Cuma Compost 71
Valoriser le bois bocager

Alors que le bocage est vu comme une ressource de biomasse potentielle, la Cuma Compost 71 est un collectif d’agriculteurs qui se sont organisés pour exploiter le bois issu des exploitations. 

Valoriser le bois bocager
Chantier d’abattage avec le grappin coupeur de la Cuma Compost 71.

La Cuma Compost 71 est une Cuma départementale créée en 2002 pour le compostage des effluents. En 2016, elle s’est diversifiée dans une seconde activité d’abattage et de déchiquetage de bois en plaquettes. L’idée était de valoriser le bois issu des exploitations en litière pour les animaux ou en combustible pour le chauffage. La Cuma permet d’accéder collectivement à l’équipement nécessaire pour la récolte et la transformation du bois.
La Cuma Compost 71 possède un grappin coupeur, sorte de sécateur géant hydraulique, porté par le bras d’une pelleteuse. Propriétaire du grappin, la Cuma fait appel à un prestataire pour la pelle à chenilles. L’entreprise fournit également son chauffeur. Pour le déchiquetage du bois, la Cuma de Saône-et-Loire travaille aujourd’hui en inter-Cuma avec son homologue de l’Ain, la Cuma de Saint-André-sur-Vieux-Jonc. Cette dernière possède la déchiqueteuse et son tracteur avec chauffeur. Ensemble, les deux coopératives parviennent à réunir le volume annuel nécessaire pour rentabiliser une telle machine (près de 40.000 MAP - mètres cubes apparents plaquettes).

Des plaquettes pour la litière des animaux

Pour son activité bois, la Cuma Compost 71 compte une centaine d’adhérents. Elle réalise une trentaine de chantiers par an (abattage et déchiquetage) pour un total de près de 400 heures et 15.000 MAP, indique Camille Petit, animatrice de la Cuma.
Le premier motif d’adhésion est la litière des animaux. La dépendance à la paille des élevages de Saône-et-Loire et la flambée des cours poussent les éleveurs à rechercher des alternatives. Les plaquettes de bois sont un bon substitut à la paille dans les stabulations et elles peuvent être produites sur l’exploitation. L’usage des plaquettes pour le chauffage se développe aussi chez les adhérents : chauffage domestique, poulaillers, serres…. Certains se sont même mis à fournir des collectivités.

Activité saisonnière

L’activité est saisonnière avec des abattages de bois de septembre à mars, un déchiquetage dans la foulée pour un séchage estival et une utilisation des plaquettes l’hiver suivant. La saisonnalité tient notamment au fait que les agriculteurs sont soumis aux contraintes de la conditionnalité des aides Pac (BCAE). Les interventions sur les arbres ne sont tolérées que du 15 août au 15 mars pour préserver la nidification de la faune sauvage.
Les adhérents de la Cuma Compost 71 valorisent essentiellement des bois de ripisylves (bordures de cours d’eau) et de lisières de forêt. Les bois de haies sont encore rares, mais ils devraient monter en volume dans les années à venir. Certains agriculteurs font le choix de laisser pousser leurs haies en hauteur et réalisent un véritable plan de gestion en vue de fournir du bois durablement.

Des perches d’un bon diamètre

« Pour l’efficacité des chantiers et une bonne qualité de plaquettes, mieux vaut privilégier des perches d’un bon diamètre et pas trop de petites branches », indique Camille Petit. La vigilance s’impose pour les bois issus de haies et arbres bocagers. Pour une utilisation en chaudière, une sélection des arbres est recommandée ou alors, il faut prévoir un « recriblage » des plaquettes à l’issue du broyage.
Pour la qualité des plaquettes, il faut être attentif à la quantité de « fines » (sciure poussiéreuse qui accompagne les plaquettes), car elles ont tendance à encrasser les chaudières. Il faut aussi éviter les corps étrangers : ferraille, cailloux… qui risquent d’abîmer les couteaux de la déchiqueteuse, complète l’animatrice.

Abattage rapide et en toute sécurité

Pour l’abattage, le grappin coupeur est porté par une pelle à chenilles de 28 tonnes que l’entrepreneur transporte sur le chantier sur une semi-remorque porte-char de 3 m de largeur. Cela suppose de bien prévoir l’accès à la parcelle, fait remarquer Camille Petit. L’engin coupe les arbres à une hauteur de 50 cm à 1 m du sol. Il peut sectionner des troncs jusqu’à 45 cm de diamètre pour les bois durs et 50 cm pour les bois tendres.
En comparaison de l’utilisation de tronçonneuses, le recours au grappin coupeur sécurise les chantiers d’abattage, souligne l’animatrice. Et la machine génère un gain de temps considérable, d’autant qu’elle libère l’agriculteur de ce travail risqué et pénible.

« Développer le bois énergie en circuit court » 

Malgré les vertus du bois bocager, l’activité bois de la Cuma Compost 71 peine encore à se développer. La réglementation liée aux aides Pac, qui restreint la période d’intervention sur les arbres, pénalise l’usage du grappin coupeur. Et le déchiquetage souffre aussi d’une grosse concurrence sur le marché. « En tant que Cuma, nous n’avons pas les meilleurs chantiers et les prestataires pratiquent des tarifs très concurrentiels que nous ne pouvons pas suivre », reconnaît Thierry Lacroix, président de la Cuma Compost 71. L’évolution est pourtant plutôt bonne pour l’activité déchiquetage et la compétitivité du bois plaquette demeure. « Les chantiers sont mieux organisés avec moins de déplacements et des volumes plus importants. Le prix de la paille n’a pas bougé et trois mètres cubes de plaquettes suffisent pour remplacer une tonne de paille », assure Thierry Lacroix qui signale aussi les heures de tracteurs en moins et le carburant économisé lorsqu’on ne paille pas. « Les plaquettes bocagères vont redémarrer un jour ou l’autre », se dit également convaincu le président. Le manque de main-d’œuvre sur des exploitations qui s’agrandissent et qu’il faut entretenir va dans ce sens. « Et nous croyons beaucoup au développement de filières plaquettes bois énergie en circuit court. Nous sommes partenaire du projet collectif de Vendenesse-sur-Arroux. La commune possède une chaufferie à bois plaquettes et, avec un agriculteur qui a du bois à proposer, nous allons faire un essai pour approvisionner la chaudière communale pendant un an », conclut Thierry Lacroix.

Marc Labille 

Les plaquettes de bois aussi efficaces  que la paille en litière
Mises en tas à l’abri, les plaquettes sèchent naturellement pendant au moins quatre mois.

Les plaquettes de bois aussi efficaces que la paille en litière

Drainantes, les plaquettes de bois ont un pouvoir absorbant aussi efficace que la paille. Quatre mètres cubes de bois déchiqueté secs équivalent à une tonne de paille en termes d’efficacité. L’idéal est d’utiliser un mixte des deux matériaux. Les plaquettes de bois sont le plus souvent utilisées en complément de la paille. La méthode la plus courante est d’installer une sous-couche de 6 à 8 cm de plaquettes sèches avant l’entrée des animaux. Puis une nouvelle couche de plaquette est étendue lorsque les animaux se salissent à nouveau (après 15 jours à 3 semaines selon les cas). Faute de quantité suffisante de plaquettes, la paille peut prendre le relais. Une autre technique consiste à alterner couches de bois et couches de paille à la manière d’une mille-feuille durant l’hiver. L’intérêt économique des plaquettes de bois en litière dépend du prix de la paille. Sachant que les plaquettes reviennent à 60-80 € en équivalent tonne de paille.

Marc Labille