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AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

Le petit gibier retrouve sa place dans le paysage agricole

Les fédérations départementales de chasse sont à l’origine de programmes de conservation ou de réintroduction de petits gibiers. Plantation de haies, de cultures intermédiaires, ouvertures de milieux… Autant d’actions qui permettent à certaines espèces de réinvestir le territoire.

Le petit gibier retrouve sa place dans le paysage agricole
Dans le Sud du département de l’Ardèche, les secteurs de Bourg-Saint-Andéol, Saint-Martin-d’Ardèche, Saint-Marcel-d’Ardèche, Lagorce et les Vans - Chambonas ont bénéficié de plantations de haies. ©FDC38

C’est une des façons pour le petit gibier de se réapproprier les lieux qu’il habitait il y a quelques dizaines d’années. La replantation de haies connait un véritable engouement dans le Rhône depuis trois ans. « Cela fait plus de 40 ans qu’on tente de replanter des haies. Ces dernières années, la prise de conscience sociétale a amené beaucoup d’intercommunalités à prendre la mesure de l’enjeu et à mettre en face des moyens financiers avec d’autres partenaires, ce qui a permis de concrétiser de nombreux projets », constate Antoine Herrmann, directeur de la fédération de chasse du Rhône. Dans son département, quelque 30 000 arbres sont plantés tous les ans.

Des haies pour préserver l’habitat

Pour préserver l’habitat et la reproduction du petit gibier dans les plaines rhodaniennes, des espèces d’arbres et d’arbustes s’avèrent efficaces. « Je pense au cornouiller sanguin, au fusain d’Europe, au charme ou encore au chêne et au noyer. Le frêne, riche en protéines, fait partie des arbres très intéressants pour l’alimentation végétale du gibier mais aussi du bétail », précise-t-il. S’il est difficile de réaliser une corrélation directe entre la replantation de haies et la réintroduction des espèces de petit gibier, dépendant notamment de la météo et de l’occupation des sols, la fédération de chasse rhônalpine a tout de même constaté des effets positifs sur le secteur du mont Brouilly. Un programme important d’enherbement des vignes a permis à l’alouette lulu, en déclin sur le territoire national, de voir ses populations repartir à la hausse. L’Isère aussi constate depuis un an un fort intérêt des collectivités et partenaires, y compris des agriculteurs, en direction de la replantation de haies. « De 1990 à aujourd’hui, 75 km de haies ont été replantés sur notre territoire, 40% du linéaire se situe en milieu agricole », souligne Sébastien Blanchard, technicien du service environnement et responsable de la tutelle « habitat » à la fédération de chasse de l’Isère. Des programmes de création de mares, de réouverture de milieux sur des coteaux non mécanisables du secteur de Chambaran et la mise en place de 600 à 1000 ha par an de cultures intermédiaires pièges à nitrate (Cipan) font partie des principales actions menées par la fédération de chasse de l'Isère. Idem en Drôme où un partenariat existe de longue date entre la chambre d'agriculture et la fédération des chasseurs pour l'implantation de Cipan en zones vulnérables. 

La réouverture des garrigues

En Ardèche, les garrigues, autrefois entretenues par les petits ruminants, ovins et caprins ont été au fil du temps victimes de l’exode rural. Des centaines d’hectares de végétation ont lentement colonisé les paysages, faisant disparaître la faune et la flore sauvage. La réouverture de ces milieux a permis de réintégrer des cultures intéressantes pour leur conservation. « Quand on démarre un projet sur une garrigue fermée, il faut pratiquement 10 ans pour retrouver le paysage « d’origine ». Cela a été le cas à Bourg-Saint-Andéol », indique Fabrice Etienne, technicien petit gibier et biodiversité à la fédération de chasse de l’Ardèche. Dans le Sud du département, quatre autres secteurs géographiques « monitorés » ont bénéficié de la méthode des indices ponctuels d’abondance (IPA), qui consiste à réaliser l’inventaire des mâles chanteurs de chaque espèce sur un site donné. Celle-ci a permis de constater une amélioration significatives des effectifs de tourterelles des bois, rossignols philomèles et fauvettes méditerranéennes. « Pour la perdrix rouge, on passe d’une densité inférieure à 2-3 couples par 100 ha sur une zone témoin non aménagée à 5 à 10 couples par 100 ha sur une garrigue « réouverte ». Nous réalisons que son absence est vraiment liée à un problème d’habitat. Il suffit de quelques dizaines d’hectares aménagés pour qu’elle retrouve sa place », ajoute le technicien. Dans les prochaines années, la fédération de chasse ardéchoise souhaite davantage impliquer le monde pastoral en amont de sa démarche, l’écopastoralisme permettant d’entretenir le paysage et de respecter les exigences écologiques de la faune et de la flore sauvage.

Alison Pelotier

Une étude sur le lièvre d’Europe

La fédération départementale de chasse de Saône-et-Loire dénombre depuis 1988 les individus de lièvres d’Europe présents sur son territoire. « Dans le département, deux-cents territoires sont concernés par des plans de gestion qui selon les populations existantes peuvent limiter la chasse à un nombre de jours ou de prélèvements ou à l’utilisation d’un dispositif de marquage (bracelets) », explique Anthony Morlet, technicien cynégétique à la FDC71. Dans le cadre du Réseau nationale d’observation « Lièvre » en partenariat avec l’Office français de la biodiversité (OFB), une soixantaine de territoires de chasse du Val-de-Loire peuvent faire analyser le cristallin de l’œil des lièvres prélevés par le laboratoire mâconnais Agrivalys. « Nous pouvons connaître l’âge des individus et savoir si le taux de reproduction des populations de lièvres sur nos territoires est bon ou mauvais », souligne-t-il. « En 30 ans, le taux de reproduction du lièvre a diminué de moitié. Depuis six ans il a encore baissé. Les derniers résultats (été 2021) ont permis de recenser seulement 44 % de jeunes sur la totalité des prélèvements », conclut le technicien.

AP