Syndicalisme
Congrès FDSEA : l’irrigation, fer de lance en 2023

Après une année 2022 chargée, la FDSEA de la Drôme a affiché ses ambitions lors de son 77e congrès. L’enjeu de l’eau sera l’une des priorités.

Congrès FDSEA : l’irrigation, fer de lance en 2023
À la tribune du 77e congrès de la FDSEA de la Drôme qui s’est tenu le 10 mars à Valence dans les locaux du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes, Alexandre Moulin (vice-président), Brice Maret (secrétaire général adjoint), Jérôme Volle (vice-président de la FNSEA), Sandrine Roussin (présidente de la FDSEA de la Drôme), Serge Guier (secrétaire général) et Michel Joux (président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes). © AD-CL

En ouvrant le 77e congrès de la FDSEA de la Drôme le 10 mars à Valence, Sandrine Roussin, présidente, a confié : « L’année 2022 a été chargée en actions et émotions ». À la présentation du rapport d’activité, chacun a, en effet, pu mesurer l’intensité du travail accompli par la FDSEA et ses partenaires mois après mois. En interne, l’année étant élective, la fédération a renouvelé son conseil d’administration pour les trois prochaines années. Sur la cinquantaine de membres que compte cette instance, « nous avons un taux de renouvellement de 21 % », a précisé Sandrine Roussin. Usant de la métaphore, « le bateau amarré prend le large aujourd’hui pour une croisière de trois années ; le combat syndical sera notre quotidien et le gouvernail du navire. Il nous transportera vers de nouvelles aventures que l’on espère victorieuses même si parfois on le sait, le combat sera long, dur et compliqué ».

Faciliter la création de réserves d’eau

Dans son rapport moral, Sandrine Roussin a mis l’accent sur la dégradation des conditions de travail et de revenus des agriculteurs, les amenant « à trouver des solutions non pas pour vivre, mais pour beaucoup survivre ». En cause, « la sécheresse, les restrictions d’eau, les accusations injustes condamnant toujours le monde agricole, l’explosion des charges, le loup... et des revenus qui ne sont pas là ». Au cours de l’année écoulée, « la FDSEA a maintes fois alerté les pouvoirs publics et les élus », a souligné Sandrine Roussin. En particulier pour dénoncer des restrictions d’irrigation « mettant en péril les cultures » ainsi que « l’exclusion de notre département de la reconnaissance anticipée de la sécheresse ». Sur ce dernier point, malgré le « lourd travail » engagé avec la chambre d’agriculture et la fédération départementale ovine (FDO), le Vercors n’a pas obtenu la reconnaissance des pertes fourragères. « Aujourd’hui, la question du recours administratif se pose, a prévenu Sandrine Roussin. La décapitalisation des troupeaux n’est plus seulement un risque mais bien la réalité d’une situation extrêmement grave. »
Quant au manque d’eau, « on ne peut pas contraindre les agriculteurs à revivre la peur au ventre avec la menace des restrictions remettant en cause leur travail, a-t-elle insisté. La FDSEA fait de ce dossier son fer de lance 2023 pour donner à l’agriculture toutes ses chances de produire. » Il est demandé à l’État de faciliter la création de réserves d’eau collinaires, collectives et individuelles.

Loup, main-d’œuvre, retraite

« Tout comme le lion est le roi de la jungle, le loup est le roi de nos campagnes amenuisant les forces de nos éleveurs, a déclaré la présidente de la FDSEA, affichant son pessimisme sur le prochain plan loup 2024-2027. Une seule solution efficace existe : que l’État accepte la régulation et sorte du cadre réglementaire si l’on ne veut pas assister à l’extinction de la filière ovine. »
D’autres problématiques ont été évoquées : la pénurie de main-d’œuvre et de logements pour les saisonniers et les solutions déployées par la FDSEA (acheminement de salariés marocains et tunisiens, Agri’Emploi, projet de création d’un groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification). Par ailleurs, Sandrine Roussin a salué l’adoption de la loi visant à calculer la retraite des non-salariés agricoles sur les vingt-cinq meilleures années de carrière : « C’est une véritable avancée sociale qui confortera les revenus de nos aînés ».
Christophe Ledoux

Ils ont dit

« Les organisations professionnelles agricoles ne sont pas des empêcheurs de tourner en rond mais des alliés pour relever les défis de l’agriculture et nourrir les réflexions », a considéré Jean-Pierre Gaillard, président du Crédit Agricole Sud Rhône Alpes.

« Pour installer, il faut préparer le terrain pour avoir des exploitations viables, vivables et transmissibles, a dit Yvan Jarnias, président des Jeunes Agriculteurs de la Drôme. Avec le loup, c’est dur d’avoir l’envie de reprendre un élevage. C’est pareil en viticulture avec la crise actuelle. »

« Ceux qui souffrent le plus de la sécheresse, ce sont les agriculteurs, a fait remarquer Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d’agriculture de la Drôme. Beaucoup d’efforts ont été faits pour s’adapter au changement climatique et cela continuera avec l’aide des fermes expérimentales, des outils de la recherche… » Au sujet de la prédation, « on ne s’en sortira que si le nombre de loups diminue d’au moins 50 %. » Quant au renouvellement des générations, « c’est une priorité pour la chambre d’agriculture. La diversité agricole de la Drôme est un atout pour installer. »

« Face à l’insuffisante reconnaissance de l’agriculture, nous attendons des élus politiques qu’ils adoptent une posture claire, affirmant que l’agriculture française est la meilleure du monde », a souligné Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes. Concernant le projet de loi d’orientation et d’avenir agricole : « Ce sera soit un coup d’épée dans l’eau, soit, comme dans les années 1960, une grande loi permettant de mieux rémunérer les agriculteurs et de mieux installer ».

« L’agriculture mérite de la part des élus un accompagnement sans faille, a insisté Claude Aurias, conseiller régional. La Région Auvergne-Rhône-Alpes a fait des économies drastiques pour mettre l’argent public au bon endroit. Dix plans de filières ont été adoptés pour un montant de 113 millions d’euros en 2023, soit trois fois plus en six ans. La Région soutient aussi fortement les lieutenants de louveterie. »

« Il ne faut jamais oublier que les agriculteurs sont les garants de la souveraineté alimentaire, a dit Marie-Pierre Mouton, présidente du conseil départemental de la Drôme. Il faut arrêter de stigmatiser les agriculteurs vis-à-vis de l’eau et il est essentiel que les efforts soient partagés et compris entre les différents usagers. Sur la prédation, « la détresse des éleveurs est réelle, il faut prélever davantage de loups ». Évoquant les pressions réglementaires, « il faut lâcher la bride et laisser davantage de marges de manœuvre aux agriculteurs ».

« Avec plus de 60 millions d’euros (M€) de crédits de la politique agricole commune (Pac) versés en 2022 et 700 agriculteurs présents aux réunions d’informations sur la nouvelle mouture, les services de l’État sont très mobilisés », a assuré Marie Argouarc’h, secrétaire générale de la préfecture de la Drôme. Sur la prédation, « les délais d’indemnisation sont courts ». Par ailleurs, « l’eau n’est plus un bien inépuisable, a-t-elle fait remarquer. À la suite de la sécheresse de 2022, la préfète a engagé un retour d’expériences avec tous les usagers afin de préparer les restrictions à court terme et identifier structurellement la meilleure répartition de l’eau sur les territoires. » Marie Argouarc’h a également évoqué les calamités (gel et sécheresse 2022), l’assurance récolte (réunion prévue le 21 avril pour faire le point sur la couverture assurantielle), le plan de souveraineté fruits et légumes (200 M€), le fonds d’urgence pour les agriculteurs bio (10 M€), la réactivation du dispositif des « sentinelles » pour prévenir le mal-être des agriculteurs ainsi que le projet de loi d’orientation et d’avenir agricole avec une réunion prévue le 30 mars au lycée du Valentin.

C. L.

« Des métiers porteurs d’avenir »  
©AD_CL

« Des métiers porteurs d’avenir »  

« Depuis dix ans, une avalanche de contraintes rebute les jeunes générations à s’installer, constate Jérôme Volle, vice-président de la FNSEA. Pourtant, l’agriculture plaît, preuve en est avec les 615 000 visiteurs du Salon de l’agriculture. Profitons de cet élan pour faire reconnaître que nos métiers sont porteurs d’avenir », a-t-il ajouté. Dans son intervention, il a mis en avant plusieurs victoires : l’amélioration des retraites agricoles, le maintien de l’allègement des charges sociales des emplois saisonniers (TO-DE), la nouvelle assurance-récolte, jugeant toutefois le dispositif « perfectible ». Évoquant le projet de loi immigration, Jérôme Volle a regretté que l’agriculture ne soit pas reconnue comme secteur en tension sur la main-d’œuvre. Il a par ailleurs dénoncé la suppression de matières actives phytosanitaires en l’absence de solutions alternatives. Concernant le stockage d’eau, il a appelé les élus à faire preuve de courage. Et sur les transitions à mener en agriculture, il propose à tous, notamment les élus, d’adopter « un schéma de construction et non d’opposition ».  
C. Ledoux