Les promesses doivent maintenant se transformer en actes
Après les mobilisations en région des 9 et 25 mars, les syndicats FRSEA et Jeunes agriculteurs Auvergne-Rhône-Alpes ont organisé lundi 12 avril une conférence de presse sur les suites de leur mouvement. Le message est inchangé : un revenu décent pour les générations présentes et futures ! À la veille d’une proposition de loi censée renforcer la loi Egalim et d’une présentation du plan stratégique national pour la future Pac, les organisations syndicales restent « sur le pied de guerre » et n’hésiteront pas si nécessaire à se faire entendre de nouveau, ont-elles confirmé.

Après les feux de détresse allumés le 9 mars et une manifestation régionale d’ampleur à Lyon et Clermont-Ferrand le 25, les organisations professionnelles agricoles FRSEA et Jeunes agriculteurs Auvergne-Rhône-Alpes restent déterminées. L’objectif : obtenir ce qu’ils réclament depuis « trop longtemps » : « un revenu décent, qui passera par le prix et une Pac à la hauteur de l’enjeu », déclarait le 12 avril Michel Joux, en ouverture d’une conférence de presse en visioconférence. Entouré de son secrétaire général, David Chauve, et des président et secrétaire général du syndicat JA Aura, Pierre Picard et Jordan Magnet, le président de la FRSEA Aura a insisté sur le « besoin d’État » pour faire appliquer la loi Egalim, « qui va dans le bon sens » mais qui n’est pas assez coercitive pour enfin « rétablir l’équilibre de valeur ajoutée, du producteur au consommateur ». Un discours répété depuis plusieurs mois déjà, qui se trouve aujourd’hui au cœur d’une autre actualité, celle de la réforme d’une politique agricole commune (Pac), qui fait craindre aux producteurs « des turbulences pour les filières d’élevage, particulièrement en filière allaitante déjà très fragile », a ajouté David Chauve.
Un enjeu de taille : le prix !
Le premier des enjeux reste celui du prix, sans quoi rien n’est possible pour l’agriculture, ni pour les générations en place, ni pour celles qui prendront le relai. Un message largement appuyé par le syndicat JA, puisque 46 % des agriculteurs s’apprêtent à partir à la retraite dans les années proches. « Sans visibilité sur le prix, ça va être compliqué », s’est interrogé, Jordan Magnet. « Si les règles issues de la loi Egalim étaient appliquées, on pourrait se rendre compte que le manque à gagner atteint aujourd’hui 27 000 euros en filière viande, 30 000 euros en production de lait de plaine et près de 70 000 euros en lait de montagne », ont même avancé les syndicalistes jeunes. Les agriculteurs ont besoin de transparence sur les prix et de visibilité pour l’avenir, ont-ils tous répété lors de la conférence de presse.
Une proposition de loi à venir
Après l’action syndicale massive à Lyon et Clermont-Ferrand le 25 mars, des représentants FRSEA et JA Aura ont été reçus par le ministre de l’Agriculture le 31 mars. Une proposition de loi modifiant et renforçant la loi Egalim devrait être présentée autour du 15 avril, a rapporté Michel Joux, qui attend beaucoup de l’autorité de l’État pour la faire appliquer. Quant à la future Pac, les orientations du plan stratégique national sont annoncées à partir de la mi-avril. Cependant, tant FRSEA que JA Aura ont confirmé le 12 avril « rester sur le pied de guerre » et être prêts à agir de nouveau si jamais les réponses apportées par le gouvernement devaient ne pas donner satisfaction. Car derrière les attentes immédiates et le besoin de retrouver de la rentabilité, les syndicalistes se sont également montrés très inquiets quant à l’avenir du modèle agricole familial porté par la profession, qui pourrait être remis en cause par une Pac qui favorise les hectares au détriment des femmes et des hommes. « L’enjeu est bien celui de la souveraineté alimentaire. Pourtant on est en train de fragiliser les moyens de production », a alerté David Chauve. « Pour avoir une souveraineté alimentaire, il nous faut des agriculteurs, jeunes et anciens, une visibilité et des revenus », a conclu Pierre Picard.
Sébastien Duperay
BRAV : Une tribune sur l’avenir de l’élevage bovin viande
Le Berceau des races à viande du Massif central (Brav) faisait partie des organisations syndicales à appeler à manifester le 25 mars dernier à Clermont-Ferrand et Lyon. Inquiet pour la production allaitante, le Brav a publié une tribune le 9 avril « Quel est le projet de la France pour son élevage bovin viande ? » L'aide couplée animale distribuée à l'UGB, envisagée par le ministère de l'Agriculture pour la prochaine Pac, « ne peut pas être, comme l’affirment plusieurs élus de la majorité, une manière d’encourager l’engraissement », affirme le Brav dans cette tribune. Dans le cadre du PSN (déclinaison française de la future Pac), le ministère étudie parmi d'autres scénarios une fusion des enveloppes des aides couplées allaitantes et laitières, ainsi qu'une transformation de ces aides versées à la vache en une aide versée à l'UGB. « Ce sont les élevages dits naisseurs-engraisseurs qui seront les plus pénalisés, avec des baisses d’environ 40 % de leurs aides couplées », a calculé le Brav, se basant sur les données du ministère. « Certains annoncent vouloir faire de cette nouvelle "aide à l’UGB bovine" un levier pour réduire nos exportations de broutards vers l’Italie », poursuit le Berceau. Or, rétorquent les éleveurs, « nous engraissons déjà 600 000 jeunes bovins en France, dont la moitié part à l’export, faute de débouchés ». Les consommateurs français privilégient, en effet, les « viandes issues de la voie femelle ». Bref, selon le Brav, « derrière cette nouvelle "aide couplée à l’UGB", il n’y a pas de cohérence, pas de projet ».