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Agriculture durable

HVE : le nombre d’exploitations certifiées explose

La certification haute valeur environnementale (HVE) a le vent en poupe. Afin de faire face aux demandes des exploitants désireux de s’engager dans ce modèle, la chambre d’agriculture propose un accompagnement spécifique.

HVE : le nombre d’exploitations certifiées explose
Les trois associés du Gaec du Colombier - Cyril Hugues, son frère Samuel et son beau-frère Jérôme Gierth - ont opté pour la HVE il y a un an et demi. Pour réaliser les démarches, ils ont été accompagnés par la chambre d’agriculture de la Drôme.

En annonçant début septembre un crédit d’impôt de 70 à 80 millions d’euros dédié à la Haute valeur environnementale (HVE), le ministre de l’Agriculture confirme le signal donné par les pouvoirs publics depuis quelques années en faveur de cette certification, que d’aucuns qualifient de troisième voie entre bio et conventionnel. Longtemps esseulée depuis sa création en 2011, la HVE a finalement été mise en avant, fin 2018, dans la loi Egalim, par son intégration aux critères permettant d’atteindre l’objectif d’approvisionnement durable à 50 % des cantines d’ici 2022.

Il n’en reste pas moins que la HVE est aujourd’hui très diversement adoptée et étudiée selon les filières. D’après les derniers chiffres du ministère de l’Agriculture de février, la viticulture reste la plus représentée, avec plus de 4 500 exploitations sur 5 400 (83 %). « Dans la Drôme, on estime leur nombre entre 150 et 200 dont plus de 100 dossiers en viticulture, indique Isabelle Méjean, conseillère à la chambre d’agriculture de la Drôme. Cette année, les certifications explosent. En ce qui nous concerne, nous avons accompagné 90 dossiers. C’est beaucoup plus qu’en 2019. » Il reste toutefois encore de la marge avant d’atteindre les objectifs ambitieux fixés par l’Etat dans son plan « biodiversité » : 15 000 exploitations certifiées HVE en 2022 et 50 000 en 2030.

Une certification, deux voies d’accès

Pour décrocher une certification HVE, deux voies s’offrent aux agriculteurs : une option A appelée « approche thématique », et une option B appelée « approche globale ».

L’option A consiste à valider quatre indicateurs eux-mêmes composites correspondant aux thématiques suivantes : « biodiversité ; stratégie phytosanitaire ; gestion de la fertilisation ; gestion de l’irrigation ». Une thématique est validée lorsque la note globale est supérieure ou égale à 10 points. La thématique « biodiversité » est composée de six items, auxquels sont attribués des points, comme le pourcentage de la SAU en infrastructures agroécologiques, ou la présence de ruches.

L’option « B » est moins complexe ; elle consiste à respecter deux indicateurs : d’une part le « poids des intrants dans le chiffre d’affaires inférieur ou égal à 30 % », et d’autre part le « pourcentage de la SAU en infrastructures agroécologiques supérieur ou égal à 10 % ou pourcentage de la SAU en prairies permanentes de plus de cinq ans supérieur ou égal à 50 % ».

« C’est l’option A qui est principalement choisie car elle permet de mettre en avant les efforts déjà réalisés », indique Isabelle Méjean. Sur les côtes-du-rhône, on dénombre 4 dossiers en voie B contre 361 en voie A. »

Un accompagnement collectif et individuel

Pour entrer dans la démarche HVE, la chambre d’agriculture de la Drôme propose un accompagnement, quelles que soient les filières. « Régulièrement, nous proposons une journée de formation en collectif, prise en charge par Vivea, indique Isabelle Méjean. Y sont présentés l’ensemble de la démarche HVE, ses intérêts. Puis, nous aidons les participants à remplir leur autodiagnostic et faisons en même temps un rappel sur la réglementation. On termine en détaillant le niveau 3, le seul qui permet d’obtenir la certification HVE. »

Après cette journée de formation, la chambre d’agriculture intervient en prestation individuelle, sur l’exploitation. C’est à ce moment-là qu’est remplit le fichier d’audit du niveau 3. « Le fichier comporte quatre onglets, explique la conseillère. Le premier a pour but de vérifier les éléments favorisant la biodiversité (longueur des haies, des lisières de bois, présence de bandes tampon…), la présence d’au moins 10 % d’infrastructures agroécologiques (IAE)… Le second est relatif à la stratégie phytosanitaire (présence de surface(s) non traitée(s), d’alternative(s) à l’utilisation des phytos, réduction des IFT*, présence d’aire de lavage des pulvérisateurs, diversité clonale et variétale pour les résistances aux maladies)… Les deux derniers onglets concernent les stratégies de fertilisation azotée (avec la réalisation d’un bilan azoté) et d’irrigation (utilisation de moyens économes en eau comme le goutte-à-goutte, les micro-jets, de variétés résistantes à la sécheresse…). Chaque onglet se mesure sur dix points et, pour être HVE, il faut obtenir quatre fois dix points. » A noter, deux voies de certification sont possibles : en collectif (par exemple, en viticulture avec la cave Jaillance ou avec le syndicat général des côtes-du-rhône) ou en individuel. « La voie collective a l’avantage d’être moins onéreuse et de faire baisser la pression de contrôle », précise Isabelle Méjean.

* IFT : indice de fréquence des traitements.

Une certification « sans difficulté majeure »

Une certification « sans difficulté majeure »
Les trois associés du Gaec du Colombier - Cyril Hugues, son frère Samuel et son beau-frère Jérôme Gierth - ont opté pour la HVE il y a un an et demi. Pour réaliser les démarches, ils ont été accompagnés par la chambre d’agriculture de la Drôme.

Au sein du Gaec du Colombier, Cyril Hugues, son frère Samuel et son beau-frère Jérôme Gierth exploitent 40 ha de vigne, 120 de lavande, lavandin et thym, 70 de semences (maïs et tournesol) et céréales (blé dur et blé tendre). S’ajoutent 17 ha d’arboriculture et de maraîchage avec des productions toutes vendues en direct. Les surfaces sont réparties sur trois sites : Charols, Salettes, Savasse. La certification HVE, « on a commencé à s’y intéresser début 2019 et pour deux raisons, raconte Cyril Hugues. La première est liée à la cave coopérative de Saint-Pantaléon (vignerons de Valléon), en recherche de raisins issus d’exploitations HVE 3. Ensuite, on s’est dit que pour notre activité de vente directe, cette certification pouvait rassurer nos clients et en attirer de nouveaux. »

Une formation pour vérifier si c’était jouable

Parmi les trois associés du Gaec, Cyril Hugues a suivi à l’automne 2019 la formation proposée par la chambre d’agriculture de la Drôme. « Cela a permis de voir le cahier des charges de la HVE et de vérifier si c’était jouable pour notre Gaec », dit-il. Rassurés, les exploitants décident alors de poursuivre la démarche avec pour objectif d’obtenir la certification (par la voie A) avant les vendanges 2020. Après la formation, l’accompagnement de la chambre d’agriculture s’est poursuivi avec une journée technique pour, notamment, effectuer l’autodiagnostic (fichier d’audit). « Nous avons passé en revue nos pratiques favorisant la biodiversité, vérifié la compatibilité de nos IFT avec le cahier des charges, regardé de près nos pratiques en matière de fertilisation et d’irrigation. » Ayant adopté un mode de production raisonné, le Gaec a franchi les étapes sans difficulté majeure. « C’était tout de même ardu de passer en revue toutes les productions, confie Cyril Hugues. Mais le travail a été amplement facilité grâce au logiciel “Mes parcelles” avec lequel nous enregistrons toutes nos pratiques. »

« Un bon moyen pour se mettre à niveau »

Bien que la Covid-19 ait retardé la démarche, la certification a pu avoir lieu à temps. « Comme tout était bien enregistré, une demi-journée a suffi à Certipaq pour faire le tour de l’exploitation », se souvient Cyril Hugues. L’exploitation est donc entièrement certifiée HVE depuis quelques mois.

« Faire le diagnostic a un coût mais c’est un bon moyen pour se mettre à niveau, fait-il remarquer. Mais dans beaucoup de cas, les pratiques actuelles des exploitants sont compatibles avec la HVE. Quand on voit à quel point la profession agricole est attaquée, cette certification est un moyen d’argumenter auprès des consommateurs. Et puis, la HVE pourrait bien devenir une norme obligatoire de la prochaine Pac », pressent-il.