Accès au contenu
Cynégétique

A l'approche de l'ouverture de la chasse...

A quelques jours de l'ouverture de la chasse, entretien avec le président de la fédération départementale des chasseurs (FDC) de la Drôme, Rémi Gandy, sur des sujets en lien avec l'agriculture.
A l'approche de l'ouverture de la chasse...

Rémi Gandy, comment se présente la saison de chasse 2020-2021 et la population de sangliers ?

Rémi Gandy : « Dimanche 13 septembre, c'est l'ouverture générale de la chasse pour les quelque 12 000 chasseurs de la Drôme. Chassable, lui, depuis juin dans certaines conditions, le sanglier est naturellement sous haute surveillance et nous espérons que des mesures anti-covid ne compliqueront pas la chasse des battues.
En 2019-2020 dans le département, 12 307 sangliers ont été prélevés (contre 9 241 en 2018-2019 et 20 019 en 2017-2018). En 2020-2021, leur population devrait augmenter suite à des hivers non rigoureux (baisse de la mortalité des juvéniles), fructification forestière favorable, sorties de chasseurs freinée par la Covid. Le montant total d'indemnisations aux agriculteurs pour les dégâts de grand gibier sur cultures atteint 336 681 € en 2019-2020 (contre 145 487 en 2018-2019 et 480 300 en 2017-2018). La protection aux cultures reste une priorité de la FDC, qui finance à 50 % l'achat par les ACCA(1) d'équipements (clôtures, électrificateurs...). Le total investi depuis huit ans s'élève à 572 000 €. »

Quelles relations entretenez-vous avec le monde agricole, notamment concernant le sanglier ?

R. G. : « Avec le président de la chambre d'agriculture, Jean-Pierre Royannez, nous avons prévu de nous rencontrer d'ici le 15 octobre pour faire un tour d'horizon des dossiers que nous avons en partage. Parmi eux, celui des dégâts de sangliers aux cultures. Nous sommes dans un process d'amélioration et d'adaptation permanente sur ce sujet. Si quelques cas particuliers sont problématiques, nous maîtrisons relativement bien la population drômoise du suidé. Reste le cas des poches semi-urbaines, de zones cernées d'infrastructures routières... hébergeant l'animal : elles sont difficiles à chasser et difficiles à réguler par la louveterie. Cet échange avec Jean-Pierre Royannez complètera celui que nous avons eu le 25 août avec la directrice de la DDT, Isabelle Nuti. Sur le sujet, nous avons convenu avec elle d'une réunion de travail d'amélioration des complémentarités et de rapidité d'action FDC 26/chasses locales/louveterie. »

Des partenariats lient la FDC à l'agriculture, n'est-ce-pas ?

R. G. : « Oui, et nous les évoquerons avec Jean-Pierre Royannez lors de notre rencontre. Il y a entre autres celui de l'amélioration de la prise en compte du petit gibier dans les agrosystèmes : l'opération « Cipan(2) biodiversité » est une réussite (60 000 € de semences financées cette campagne par la FDC pour 1 020 hectares), le travail de réimplantation des haies aussi, les opérations « bords de champs » peuvent être boostées... Outre le climat printano-estival et la gestion cynégétique, c'est en grande partie grâce à ces opérations départementales et aux initiatives d'aménagement plus discrètes (mais nombreuses) entre chasseurs et agriculteurs locaux que nous imputons le succès historique de la reproduction 2020 du petit gibier. Bien au-delà du seul gibier, de nombreux oiseaux, petits mammifères, insectes... profitent de nos travaux conjoints.
Avec la chambre d'agriculture, nous devons définir et affirmer les grands axes de travail des années à venir, toujours mieux faire coopérer nos services environnement respectifs pour le meilleur état de la biodiversité sauvage liée aux activités agricoles. »

Rémi Gandy, président de la FDC de la Drôme, lors de la manifestation d'opposition à la création de vie sauvage le 21 août à Crest.

La régulation par des chasseurs de déprédateurs tels que les corvidés se poursuit-elle ?

R. G. : « Les corvidés restent problématiques pour la réussite de certaines cultures. L'aide des ACCA aux exploitations est efficace (tirs de destruction) mais pas toujours connue des agriculteurs et parfois des chasseurs, surtout pour la dimension règlementaire et parfois technique. Il en va de même pour la lutte contre le ragondin. De grande taille, vivant en colonie, cette espèce introduite cause de sérieuses destructions de cultures et de berges. C'est aussi un des principaux vecteurs de la leptospirose, zoonose dangereuse pour l'homme. Sa régulation est impérative.
Pour la protection des cultures contre le ragondin mais aussi le sanglier en zone peuplée, on ne connaît pas assez les possibilités qu'offrent les chasseurs à l'arc, extrêmement discrets mais efficaces. Ils doivent être associés à ces régulations. L'Association des chasseurs à l'arc de Drôme (ACAD), présidée par un fin connaisseur du monde agricole, Ludovic Moulin, doit être sollicitée. »

Par rapport au loup, comment se positionne la FDC ?

R. G. : « Le loup n'est pas un gibier. Pour autant, la FDC 26 étudie l'espèce dans ses relations au grand gibier et partage ses connaissances avec les services de l'État. Elle doit aussi partager celles qui peuvent aider les éleveurs. L'important travail de piégeage photographique fournit par le monde cynégétique doit être partagé pour alerter : par exemple, en cas d'apparition nouvelle sur une zone, comme à Marsanne.
Les chasseurs ne souhaitent pas le loup comme gibier mais sont solidaires du monde de l'élevage ; déjà pour les souffrances humaines que génèrent les attaques du canidé mais aussi pour l'entretien d'espaces ouverts, favorables à la biodiversité sauvage des prairies, par ses différents cheptels. »

D'autres sujets concernant l'agriculture ?

R. G. : « Oui, je voudrais dire que beaucoup de personnes, néo-ruraux ou pas, s'installant en agriculture ne connaissent pas l'organisation de la chasse drômoise. Nous voulons y remédier, faire connaître nos ressources et nos instances de dialogue ; c'est capital.
Je tiens aussi à expliquer pourquoi la FDC a soutenu l'ACCA de Léoncel à la manifestation contre la création de réserves de vie sauvage du 21 août à Crest. Ce n'est pas contre le ré-ensauvagement tel que le pratique l'Aspas(3) mais parce qu'elle déclare vouloir relâcher des sangliers et des cerfs élaphes du domaine de Valfanjouse. Je rappelle que l'indemnisation des dégâts de sangliers incombe aux chasses locales et à la FDC. Et, dans ce parc, le cerf est potentiellement un hybride. Si les grilles sont enlevées, se posera un problème de concentration d'espèces que l'on ne souhaite pas trop voir se développer. »

Propos recueillis par Annie Laurie

(1) ACCA : association communale de chasse agréée.
(2) Cipan : cultures intermédiaires pièges à nitrates.
(3) Aspas : association pour la protection des animaux sauvages.