Conjoncture
AMB Rousset : s’adapter à une crise mondiale de la noix

AMB Rousset voyait arriver une crise mondiale et française de la noix depuis longtemps. Pour autant, les effets négatifs quant au fonctionnement de l’usine ne devraient véritablement se faire sentir qu’en 2024. L’entreprise sera présente au salon professionnel organisé à l’occasion du Symposium de la noix à Grenoble, du 12 au 16 juin.

AMB Rousset : s’adapter à une crise mondiale de la noix
Renaud Rousset, démonstrateur pour quelques heures d’une petite ramasseuse de fruits au sol, ici de châtaignes.

«Cela devait arriver », c’est par ces mots que Renaud Rousset, petit-fils du créateur des Ateliers Mécaniques de Beaulieu (AMB), spécialisés depuis plus de quarante ans dans la production de matériels de récolte, commente la crise de la noix. Présents dans plus de quarante pays où de la noix est produite, le jeune responsable export de l’entreprise voyait se développer rapidement la production mondiale et estimait qu’il « arriverait bien un moment où le marché aurait du mal à être suffisant ». La Covid, la guerre en Ukraine, l’inflation ne sont que des causes conjoncturelles à ce qu’il semble être une crise structurelle des fruits à coque, difficile à consommer rapidement, parce que peu élaborés…
Comme tous les acteurs de la filière, le constructeur AMB Rousset, situé à Beaulieu dans l’Isère, est touché de plein fouet par une baisse drastique des investissements en matériels de la part des nuciculteurs.
La situation est inédite dira-t-il : « Les producteurs s’étaient habitués à une production de niche avec peu de transformation. Quand une production marche, tout le monde se lance et l’on arrive vite à une surproduction. Les jeunes générations n’achètent plus de la noix en coque, il faut leur proposer du cerneau, plus facile à consommer… » 

40 % des machines à l’exportation

Les ateliers de Beaulieu réalisent 40 %, des 16 millions annuels de chiffre d’affaires à l’exportation, dans tous les pays où sont produites noix, amandes, noisette ou encore pomme à cidre. Leur spécialité : ramasser tout ce qui se récolte au sol. Il rajoute : « Nous travaillons bien avec tous ces pays, c’est ce qui a permis la croissance de notre entreprise. Cependant, ces marchés commencent à être équipés et il faudra trouver de nouvelles niches. Il existe aussi, près de chez nous, quelques départements français habitués à l’arboriculture comme les Charente ou la Meurthe-et-Moselle qui plantent des noyers depuis une quinzaine d’années. Ils arrivent en production et les agriculteurs ont besoin de solutions globales pour le ramassage, le pré-conditionnement et le séchage. Pour 2023, notre chiffre d’affaires ne devrait baisser que de 20 %, mais pour 2024, nous sommes plus inquiets, car les commandes de notre année de travail se prennent six à douze mois avant, c’est-à-dire en ce moment… »
Le jeune dirigeant dit avoir peu de visibilité et c’est très difficile de savoir ce que seront les besoins de l’usine pour anticiper très en amont les commandes de composants. Sur certains d’entre eux, moteurs thermiques ou hydrauliques, il faut réserver auprès des fabricants quelques fois deux ans avant. Cette absence de visibilité fait peser des difficultés à produire si d’aventure le marché redémarrait. Dans l’immédiat, ce sont une vingtaine d’emplois, sur un effectif de 90 salariés, qui ne seront pas remplacés au gré des départs à la retraite.

Diversifier les machines

Les ateliers construisent aussi des ramasseuses à déchets pour les collectivités qui interviennent après de grands évènements de foules, tels que les 24 heures du Mans, spectacles de plein air… Le cassage-énoisage est aussi un axe de diversification sur lequel ne cessent de travailler les ateliers en proposant de petites unités. Ils en sont certains, c’est aussi une voie de salut pour que les petits producteurs puissent mieux valoriser leurs tonnages de noix en les transformant en cerneaux.
L’entreprise sera présente au Symposium de la noix à Grenoble, du 12 au 16 juin, avec l’espoir de rencontrer les prescripteurs internationaux. Renaud Rousset compte notamment se faire connaître auprès des chercheurs de l’université UC Davis de Californie qui travaillent sur le génome de la noix et sa culture. L’objectif de l’entreprise quadragénaire est d’avoir plus d’échanges avec les producteurs outre-Atlantique, les surfaces de noyers et les tonnages produits y sont vingt à trente fois plus importants qu’en France, en quelque sorte, le « New Deal » américain pour AMB...

Roland Saint Thomas