ÉCONOMIE
Gestion de l’eau : peu de leviers pour contenir sa consommation

En élevage laitier, le seul poste sur lequel on peut jouer pour faire des économies d’eau est le bloc de traite avec la récupération des dernières eaux de rinçage et la chasse aux fuites.

Gestion de l’eau : peu de leviers pour contenir sa consommation
Le lavage intérieur de la machine à traire et des quais représente, suivant la taille de l’installation, environ 50 à 100 litres par cycle, sachant qu’il y a six cycles par jour. © Archives AD

La production laitière est une grande consommatrice d’eau. L’abreuvement des animaux représente 75 % de la consommation d’eau d’un élevage laitier, selon l’Idele. Une vache laitière boit 125 litres d’eau par jour. Il faut en moyenne 6,85 litres d’eau pour produire un litre de lait qui, lui, comprend 87 % d’eau. Pour un élevage français moyen, cela équivaut à 3 000 m3 par an. À la seule lecture de ces chiffres, on comprend bien qu’il est difficile pour un éleveur de contenir sa consommation d’eau. 

Intervenir sur le bloc de traite

La seule part sur laquelle il peut intervenir, c’est celle consacrée au bloc de traite. Le lavage intérieur de la machine à traire et des quais représente, suivant la taille de l’installation, environ 50 à 100 litres par cycle, sachant qu’il y a six cycles par jour. « Les filières de fromages au lait cru recommandent moins de lavages afin de préserver la microflore du lait », précise Laurent Courtot, responsable du pôle productions laitière et fromagère du Service élevage sur l’Ain et la Saône-et-Loire. « Certaines AOP préconisent même un seul lavage avec un produit par jour, le reste s’effectuant à l’eau. Cela demande toutefois des précautions et une grande vigilance. »
Pour ce spécialiste de l’élevage, on peut espérer aussi faire quelques économies au niveau du nettoyage de la salle de traite. Grâce à l’installation d’un bac intermédiaire, on peut récupérer la dernière eau de rinçage de la machine à traire, ce qui représente de 100 à 200 litres par jour pour nettoyer les quais. On peut également équiper les tuyaux de réducteurs pour limiter le débit de l’eau. Enfin, dernier levier que l’on peut actionner, celui de la maintenance du réseau pour réduire voire éliminer les fuites. Il est possible d’installer des compteurs pour contrôler précisément sa consommation.

Eau hors réseau

L’approvisionnement hors réseau peut représenter une solution pour alléger ses factures et subvenir à ses besoins. Quelle que soit l’origine (puits, forage, source ou collecte des eaux de toits) et quel que soit l’usage, l’éleveur devra procéder à diverses analyses régulières (bactériologiques, physico-chimiques). Suivant l’usage, surtout pour l’abreuvement, il devra peut-être même s’équiper d’un système de traitement. « En zone de fabrication de fromages au lait cru comme le comté, cette question est au cœur des préoccupations, car le lien entre qualité de l’eau et problème sanitaire du lait est avéré. D’ailleurs dans le prochain cahier des charges de fabrication du comté, il sera demandé qu’il y ait des analyses annuelles de l’eau, réseau compris, indique Laurent Courtot. Sur l’Ain, depuis deux ans, la moitié des éleveurs en Comté a procédé à des analyses qui font ressortir que 75 % des eaux hors réseaux sont non conformes, et 10 à 15 % de celles du réseau posent un problème. Face à ces résultats très inquiétants, certaines coopératives ont décidé d’installer chez tous ses éleveurs un système de traitement d’eau. »

Magdeleine Barralon
 

De l’eau de pluie  pour abreuver  les animaux
Les deux citernes enterrées d’une contenance de 135 m3 chacune collectent l’eau de trois bâtiments, soit une surface de 3 000 m2 de surface de toiture. (© Ferme de Jalogny)
Expérimentation

De l’eau de pluie  pour abreuver  les animaux

Située en Saône et Loire, près de Cluny, la ferme expérimentale de Jalogny Ferm’inov élève une centaine de vaches allaitantes de race charolaise et cinquante bovins d’engraissement. Au cours de l’été 2022, la ferme s’est dotée de citernes de récupération d’eau de pluie destinée à l’abreuvement des animaux pendant la période hivernale. Les deux citernes enterrées d’une contenance de 135 m3 chacune, collectent l’eau de trois bâtiments, soit une surface de 3 000 m2 de toiture. Le dimensionnement des cuves a été pensé pour offrir une autonomie d’un mois. « En février dernier, mois très sec, on a pu démontrer que notre installation permettait de subvenir à nos besoins en eau », indique Adrien Demarbaix, responsable exploitation et projets recherche et développement à la Ferme de Jalogny Ferm’inov. « L’eau n’est pas traitée lors du stockage, tout se fait avant l’abreuvement grâce à un filtre à liparite (argile micronisée) qui s’autonettoie quotidiennement. Ensuite, on a un traitement bactériologique au dioxyde de chlore qui permet de potabiliser l’eau. Les interrogations portent aujourd’hui sur le dosage du chlore, poursuit-il. Le coût est très élevé, un euro le mètre cube, je compte sur l’expérience pour doser au plus juste. On se questionne aussi à propos de la minéralisation parce que l’on n’a pas encore assez de recul. »