Inflation
Améliorer la rentabilité des exploitations en circuits courts

Élargir les circuits de commercialisation, accentuer la communication, actualiser les prix de vente et optimiser certains postes sont les principales pistes à explorer pour conserver les marges.

Améliorer la rentabilité des exploitations en circuits courts
©AD26

La chambre d’agriculture Savoie Mont-Blanc a organisé le 16 juin une soirée d’échanges pour identifier, face à la crise inflationniste actuelle, des leviers d’amélioration de la rentabilité des entreprises agricoles commercialisant en circuits courts. Une quarantaine d’éleveurs, de producteurs fermiers, de maraîchers, d’arboriculteurs et de porteurs de projets étaient reçus au Gaec la Ferme de Follon à Copponex (Haute-Savoie). Un lieu judicieusement choisi, tant l’exploitation est historiquement orientée vers la vente directe au consommateur et l’accueil du public. Cinq associés et cinq salariés travaillent en effet sur cet élevage bovin lait (850 000 l/an en zone AOP reblochon, livraison à la coopérative du Mont Salève). Ils transforment et vendent sur place (et en point de vente collectif) une production diversifiée de bovins viande et de porcs fermiers (560 cochons engraissés/an). De plus, 3 000 scolaires sont accueillis chaque année dans le cadre de l’activité de ferme pédagogique. La visite guidée des installations (bâtiments d’élevage, laboratoire et magasin) a permis d’engager de riches discussions entre les participants en toute convivialité. « Pour nos systèmes en circuits courts, répercuter sur les prix de vente au consommateur la hausse actuelle du coût des intrants, énergies, emballages et autres services, se heurte à l’érosion du pouvoir d’achat des clients. Le prix psychologique, c’est notre préoccupation du moment », a indiqué Agnès Prieur-Drevon, élue de la chambre d’agriculture et référente du réseau Bienvenue à la ferme sur les deux Savoie. Grâce aux témoignages de producteurs sur leurs stratégies commerciales, aux présentations de l’équipe de conseillers sur les coûts de revient et le rappel des bases d’une communication efficace, les participants ont pu découvrir lors de cette soirée quelques ressources nouvelles pour réduire leurs charges et mieux écouler leurs produits.

Élargir le marché

Pour ne laisser passer aucune opportunité, le panorama des différents modes de commercialisation possibles a d’abord été dressé. Il y a les traditionnelles ventes à la ferme, en magasin collectif ou spécialisé, sur les marchés de plein air, auprès des restaurants, des GMS locales, des salons et foires, en restauration collective, en drive et en paniers. Les casiers automatiques en libre-service pointent autour des villes. Jugé trop chronophage, l’e-commerce décolle très peu en agriculture.
La Ferme des Moises, élevage caprin fermier situé à Habère-Poche (deux associés et trois salariés), a dernièrement modernisé et agrandi son magasin dans l’idée de se recentrer sur la maîtrise totale de la valorisation de sa production et d’étoffer la gamme par de l’achat-revente. Laëtitia Bibollet a témoigné que la fidélisation du client par le relationnel compte autant que le rapport qualité-prix proposé. Disposer d’un terminal de paiement par carte bancaire est aussi un plus.

Communiquer davantage

Les conseillers des chambres d’agriculture peuvent accompagner les exploitations en circuits courts à être plus performantes dans leur investissement communication. Une bonne visibilité est fondée sur une stratégie : définir un public cible, un message adapté et des canaux médias de diffusion accessibles financièrement. En moyenne, 2 à 5 % du chiffre d’affaires d’une entreprise sont habituellement investis en promotion et en référencement. Pour faire parler d’eux, les participants ont indiqué solliciter à la fois les journaux et radios, friands de circuits alimentaires locaux, et les réseaux sociaux internet, pour rajeunir et élargir leur clientèle. Créer l’évènementiel est toujours un excellent moyen de se faire connaître : des portes ouvertes, des dégustations de produits saisonniers, comme la fin de la saison de l’asperge, l’arrivée de la tomate… Faire partie d’un réseau comme Bienvenue à la ferme offre des synergies.

Actualiser les prix de vente

La question de la fixation de la valeur économique d’un produit, celle qui compense les charges et offre au producteur une juste rémunération de son travail, est délicate. Peu de producteurs font le calcul de leurs coûts réels de revient, qui peuvent varier énormément d’une exploitation à une autre, selon la performance du système, le niveau d’endettement, les besoins privés… De plus, les prix sont souvent différenciés en fonction du circuit de vente. « Livrer un point ou passer six heures sur un marché pour le même volume écoulé, forcément ce n’est pas le même coût, ni la même marge, a expliqué la conseillère Nathalie Sabatté. Il faut donc se méfier des comparaisons hâtives avec les confrères. C’est un subtil équilibre à trouver : ne pas avoir honte de gagner sa vie en procédant à des révisions régulières de tarifs. » 
Parfois, accepter de déléguer certaines tâches à un prestataire, par exemple, peut faire gagner beaucoup de temps. Depuis quelques mois, des leviers d’économies s’activent : tournées de livraison optimisées pour limiter le budget carburant, commandes groupées d’intrants pour comprimer les prix, promotion des emballages réutilisables ou consignés… En sachant que le client distingue clairement la valeur du produit de celle de son acheminement, de nombreux producteurs n’hésitent maintenant plus à facturer les frais de livraison des petites commandes à domicile.  

B. C. 

Soirée d’échanges sur la rentabilité des entreprises agricoles en système de commercialisation directe, le 16 juin à Copponex (Haute-Savoie), organisée et animée par l’équipe circuits courts de la chambre d’agriculture Savoie Mont-Blanc. (crédit : BC-TDS)