Syndicalisme
Lait de vache : un recul de la valorisation « inacceptable »

Alors que la baisse de la collecte de lait de vache persiste et s’accélère, les éleveurs constatent un recul de leur rémunération. Ils dénoncent la pression des industriels et de la grande distribution.

Lait de vache : un recul de la valorisation « inacceptable »
Malgré la baisse du nombre de vaches laitières en France, le prix du lait payé aux éleveurs est en baisse. Une situation que dénoncent ensemble la FDPL, la FDSEA et les JA de la Drôme. © iStock-THEPALMER

Malgré la baisse du nombre de vaches laitières en France, le prix du lait payé aux éleveurs est en baisse. « En juin 2022, le prix de base atteignait 428 euros. Cette année, en juin, on est à 414 euros les mille litres, c'est incompréhensible alors que les charges, elles, n'ont pas baissé », constate Sébastien Ageron, co-président de la Fédération départementale des producteurs de lait de la Drôme (FDPL 26). En plus, des enseignes de la grande distribution envisagent de faire des promotions, c'est inacceptable. » Il dénonce une pression des industriels et de la grande distribution qui cherchent, selon lui, à casser les prix pour contenir l'inflation alimentaire. « Le tout sur le dos des éleveurs. Nous ne voulons pas être une variable d'ajustement », souligne-t-il.

Production de lait en repli

Mois après mois, en France, « la baisse de la collecte de lait persiste et s’accélère », font remarquer la FDPL, la FDSEA et les Jeunes agriculteurs de la Drôme. Depuis janvier, elle est inférieure de 226 000 litres à celle de 2022. Ce repli de 2,1 % est encore plus important comparé au niveau de la collecte de 2021. « Avec une diminution de 2,5 % du nombre de vaches laitières sur un an(1), la décapitalisation du cheptel reste le facteur principal de cette baisse de production », indiquent les trois organisations dans leur communiqué du 2 août. Leurs responsables s'inquiètent du renouvellement des générations car « dans la Drôme, la moitié des éleveurs laitiers est âgée de plus de 50 ans. Nous ne sommes plus qu'une soixantaine, observe Sébastien Ageron. Rien que dans le Royans, on dénombrait plus de 300 producteurs de lait quand mon père s'est installé ! » Selon la FDPL, la FDSEA et les JA de la Drôme, plusieurs raisons - « économiques, climatiques, sanitaires ou sociales » - expliquent cet effondrement du nombre d'éleveurs de bovins laitiers. D'ailleurs, le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel) alerte sur des perspectives d’autosuffisance particulièrement inquiétantes d’ici 2030. Au 1er juin 2023, le nombre d’entrées de génisses en production s’est réduit de 5 %.

« Si rien ne s'améliore, prévient Sébastien Ageron, la tension va monter d'un cran et nous retournerons dans les grandes surfaces. » ©AD26-CL

« Lactalis, mauvais élève »

La filière lait de vache « reste le premier secteur économique en élevage et à fort un potentiel d’installation », argumentent la FDPL, la FDSEA et les JA de la Drôme. Encore faut-il que le prix payé aux producteurs soit suffisamment rémunérateur. « Sodiaal joue un peu mieux le jeu cette année, constate Sébastien Ageron. Mais le plus mauvais élève actuellement, c'est Lactalis, ce qui impacte beaucoup d'éleveurs drômois. L'Union nationale des éleveurs livreurs Lactalis (Unell(2)), à laquelle notre OP Saint-Marcellin adhère et qui négocie les prix au niveau national, n'a jamais réussi à trouver un accord avec Lactalis pour juillet. Lactalis proposait un prix du lait encore plus bas qu'en juin. L'Unell a donc dû déclencher une clause de sauvegarde, laquelle permet de calculer un prix sur la moyenne des trois derniers mois. »

« La rémunération des éleveurs doit être à la hauteur des coûts de production, cela ne peut passer que par une application pleine et entière de la loi Egalim », insistent la FDPL, la FDSEA et les JA 26. Les trois organisations syndicales restent vigilantes et mobilisées quant au prix de vente du lait dans les GMS. « Il est inconcevable que des promotions massives sur des produits laitiers soient négociées avec les industriels en sus de celles déjà prévues dans les contrats annuels », insistent-elles. « Si rien ne s'améliore, prévient Sébastien Ageron, la tension va monter d'un cran et nous retournerons dans les grandes surfaces. »

Christophe Ledoux

(1) d’après FranceAgriMer

(2) Association d'organisations de producteurs (AOP) liées contractuellement au groupe Lactalis.