Partenariat
Survapi : collaboration renforcée entre arboriculteurs et apiculteurs

Depuis 2018, en Drôme, les filières arboricole et apicole travaillent ensemble autour du projet SurvApi. Objectif : réduire les risques d’exposition des abeilles aux produits phytosanitaires, tout en maintenant une protection suffisante des cultures durant la floraison.

Survapi : collaboration renforcée entre arboriculteurs et apiculteurs

La chambre d’agriculture de la Drôme et l’association pour le développement de l’apiculture en Auvergne-Rhône-Alpes (Ada Aura) se sont engagées dans le projet SurvApi (lire ci-dessous). Le 19 février, un atelier entre techniciens, arboriculteurs et apiculteurs a permis de présenter le bilan des suivis réalisés en 2019 et 2020 sur un rucher de dix colonies à Saulce-sur-Rhône. Objectif : répondre à la question « quelle est l’exposition des abeilles aux produits phytosanitaires pendant la floraison des fruitiers ? »

Chaque suivi s’est déroulé de fin février à fin avril. Il a pris en compte l’état populationnel des colonies, le poids des ruches, l’état sanitaire (infestation varroa), le suivi des troubles et de la mortalités devant les ruches. Soixante-dix évaluations de colonies ont été réalisées sur ces deux années, mais aussi cinquante analyses de pollen, neuf de cire et vingt-six de butineuses.

Mieux appréhender le risque

« Nous avons maintenant une bonne connaissance des niveaux d’exposition pendant la floraison des fruitiers », a souligné Marion Guinemer, technicienne « abeille et environnement » à l’Ada Aura. Une trentaine de substances actives commerciales ont été retrouvées dans les différents prélèvements, essentiellement des fongicides, suivi de près par des insecticides. Autre constat : les analyses révèlent en moyenne davantage de molécules sur la cire et le pollen que sur les butineuses.

A partir des résultats présentés et des matières actives identifiées, l’atelier avait pour objectif d’approfondir la notion de risque pour les apiculteurs et les arboriculteurs. « Le risque est un aléa, un événement indésirable dont l’apparition n’est pas certaine mais qui peut avoir des conséquences. Par exemple, pour les arboriculteurs, que le rendement ou la qualité des fruits soient affectés par une pression phytosanitaire non maîtrisée pendant la floraison des fruitiers. Pour les apiculteurs, le risque peut être sur la santé de l’abeille ou sur la conformité des productions à la réglementation », a résumé Marion Guinemer.

Arboriculteurs comme apiculteurs sont en permanence confrontés à des prises de décisions pour limiter ces risques. Avec parfois peu de références sur lesquelles s’appuyer, d’où les enjeux du projet SurvApi. Celui-ci vise notamment à créer des espaces pour qu’arboriculteurs et apiculteurs puissent se concerter et comprendre les problématiques auxquelles chaque filière se trouve exposée. C’est l’un des exercices qui était à l’ordre du jour le 19 février. Par sous-groupe, les participants ont été invités à hiérarchiser les risques, à partir d’une grille de notation expérimentale, en s’appuyant sur un exemple concret rencontré en 2019 sur la période du 26 avril au 2 mai. Sur la base des données du bulletin technique (Zoom) de la chambre d’agriculture, chacun a pu retracer la pression sanitaire pour la culture sur cette période et la mettre en parallèle avec les produits retrouvés lors des prélèvements sur les colonies. L’objectif étant bien sûr d’identifier les marges de manœuvre dont dispose la filière arboricole pour réduire le risque pour les abeilles, tout en préservant la qualité et la quantité de la récolte.

Le travail se poursuit

Cette première étape du projet SurvApi, menée en 2019 et 2020, ouvre de nouvelles perspectives pour les deux filières. Les animateurs de l’atelier, Marion Guinemer et Victor Denervaud de l’Ada Aura, Claire Goral de la chambre d’agriculture de la Drôme et Fabrice Allier de l’Itsap1 ont mentionné la nécessité de poursuivre des expérimentations, notamment sur le positionnement des traitements en dehors des plages horaires de butinage. L’accompagnement des arboriculteurs, en lien avec la chambre d’agriculture, pour mieux prendre en compte la présence des abeilles durant la période de floraison est également à développer. Enfin, tous soulignent que la concertation doit se poursuivre entre les filières (maintien de groupes d’échanges entre producteurs, techniciens des coopératives, OP…).

C’est ce qui est prévu dans le cadre de l’appel à projet Pepit2 de la Région. « Comment collectivement s’organiser pour améliorer la santé de l’abeille ? Quelles sont les différentes ressources issues des pratiques agricoles (haies mellifères, jachères fleuries, couverts végétaux…) les plus intéressantes pour les abeilles ? Voici des questions sur lesquelles nous allons poursuivre nos études », indique Marion Guinemer. Sans oublier la notion de hiérarchisation des risques abordée lors de l’atelier. Elle permettra de prioriser les problématiques arboricoles et apicoles sur lesquelles les partenaires techniques devront se pencher.

Sophie Sabot

1 Itsap : institut technique et scientifique de l’abeille et de la pollinisation. 

2 Pepit : pôles d'expérimentations agricoles partenariales pour l'innovation et le transfert aux agriculteurs d'Auvergne-Rhône-Alpes.

SurvApi, une démarche nationale

En France, la démarche SurvApi a été lancée sur sept territoires, autour de binômes chambre d’agriculture et association pour le développement de l’apiculture. Dans le Morbihan, par exemple, est étudiée la question des grandes cultures et de la miellée de colza au printemps. Idem en Gironde, autour de la viticulture. En Charente-Maritime, est examinée l’interaction entre les grandes cultures, la miellée d’été et la préparation de l’hivernage.

Les objectifs du projet sur ces différents territoires sont identiques :

- contribuer à la connaissance des niveaux d’exposition des abeilles aux produits phytopharmaceutiques et leurs effets sur la santé des colonies ;

- déterminer les liens entre les agrosystèmes étudiés et la nature des résidus observés, faire évoluer les pratiques d’utilisation des produits ;

- sensibiliser, informer, former les utilisateurs pour mieux prendre en compte l’impact des pratiques ;

- créer du lien entre les milieux agricoles et apicoles.

Le projet est piloté par l’Institut technique et scientifique de l’apiculture et de la pollinisation (Itsap) et la chambre régionale d’agriculture de Nouvelle-Aquitaine.

Partenaires techniques de SurvApi en Auvergne-Rhône-Alpes

- Chambre d’agriculture de la Drôme (Claire Goral : 06 22 42 53 95) ;

- ADA Aura (Victor Denervaud : 06 48 60 73 04, Marion Guinemer : 06 24 00 46 59).

Partenaires financiers : Agence française pour la biodiversité, Région Auvergne-Rhône-Alpes, Plan Ecophyto, ministère de la Transition écologique et solidaire.