Des perspectives 2021 en demi-teinte en filière cunicole
Alors que la filière cunicole fait face à de nombreux défis (renouvellement des générations, pression sur les matières premières, évolution des systèmes d’élevage, etc.), la crise du Covid brouille les pistes en matière de consommation.

Avec 34 200 tonnes, la production française de viande de lapin est en recul depuis plusieurs années et reste à la troisième place européenne, derrière l’Espagne et l’Italie. Avec une baisse significative de près de 4 % par an depuis 2011,
la production française s’est toutefois mieux tenue entre 2019 et 2020 (- 2 %). « La Covid-19 a finalement été plutôt positive en termes de consommation de lapins, aussi curieux que cela puisse paraître », annonce François Cadudal, directeur du pôle économie à l’Itavi. En effet, 50 % du marché du lapin en France se concentre autour de la consommation à domicile. Au cours de l’année 2020, le fort report de la consommation de la restauration hors domicile vers celle à domicile a mécaniquement favorisé les ventes de lapins. À cette époque, les produits « faciles à cuisiner », tels que les produits découpés et préparés ont été privilégiés par les ménages français. Pour préciser, le niveau de consommation est de 500 grammes de viande de lapin par an et par habitant en France, contre 1 kg en Espagne. En termes de cotation du lapin vif (sortie d’élevage), l’Italie et l’Espagne ont connu un fort recul des prix en 2020 (entre - 5 à - 11 %), contre + 0,9 % en France par rapport à 2019. Pour le début d’année 2021, les deux premiers producteurs européens ont connu une forte reprise des prix (entre + 9,5 et 10,1 %), et une reprise dite « plus modérée » en France (+ 4,5 %). « Cette dynamique des prix s’explique par des organisations de marchés différentes. La filière française est relativement organisée, contrairement aux éleveurs en Espagne ou en Italie qui sont un peu plus indépendants et davantage soumis aux fluctuations des marchés », explique François Cadudal.
Une filière à stabiliser
Face à ces constats, la prudence est de mise pour 2021. Selon les prévisions, la production devrait être revue à la baisse sur le premier semestre 2021. Les marchés internationaux de la viande de lapin restent incertains. « En termes de débouchés français, nous avons une demande assez bonne en ce début d’année, avec une production en repli, ce qui tend à expliquer que les prix payés aux producteurs sont restés relativement fermes (+ 5,1 % par rapport à 2020) », poursuit-il.
Par ailleurs, l’année 2021 reste préoccupante concernant les coûts des matières premières. Les niveaux d’intrants pour l’alimentation animale, qui représente 50 % du coût du lapin à la sortie de l’élevage, sont élevés depuis plus de deux ans et devraient continuer leur progression. Une hausse des prix qui s’explique par les spécificités de la ration lapin, riche en fibres (betterave, luzerne). « Comme pour les autres filières, les coûts des matières premières sont extrêmement défavorables à la filière lapin. Nous ne sommes pas loin du record absolu », s’inquiète le directeur du pôle économie de l’Itavi. « L’enjeu de la filière française est aujourd’hui de stabiliser et sécuriser la production de viande de lapin, en permettant aux éleveurs de pouvoir s’adapter aux demandes sociétales et/ou économiques », prévient François Cadudal. En effet, selon lui, il n’est pas réaliste d’espérer retrouver des niveaux de production semblables à ceux d’il y a dix ans. La France englobe aujourd’hui entre 600 et 700 producteurs professionnels de lapins en France, des chiffres revus à la baisse chaque année.
Amandine Priolet