Agronomes & Vétérinaires Sans Frontières
Soutenir les familles paysannes du Sud

Association de solidarité internationale, Agronomes & Vétérinaires Sans Frontières (ASVF) agit depuis plus de quarante ans auprès des paysans des pays en développement. L’ONG mène actuellement plus de 60 projets dans une vingtaine de pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du Sud.

Soutenir les familles paysannes du Sud
Les familles paysannes d’Haïti vivent dans une précarité extrême. ©Frédéric Apollin-AVSF

Le partage, l’entraide. Face aux défis alimentaire, social et environnemental auxquels est confronté depuis plusieurs décennies le monde agricole, l’association de solidarité internationale Agronomes & Vétérinaires Sans Frontières (AVSF) soutient depuis 40 ans les communautés rurales et les organisations paysannes, menacées d’exclusion et de pauvreté dans les pays du Sud. Reconnue d’utilité publique, l’ONG intervient principalement sur trois continents : l’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud, mais aussi dans les Caraïbes, pour un total d’une vingtaine de pays. « Les problèmes que l’on rencontre dans ces pays en développement sont de même nature que ceux que les paysans français rencontrent. Pas à la même échelle certes, mais certains points communs sont assez troublants », explique édouard Couturier, responsable communication d’AVSF.
L’histoire a débuté en 1977 avec la création du Centre international de coopération pour le développement agricole (CICDA). à son origine, l’association vise à aider les paysans à devenir acteurs du développement économique et social des territoires. Elle intervient notamment auprès des coopératives de petits producteurs de café et de syndicats paysans pour le développement rural dans les vallées interandines au Pérou et en Bolivie. 

Depuis l’engagement de l’association au Mali,  40 000 personnes ont accès à l’eau. ©AVSF

Contre l’exclusion et la précarité des paysans dans le monde

Quelques années plus tard, en 1983, l’association Vétérinaires Sans Frontières (VSF) est constituée pour soutenir les éleveurs des pays en voie de développement, confrontés à des contraintes sanitaires et zootechniques importantes. Des programmes de soutien sont alors proposés en Afrique et en Amérique centrale. En 2004, la fusion de ces deux associations de solidarité internationale donne naissance à Agronomes & Vétérinaires Sans Frontières. Depuis plus de quarante ans donc, ASVF met ses compétences professionnelles au service des paysans installés dans des pays dit défavorisés, pour qu’ils vivent de leur terre durablement.  « Nous venons en aide aux familles paysannes vulnérables qui ont des difficultés à exercer leur métier », souligne édouard Couturier. Dotée d’une équipe d’ingénieurs agronomes et de docteurs vétérinaires, ASVF offre ainsi une expertise technique aux paysans du monde en termes d’agroécologie, d’élevage et de santé animale, d’adaptation au changement climatique, de structuration de filières agricoles durables et équitables et enfin d’actions de post-urgence après des catastrophes naturelles ou des conflits armés.

Une priorité : l’autonomie alimentaire

« Nos ingénieurs apportent un bagage technique et scientifique aux familles paysannes, notamment pour essayer d’améliorer les rendements des cultures. Certains pays souffrant d’insécurité alimentaire, nous avons comme mission d’accompagner les paysans à assurer une certaine autonomie alimentaire », poursuit le responsable communication. AVSF apporte également des soutiens financiers et des formations, tout en valorisant les savoir-faire locaux. Dans certains cas, l’association réalise aussi des actions de défense des paysans sur le terrain politique, en faveur de leur autonomie alimentaire, économique et politique. Ainsi, soixante projets sont actuellement menés dans les dix-huit pays de coopération. C’est le cas notamment d’Haïti, qui représente le premier pays de coopération d’AVSF en termes de budget annuel, avec pas moins de sept projets menés sur cette île. Les actions sont nombreuses : renforcer l’irrigation dans les plaines et les montagnes, encourager au reboisement des forêts, soutenir les organisations paysannes dans les filières équitables d’exportation (café, cacao, fruits), consolider le réseau de mini-laiteries visant à valoriser la production laitière locale, aider à l’installation de jeunes paysans, etc. 

Assurer une activité agricole rémunératrice

Les enjeux sont importants face à la précarité extrême des familles paysannes de l’île alors même que les Haïtiens dépendent à près de 55 % des denrées importées pour se nourrir. Par ailleurs, depuis près de trente ans, ASVF coopère au Mali pour soutenir les éleveurs et agriculteurs, sécuriser l’accès à l’alimentation et créer des revenus dans des secteurs parfois difficiles. « La question de la rémunération des familles est primordiale. Bien souvent, elle permet d’avoir accès aux soins et à l’éducation scolaire des enfants », note édouard Couturier. Sur les terres maliennes, là aussi, les enjeux sont nombreux. Dans le nord du pays, AVSF axe notamment ses actions sur le soutien au pastoralisme (gestion des ressources pastorales, mise en place ou réhabilitation de points d’eau, accès aux marchés de bétail, etc.) ainsi que sur la diversification des productions. Depuis l’engagement d’AVSF dans les régions du Mali, 40 000 personnes ont accès à l’eau et près de 50 000 personnes ont pu développer leurs activités agricoles, végétales ou animales. Pour financer ces projets, AVSF peut compter sur le soutien financier de partenaires publics (Agence française de développement, Union européenne, collectivités territoriales) ou de fonds privés (donateurs particuliers, fondations d’entreprises, mécénat).
Amandine Priolet
Contact : AVSF  14 avenue Berthelot, 69007 Lyon Tél 04 78 69 79 59 - www.avsf.org

Questions à Sabine Patricot, docteur vétérinaire, chargée de programme chez AVSF

© (crédit AVSF)

Sabine Patricot, docteur vétérinaire,  chargée de programme chez AVSF, Ex-directrice du GDS 69, Sabine Patricot, docteur vétérinaire, est chargée de programmes élevage, santé animale et santé publique vétérinaire au sein de l’association AVSF depuis la mi-janvier. Elle travaille en direct avec Madagascar et la Mongolie.

AVSF participe à la formation d’auxiliaires vétérinaires. Pouvez-vous nous expliquer cette démarche ?
Sabine Patricot : « Dans certains pays, les services vétérinaires sont assez peu développés. Madagascar, par exemple, forme ses propres vétérinaires depuis le milieu des années 2000 seulement. L’île compte à ce jour environ 700 vétérinaires diplômés, ce qui est largement insuffisant pour assurer un service de santé animale dans un pays plus grand que la France. Nous avons alors comme mission de former des paysans pour être le référent de leur village. Ces auxiliaires vétérinaires doivent informer leurs pairs, apporter des conseils en conduite d’élevage, faire de la prévention (déparasitage, vaccination) et les premiers diagnostics, appliquer certains traitements, réaliser une surveillance épidémiologique, etc. Ils sont sous la supervision des vétérinaires ou des services de l’élevage locaux et leur bras droit pour mettre en œuvre des campagnes de vaccination obligatoires par exemple, ou pour alerter en cas d’épidémie. Depuis les années 2000, nous avons formé près de 250 auxiliaires vétérinaires à Madagascar. Nous travaillons actuellement sur la reconnaissance officielle de leur statut. » 

Les besoins sont-ils les mêmes en Mongolie ?
S. P. : « Nous n’avons pas de projet de santé animale dans tous les pays. En Mongolie par exemple, il existe des vétérinaires dans toutes les régions. Il n’y a donc pas de nécessité de former des auxiliaires vétérinaires. Dans ce pays, nous avons plutôt travaillé à la construction de GDS*, dès 2004, en nous inspirant du modèle français. Notre rôle premier était d’accompagner les éleveurs à se grouper en association pour lutter à l’origine contre la brucellose et la tuberculose. Ensuite, ces GDS ont perduré et se sont diversifiés. Les éleveurs se sont rassemblés pour développer leur activité commerciale et trouver de nouveaux marchés pour la vente de leurs animaux, de la laine, etc. Ces GDS se sont aussi organisés pour une gestion concertée des ressources naturelles, notamment pour réguler l’utilisation du pâturage. »
 
Vous êtes en charge des actions sur Madagascar et la Mongolie. Quels sont les différents types d’élevages dans ces pays ?
S. P. : « Les élevages sont très différents de chez nous en France. En Mongolie, ce sont principalement des élevages nomades et transhumants de yacks, chèvres, moutons, chameaux, pour la viande, la laine cachemire, les fromages… Ils doivent faire face à une gestion particulière et raisonnée de la ressource en pâturage. Parfois, lors d’été très sec suivi d’un hiver trop neigeux, comme c’est le cas cette année, certains éleveurs peuvent perdre jusqu’à 50 % de leurs bêtes, le troupeau mourant de faim. A Madagascar, ce sont plutôt de petites exploitations de polyculture-élevage, organisées le plus souvent autour de la culture du riz. Il y a aussi pas mal de troupeaux de zébus, marque de richesse, qui servent à la force de travail. Dans ce pays, nous travaillons beaucoup sur l’agroécologie en essayant de rendre plus performantes les techniques de production, dans un souci de restauration de la qualité des sols. » 

Propos recueillis par Amandine Priolet © (crédit photo - AVSF)
* Groupements de défense sanitaire.