Chambre d’agriculture
« Il faut arrêter la décroissance de l’agriculture »

Réunis en session, les élus de la chambre d’agriculture de la Drôme ont principalement alimenté la concertation régionale sur le projet de pacte et de loi d’orientation et d’avenir agricoles voulus par le chef de l’État. En toile de fond du débat, la souveraineté alimentaire et donc la capacité à produire.

« Il faut arrêter la décroissance de l’agriculture »
À la tribune de la session de la chambre d’agriculture de la Drôme, Isabelle Nuti (directrice de la DDT), Damien Colin (directeur de la chambre d’agriculture), Gilbert Guignant (président des chambres d’agriculture d’Auvergne-Rhône-Alpes), Jean-Pierre Royannez (président de la chambre d’agriculture de la Drôme), Franck Soulignac (premier vice-président du conseil départemental) et Pierre Combat (premier vice-président de la chambre d’agriculture de la Drôme). © AD_CL

D’ici dix ans, un tiers des agriculteurs français partiront à la retraite. En Auvergne-Rhône-Alpes, seul un quart des exploitants agricoles déclare avoir un projet de reprise à horizon 2026. Afin de relever ce défi du renouvellement des générations, et comme annoncé par le chef de l’État le 9 septembre dernier, un pacte et une loi d’orientation et d’avenir agricoles sont en construction. Les réflexions portent sur quatre axes : l’orientation et la formation ; la transmission ; l’installation des jeunes agriculteurs ; la transition et l’adaptation face au changement climatique. « Dans chaque région, une concertation est menée pour élaborer des propositions », a expliqué Jean-Pierre Royannez, président de la chambre d’agriculture de la Drôme, face aux élus consulaires réunis en session le 8 mars à Étoile-sur-Rhône. « Nous devons porter des idées législatives pour installer, transmettre et produire », a ajouté Gilbert Guignant, président des chambres d’agriculture d’Auvergne-Rhône-Alpes. D’ici le 26 avril, date de clôture de la concertation copilotée par le préfet de région et le président du conseil régional, une dizaine de propositions régionales seront sélectionnées pour alimenter le débat national.

« Redonner une ambition agricole à la France »

En toile de fond des débats, la souveraineté alimentaire de la France. En dix ans, l’autosuffisance alimentaire du pays s’est lentement dégradée. En fruits, légumes, volailles et blé dur, entre autres, une étude de FranceAgriMer révèle que l’Hexagone est désormais dépendant des importations. Une situation qui tranche avec la demande des consommateurs d’une production alimentaire locale et de qualité. « Actuellement, nous perdons des parts de marché. Si nous voulons atteindre la souveraineté alimentaire, il faut redonner une ambition agricole à la France en fixant, pour chaque filière, les volumes de production attendus, estime Bruno Darnaud, arboriculteur et élu de la chambre d’agriculture de la Drôme. Allons-nous continuer à supprimer des matières actives, à ne pas stocker l’eau ? », harangue-t-il. Un point de vue partagé par Franck Soulignac, premier vice-président du Département de la Drôme, pour qui la souveraineté alimentaire est « essentielle » tout comme « la levée des freins et des contraintes » pour le stockage de l’eau. « Lors de sa prochaine session, le conseil départemental présentera sa stratégie sur l’agriculture », a-t-il annoncé.
De son côté, Gilbert Guignant pointe « les incohérences politiques » et « les entraves à la production » avant d’ajouter : « Il faut arrêter la décroissance de l’agriculture ». Un élu représentant des Jeunes Agriculteurs s’étonne que l’État ne fixe pas d’objectifs de production alimentaire alors qu’il le fait pour la production énergétique.

Une consultation élargie

Autre frein à la production, l’urbanisation galopante. Plusieurs élus ont proposé de taxer plus fortement les terres en friche et les résidences secondaires. Lors des cessions d'exploitations, « il faudrait pouvoir inciter les cédants à ne pas forcément aller vers les plus offrants, en leur donnant, par exemple, un chèque si c'est un jeune qui s'installe », a suggéré Jean-Pierre Royannez. D'autres ont évoqué une fiscalité différenciée en fonction du type de reprise.
Par ailleurs, plusieurs membres de la chambre d’agriculture ont fustigé les accords commerciaux internationaux « qui affaiblissent l’agriculture européenne » et regretté l’absence de « clauses miroirs » qui imposent réciproquement les mêmes normes sanitaires, sociales et environnementales sur les biens importés. Ils ont également pointé l’insuffisance de promotion des métiers agricoles dans les structures dédiées à l’orientation scolaire. « Il faut ouvrir nos fermes aux élèves lors des stages de troisième », a prôné Grégory Chardon, arboriculteur et élu de la chambre d’agriculture départementale. Un point de vue partagé par Isabelle Nuti, directrice départementale des territoires (DDT) de la Drôme, pour qui « faire connaître la diversité des métiers est essentiel » pour attirer des jeunes vers l’agriculture. Pour protéger le foncier, elle a rappelé les outils existants et sur l’eau, elle a annoncé la signature prochaine d’un accord-cadre entre l’État, le Département de la Drôme et l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse pour l’accompagnement de projets structurants. Isabelle Nuti a aussi évoqué le « gros chantier » de l’autonomie énergétique des exploitations.
L’ensemble des points débattus lors de cette session de la chambre d’agriculture de la Drôme alimentera donc la concertation régionale sur les enjeux du pacte et de la loi d’orientation et d’avenir agricoles. Des échanges avec les jeunes seront également organisés dans quatre établissements d’enseignement agricole de la région, dont un au lycée du Valentin le 30 mars. Enfin, plus largement, chacun peut apporter sa contribution jusqu’à fin mars via un formulaire en ligne sur le site internet de la chambre d’agriculture Auvergne-Rhône-Alpes.

Christophe Ledoux
 

Calamités agricoles : point sur les dossiers

Isabelle Nuti, directrice de la DDT de la Drôme, a fait un point sur les dossiers de calamités de l’année 2022. 
S’agissant du gel sur les vergers des Baronnies provençales, 90 dossiers ont été indemnisés pour un montant total de 3,3 millions d’euros. 
Au titre de la sécheresse, sur les 300 dossiers déposés, seulement 150 s’avèrent éligibles. Le versement des indemnités est en cours. 
Pour les dégâts de gel autre que sur les Baronnies, le dépôt des demandes d’indemnisation est en cours. 
Par ailleurs, rappelant que le dispositif des calamités agricoles est désormais caduc, Isabelle Nuti incite fortement les agriculteurs à s’assurer. 

Résultats 2022 : des comptes équilibrés 

La session réunie le 8 maras à Étoile-sur-Rhône a approuvé les comptes de l’année 2022 de la chambre d’agriculture de la Drôme. Avec plus de 8,8 millions d’euros de charges et de produits, le résultat d’exploitation affiche un excédent de 32 686 euros. L’établissement comptait 79,03 équivalents temps plein. 

L’ensemble des points évoqués en session de la chambre d’agriculture de la Drôme le 8 mars alimentera la concertation régionale sur les enjeux du pacte et de la loi d’orientation et d’avenir agricoles. © AD_CL

Enquête  de satisfaction

La chambre de la Drôme bien notée
Dans le cadre d’une enquête de satisfaction auprès d’utilisateurs de ses services, la chambre d’agriculture de la Drôme obtient la note de 8,26 sur 10. « C’est un résultat très positif et meilleur que la moyenne obtenue par les chambres d’agriculture de la région et même de France », a souligné Adèle Pariot, responsable communication et qualité. À noter, sur un panel de 1 000 agriculteurs, 5 % ont répondu, soit une cinquantaine d’agriculteurs.

Départ à la retraite
Gilles Talotte a travaillé pendant quinze ans à la chambre d’agriculture de la Drôme.

Départ à la retraite

À l’issue de la session de la chambre d’agriculture, un temps de convivialité a marqué le départ à la retraite de Gilles Talotte, chef du service économie, formation et politiques territoriales depuis février 2008. Ses qualités d’écoute et de dialogue ont été mises en avant par Damien Colin, directeur général, ainsi que sa capacité à s’adapter aux transformations de la chambre d’agriculture. Jean-Pierre Royannez, président, a souligné la qualité des relations humaines de Gilles Talotte, notamment son calme et son esprit « chaleureux » et « sécurisant ». Ému, le désormais retraité a salué celles et ceux avec lesquels il a travaillé en confiance au cours des quinze années passées à la chambre d’agriculture de la Drôme.