JOURNÉE TECHNIQUE
Stress, confort et alimentation peuvent jouer sur la qualité du lait de chèvre

Le 10 novembre à Crest, une soixantaine de personnes (éleveurs, techniciens, représentants des laiteries, jeunes en formation...) a participé à la journée « Des chèvres en pleine forme pour un lait de qualité » organisée par le Criel* Alpes Massif Central et Auvergne-Rhône-Alpes Élevage.

Stress, confort et alimentation peuvent jouer sur la qualité du lait de chèvre
Le manque de places à l’auge ou sur l’aire paillée peut influer sur l’état sanitaire des chèvres. ©AD26-S.S.

Depuis 2018, le Criel Alpes Massif Central (AMC) a fait de l’amélioration des résultats cellulaires en élevage caprin une de ses priorités. Pour rappel, le nombre de cellules somatiques présentes dans le lait est un indicateur de l’état de santé de la mamelle. Ces résultats cellulaires interviennent notamment dans le paiement du lait. Qui dit niveaux cellulaires élevés dit donc risque de pertes financières au sein d’une exploitation.

Aussi depuis cinq ans, le Criel AMC et ses partenaires, dont Auvergne-Rhône-Alpes Élevage, l’Institut de l’élevage (Idele), la Fromagerie de la Drôme, la Fromagerie Guilloteau ou encore les GDS et les structures Conseil Élevage de la région, ont cherché à identifier les marges de progrès à l’échelle des exploitations. « Différentes études ont permis de prendre de la hauteur par rapport à cette problématique. Le discours n’est donc plus centré sur la maitrise des infections mammaires mais sur la nécessité d’une approche plus globale du bien-être du troupeau », a affirmé Benjamin Deltour, le 10 novembre à Crest. Ex-vétérinaire au sein du GDS de la Drôme, il a notamment animé le réseau technique « cellules » Rhône-Alpes. Il intervient désormais en tant que vétérinaire indépendant.

Dans cette approche globale, confort, alimentation et absence de stress font partie des éléments qui vont concourir au bien-être animal et donc à l’amélioration des concentrations cellulaires.

Comment s’assurer du confort des chèvres ?

Aude Pasquet, conseillère caprin chez Adice**, a proposé un exercice très instructif aux éleveurs de Drôme, Isère, Ardèche, Hautes-Alpes, Bouches-du-Rhône qui participaient à cette journée technique. Pour observer le confort des chèvres et identifier des points d’amélioration, Adice propose une prestation de pose de caméra dans les bâtiments. La diffusion en accéléré des images enregistrées nuit et jour permet de rapidement détecter d’éventuels « points noirs », par exemple le manque de places à l’auge, le manque de places à l’aire paillée, la présence de courants d’air qui contraignent les animaux à se concentrer sur une partie de l’aire… L’occasion pour les organisateurs de la journée de rappeler les recommandations en matière de dimensions de la chèvrerie, d’accès à l’alimentation, d’abreuvement, d’entretien de la litière (voir encadré). 

Points de vigilance sur l’alimentation

Mathilde Chazalet, conseillère caprin chez Adice, a listé quelques conseils en matière d’alimentation qui peuvent contribuer au bien-être de l’animal et donc à son état sanitaire. « Si vous disposez de plusieurs fourrages de qualités différentes, privilégiez le foin grossier et appétent le matin et celui de moindre fibrosité pour la nuit. Enlevez les refus tous les jours », conseille-t-elle. Les refus tolérés sont de 5 à 10 % en fourrages fins et de 10 à 15 % en fourrages grossiers. Elle recommande aux éleveurs de s’assurer qu’il y a suffisamment de fourrage pour toute la durée de la nuit. Côté concentrés, il convient de les distribuer après le fourrage et de manière fractionnée (400 g maximum par repas et 3 heures au moins entre les repas de concentrés). Et Aude Pasquet insiste : « il faut éviter les nombreux passages dans la chèvrerie, par exemple pour repousser le fourrage. Cela perturbe la rumination et le repos. »

Stress : quelle incidence de la mise à l’herbe ?

« L’augmentation des concentrations cellulaires est le plus souvent liée à une infection mais on constate que certains stress peuvent aussi influer, notamment au moment de la mise à l’herbe, a détaillé Alain Pommaret de la ferme expérimentale du Pradel (07). Lors d’essais, nous avons observé un doublement des concentrations cellulaires dès le lendemain de la mise à l’herbe. Ces concentrations diminuent ensuite progressivement pour retrouver leur niveau initial au bout d’une vingtaine de jours. » Les analyses bactériologiques confirment que cette augmentation n’est pas imputable à une infection mais bien au stress constitué par la mise à l’herbe. « D’où l’importance du statut initial de l’animal avant celle-ci », a indiqué Alain Pommaret.

Si confort, alimentation et stress peuvent jouer sur la qualité du lait, il n’en reste pas moins que la maitrise des taux cellulaires repose aussi sur une bonne préparation au tarissement. « Tarir contribue à l’assainissement des mamelles infectées et à la récupération de leurs potentiels de production », a souligné Benjamin Deltour. Les organisateurs de cette journée technique à Crest conseillent aux éleveurs de se tourner vers leurs conseillers techniques pour identifier les actions correctives qui permettront de mieux gérer les concentrations cellulaires. En résumé, il n’existe pas de remède miracle mais l’important est de rechercher la cohérence et d’identifier les points d’amélioration possibles à chaque étape : depuis les mises-bas jusqu’au tarissement.

Sophie Sabot

* Criel : centre régional interprofessionnel de l’économie laitière.
** Adice : Ardèche Drôme Isère Conseil élevage 
CONFORT

Les recommandations en matière de logement

Pour les chèvres adultes, prévoir :

- une surface paillée optimum de 1,7 à 2 m² par animal et vérifier lors du couchage que toute l’aire paillée est occupée ;

- un paillage de 0,7 à 1 kg/ jour /chèvre ;

- une longueur d’auge de 33 à 40 cm par animal. Il faut au moins une place à l’auge pour chaque chèvre et idéalement 5 % de cornadis supplémentaires pour éviter la concurrence.

Pour l’abreuvement : prévoir au moins un abreuvoir simple pour 25 chèvres adultes.

En ce qui concerne l’entretien de la litière, prévoir un curage tous les deux mois environ, à ajuster si besoin. Après curage, reconstituer la base de la litière avec 4 à 5 kg de paille par chèvre.