les réseaux sociaux. Rendez-vous sur la page Facebook  Équipe de France boucherie et celle du World butchers’challenge pour ne pas en perdre une miette.

Amandine Priolet 

Une édition  pour les jeunes  et apprentis bouchers

Pour célébrer les nouveaux talents et faire découvrir ceux qui représentent l’avenir de la boucherie, le World butchers’challenge a lancé en parallèle un autre concours appelé le World champion butcher apprentice & young butcher à destination des jeunes bouchers (moins de 35 ans) et des apprentis (en cours d’apprentissage). Contrairement à leurs aînés, ils n’auront que 2h30 pour réaliser, à base d’une gamme de coupes primaires, un étalage de produits connus et de leurs propres créations. La France pourra compter sur les talents de Gauthier Détrés (catégorie jeune boucher, Arsac, Gironde) et de Nolwenn Courau (catégorie apprenti boucher, Rennes, Ille-et-Vilaine). 

L’équipe de France 2022

L’équipe de France 2022

Les candidats retenus pour porter les couleurs de la boucherie artisanale française sont : Joël Lucas (Lyon, Rhône, MOF 2004), Philippe Lalande (Boulazac, Dordogne, MOF 1993), Christophe Ip Yan Fat (Brive-la-Gaillarde, Corrèze), Mickaël Chabanon (Le Puy-en-Velay, Haute-Loire, MOF 2018), Benoît Réant (Aime-la-Plagne, Savoie), Gaëtan Genestoux (Le Cendre, Puy-de-Dôme), Stéphanie Hein (Bléré, Indre-et-Loire), Camille Cougoulic (Vannes, Morbihan), Fabien Michel (juge, Eybens, Isère), Dominique Ménager (staff technique, Sisteron, Alpes-de-Haute-Provence). 

A. P.

Joël Lucas, capitaine de l’équipe de France
Joël Lucas travaille à la Maison Vessière à Lyon (Rhône). © CFBCT

Joël Lucas, capitaine de l’équipe de France

À 57 ans, Joël Lucas endossera la casquette de capitaine de l’équipe de France lors du World butchers’challenge début septembre à Sacramento, pour la deuxième fois consécutive après l’édition à Belfast (Irlande) en 2018. Originaire de Tours, en Indre-et-Loire, sa carrière de boucher a débuté par un apprentissage au CFA de Tours. « J’exerce depuis 1983 », explique-t-il. Il a fait ses armes dans la région tourangelle, puis à Paris et enfin à Lyon (Rhône), ville d’origine de sa compagne. « De 1986 à 2000, j’ai travaillé aux côtés de Maurice Trolliet, Meilleur ouvrier de France (MOF) dans la boucherie éponyme. Depuis, je suis responsable de magasin de la Maison Vessière à la Croix-Rousse, où j’encadre entre huit et dix personnes », raconte-t-il. En 2004, Joël Lucas a décroché le titre de Meilleur ouvrier de France. « Tout au long de mon parcours, j’ai toujours côtoyé des MOF. Ces rencontres m’ont donné le goût du travail bien fait et de l’excellence », indique-t-il. Avant de rajouter :  « Pour la petite anecdote, j’ai mis dix ans à obtenir le titre, ma première candidature datant de 1993 ».

Le prix de la persévérance

Une obstination qui a fini par payer. « Je le dis souvent aux jeunes : il faut persévérer, s’entraîner au quotidien », insiste-t-il. Addict aux concours nationaux, il a notamment remporté à plusieurs reprises des titres sur les salons des métiers de bouche à Lyon, Nantes (Loire-Atlantique) ou encore Bourg-en-Bresse (Ain). Le Lyonnais d’adoption est également devenu en 2016 champion du monde de boucherie après la victoire de l’équipe de France en Australie. Cette année, ce sera sa troisième participation à la coupe du monde. Et pour l’occasion, il rêve « de ramener la deuxième étoile à la maison ». « Ce serait la cerise sur le gâteau pour mon dernier concours de très haut niveau. À 57 ans, il sera alors temps de laisser la place aux jeunes ». Des jeunes qu’il souhaiterait voir davantage motivés par l’amour de la boucherie française. « Les jeunes ou futurs jeunes n’ont pas la même ténacité que l’on pouvait avoir à notre époque, regrette-t-il. Aujourd’hui, nous avons du mal à recruter. D’ailleurs, lors d’un entretien d’embauche, les premières questions des jeunes concernent les horaires et le salaire. Avant, la priorité était de travailler et de trouver des patrons de qualité. Je le regrette mais heureusement, nous rencontrons encore de très bons jeunes avec l’envie d’avancer dans le métier. »

A. P.