Tournesol ou soja en dérobé, une opportunité qu’il faut anticiper
Malgré l’augmentation des charges, l’intérêt économique du tournesol ou du soja en culture dérobée est inédite. Pour autant, la mise en œuvre d’une culture en dérobé n’est pas si simple. Les recommandations de Terres Inovia.

Une culture difficile
Tournesol. Un tournesol tous les trois ans, c’est la fréquence de retour conseillée du tournesol dans la rotation. Il est donc recommandé de rester prudent dans les rotations intégrant fréquemment du tournesol en culture principale. De plus, et bien que règlementairement autorisée, la succession tournesol-tournesol reste déconseillée au regard du risque sanitaire qu’elle représente (mildiou notamment).
Tournesol et soja. L’irrigation est indispensable. En conduite pluviale, la réussite du tournesol est beaucoup trop incertaine. Pour le soja en dérobé, les besoins en eau d’irrigation du soja débutent dès le semis. Le précédent doit libérer la parcelle tôt, le tournesol dérobé n’étant envisageable qu’après une culture d’hiver récoltée tôt : un pois d’hiver précoce, une orge d’hiver (escourgeon) précoce, un ail voire un blé dur précoce en zone méditerranéenne, ou une culture spécifique comme un colza semence fauché et andainé. Cette seconde culture est envisageable à condition que la structure du sol soit correcte car il faudra le travailler à minima afin de conserver l’eau résiduelle.
Anticiper les préparatifs
Mettre en place une culture en dérobé permettant de cultiver trois cultures en deux ans relève d’une stratégie d’opportunité. Sa réussite passe d’abord par la commande anticipée des semences, de précocité adaptée et suffisamment tôt pour semer rapidement à la récolte du précédent. éventuellement, il est envisageable de récolter le précédent légèrement plus précocement avant une ventilation séchante voire un séchage de la récolte (cas d’une orge).
Pour le tournesol. Le semis devra être réalisé (de préférence avec une variété très précoce) au cours des deux dernières décades de juin et au plus tard le 5 juillet : avec une variété précoce, le semis peut être réalisé jusqu’au 25 juin, et il reste possible jusqu’au 1er juillet ; avec une variété très précoce, le semis peut être réalisé jusqu’au 1er juillet, et demeure possible jusqu’au 5 juillet.
Pour le soja. Semer le plus tôt possible avec une variété de groupe 0 (avant le 5 juillet), 00 ou 000 (avant le 10 juillet). Un jour de gagné au semis, c’est quatre jours de gagné à la récolte. Les variétés de groupe I sont déconseillées. Adaptez la densité pour viser un objectif de peuplement de 450 000 plantes pour un groupe 0, de 500 000 et 550 000 pour un groupe 00 et 000.
Récolter avant mi-octobre
Les conditions météorologiques de l’année et le choix de la précocité vont conditionner la date de récolte. Pour le tournesol, il est possible de récolter à partir de 18 % d’humidité car les derniers points d’humidité sont très longs, voire impossibles à gagner et la qualité de la graine commence à se dégrader (augmentation de l’acidité). Le séchage de la récolte pourra être nécessaire et occasionnera un coût qu’il faut prendre en compte dès le semis.
Hypothèses retenues pour une situation en sol intermédiaire
Marges brutes et charges pour le tournesol et le soja en dérobé en 2022
Claire Martin-Monjaret et Vincent Lecomte, Terres Inovia
Conseils pratiques pour le tournesol dérobé
Préparer son sol. La levée doit être sécurisée par un sol suffisamment humide ou un minimum de pluviométrie dans les trois jours suivant le semis ou assurée par une irrigation (15 à 20 mm). En cas de précédent orge, l’idéal est de pouvoir réaliser un semis avec un semoir équipé d’un chasse-paille rotatif. Une fissuration sur la ligne peut être envisagée. Dans tous les cas, limiter au maximum le nombre de passages.
Semer au plus vite. Semez le plus rapidement possible après la récolte du précédent à 70 000 graines/ha. Un jour gagné en date de semis correspond à quatre jours gagnés à la récolte, et une densité levée suffisante permet une maturation plus rapide des capitules.
Désherber selon le précédent.
Précédent colza. Désherbage de prélevée incontournable avec programme à base de Racer ME 2 à 3 l/ha. Les repousses de colza non contrôlées empêchent le développement du tournesol.
Précédent pois. Le binage reste la meilleure des solutions pour contrôler les repousses.
Si une application de Nirvana a été effectuée sur pois, ne pas réaliser de tournesol dérobé.
Précédent orge. Le désherbage des repousses est incontournable en rattrapage ou en prélevée.
Fertiliser au cas par cas.
Bore. Un apport en végétation est conseillé car le risque de carence est accru (coups de chaud avant floraison).
Azote. L’apport est inutile derrière le pois et le colza. Si l’orge a obtenu un rendement correct, il faudra prévoir un apport d’azote de l’ordre de quarante unités en végétation avant un tour d’eau ou une pluie annoncée.
Irriguer est indispensable. Un premier tour d’eau avant la floraison est souvent nécessaire.
Récolter le plus tôt possible. Dans de bonnes conditions (sol bien ressuyé), sans attendre.
Conseils pratiques pour le Soja dérobé
Sans irrigation, pas de soja dérobé. Les besoins en eau d’irrigation débutent dès le semis (15 mm en sol limoneux, 20 mm en sol argileux) pour sécuriser la levée et le peuplement. Il est à renouveler en fonction des conditions météorologiques. Une fois implanté, l’irrigation accompagnera le développement de la culture, avec des tours d’eau de 30-40 mm tous les huit à dix jours, et devra être maintenue jusqu’à fin septembre pour assurer le bon remplissage des gousses. Ces apports seront modulés en fonction des précipitations et d’un éventuel outil d’aide à la décision.
Pour un objectif de rendement de 28-30 q/ha. En sol superficiel, compter un volume total de 200-250 mm en sept à huit tours d’eau ; en sol profond, compter un volume total de 100-150 mm en trois à quatre tours d’eau.
Soigner la gestion des adventices pour limiter la concurrence. Moins haut et moins ramifié qu’en culture principale, le soja mené en dérobé est moins concurrentiel des adventices. Privilégier un désherbage de post-levée (type Pulsar 40, Davai, Basagran SG, Corum ou divers antigraminées foliaires si besoin) à pleine dose ou en fractionnement en fonction de la flore et de la spécialité commerciale choisie. éviter les heures chaudes de la journée et les hygrométries trop faibles. Côté désherbage mécanique, les plages d’intervention doivent être décidées de manière à épargner le soja et à maximiser les chances de destruction des mauvaises herbes. Prévoir le binage (sans protège plants) à partir du stade première feuille trifoliée.