AGRONOMIE
Prairies : l’entretien mécanique,  à utiliser avec parcimonie

Face à la dégradation des prairies, l’entretien mécanique peut être une solution de secours. Pourtant, il est primordial de connaître les causes de l’apparition de ces signes afin de limiter les interventions mécaniques sur les sols. 

Prairies : l’entretien mécanique,  à utiliser avec parcimonie
Au printemps, le marquage des anciens bousats, où l’herbe est plus haute et verte, exprime une pauvreté du sol. © Bruno Osson, Gnis

L’association française pour la production fourragère (AFPF) a publié fin 2019 un guide intitulé : L’entretien mécanique des prairies : Pourquoi ? Comment ? Et pour quels bénéfices ? « La prairie subit régulièrement des agressions, humaines ou naturelles, qui peuvent nécessiter d’intervenir pour pallier les éventuels risques de production », souligne Elodie Desmoniere, ingénieure et animatrice à l’AFPF. C’est en s’appuyant sur cet ouvrage que l’institut de l’élevage (Idele) a proposé, le 23 octobre dernier, un webinaire (conférence en ligne) sur ce thème.
« Derrière l’entretien des prairies se cache une diversité d’actions, aux fonctions multiples, qui ont pour objectifs de maintenir ou renforcer le potentiel productif et fourrager du couvert, de maintenir un bon équilibre dans le temps entre espèces, de maintenir un couvert dense et de limiter l’hétérogénéité de la végétation », précise Patrice Pierre, chef de projet à l’Idele. L’entretien se réalise en fonction du niveau de dégradation de ces prairies : certaines auront seulement besoin d’être améliorées, d’autres nécessiteront un sursemis ou bien une rénovation totale. Dans ce contexte, de multiples interventions peuvent être requises. « La plus importante, à mon sens, est celle qui relève de l’exploitation, tout ce que l’on va mettre derrière la valorisation du couvert », poursuit Patrice Pierre. 

Évaluer les risques au regard des bénéfices 

Les interventions chimiques (fertilisation minérale ou organique, amendement, désherbage chimique) et les interventions mécaniques (sur la végétation, sur la surface du sol, en profondeur ou en cas d’hydromorphie) sont parfois pourtant inévitables. « La mise en œuvre et l’utilisation de ces actions mécaniques doivent s’appuyer sur un certain nombre de signes que renvoie la végétation », rappelle l’intervenant de l’Idele. « Intervenir mécaniquement, c’est aussi se poser la question des causes de l’apparition de ces signes. Par exemple, l’importance des refus renvoie à la problématique du sous-pâturage ou de la pression de pâturage. La présence de mousse peut être un indicateur de dégradation, etc. », note Patrice Pierre.
De nombreuses actions sont possibles en fonction des observations sur le terrain : broyage ou fauche en cas de refus et d’adventices ; ébousage en présence de bouses ; étaupinage pour venir à bout des taupinières ou des ornières ; aération et scarification sur sol tassé ; émoussage en présence de mousse ; roulage sur un sol soufflé en sortie d’hiver, etc. Pour autant, il est nécessaire de savoir comment éviter l’apparition de ces désagréments pour pouvoir limiter les interventions, parfois néfastes. 
De plus, si certains matériels combinent plusieurs de ces fonctions, les coûts de passage ne sont pas négligeables avec des actions allant de 30 à 50 € / ha.

Cette prairie présente une dégradation par surpâturage d'été. © Bruno Osson, Gnis

Peu d’intérêt à l’utilisation  des outils d’aération

Par ailleurs, si les différents outils cités ci-dessus ont déjà fait leur preuve, l’intérêt des outils d’aération et de scarification des sols continue d’interroger. « C’est une problématique sur laquelle nous travaillons depuis plusieurs années, et dans plusieurs régions », prévient Patrice Pierre. Des dispositifs analytiques multiples ont été réalisés sur cette question de l’aération des prairies. Et il s’avère que cette méthode d’action présente généralement des conséquences sur la productivité des couverts. « Les rendements sont, au mieux, identiques, au pire, inférieurs. Nous n’avons donc pas vu d’effet positif au passage de ces outils », relève le chef de projet de l’Idele. L’aération des prairies n’apporte, à première vue, aucun bénéfice marquant susceptible de compenser le surcoût engendré par le passage de l’outil.
Alors que certains agriculteurs ont recours à l’entretien mécanique de façon systématique sur leurs prairies, il semblerait important de l’utiliser avec parcimonie. « Il ne faut pas systématiser ces actions d’entretien mécanique car certains outils peuvent avoir des effets néfastes sur la végétation. Il est important de comprendre d’abord les causes qui ont pu entraîner ces facteurs de dégradation afin d’agir en amont », conclut d’ailleurs Patrice Pierre. Un changement de pratiques peut alors être conseillé afin d’éviter que les problèmes ne persistent.

Amandine Priolet

 Le guide de l’entretien mécanique des prairies

Le guide de l’entretien mécanique des prairies

Pourquoi ? Comment ? Et pour quels bénéfices ? publié par l’association française pour la production fourragère (AFPF) est en téléchargement libre en cliquant ici