RÉGLEMENTATION
Qu’est-il possible de faire avec ses haies ?

L’hiver est le moment idéal pour tailler et entretenir les haies. Dans le cadre de la conditionnalité de la Pac, des règles précises s’imposent aux agriculteurs. Quelques rappels réglementaires concernant l’entretien des haies, mais aussi des exemples de valorisation.

Qu’est-il possible de faire avec ses haies ?
Le pacte en faveur de la haie prévoit un gain net du linéaire de haies de 50 000 km d’ici 2030. ©Min-Agriculture

Avec la réglementation Pac, le code de l’environnement, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver concernant la réglementation pour l’entretien des haies. Dans le cadre de la conditionnalité de la Pac, l’entretien des haies est interdit entre le 16 mars et le 15 août inclus. Le non-respect de cette mesure peut entraîner une pénalité d’au moins 3 % de la totalité des subventions Pac des agriculteurs qui en sont bénéficiaires. Une date qui est plus que discutée par les agriculteurs. En effet, cette date jugée « trop tardive », oblige les agriculteurs à terminer les chantiers de broyage tardivement, au risque de ne plus pouvoir aller sur les parcelles. Pour les particuliers ou les paysagistes, l’entretien est autorisé, mais fortement déconseillé, durant cette période. Or, si un habitat d’espèce protégée est détruit, le responsable peut-être, selon le code de l’environnement, puni jusqu’à 150 000 € d’amende et de trois ans d’emprisonnement. Tous les agriculteurs sont aussi concernés par cette réglementation.

Broyer les haies sous les clôtures est-il autorisé ?

Selon l’Office français de la biodiversité (OFB), le broyage sous les clôtures électriques est autorisé, de même que le broyage latéral pour couper les branches qui pourraient empêcher la clôture de fonctionner correctement. En effet, il est préférable de choisir un entretien mécanique plutôt que chimique. Selon les services de l’État : « le broyage latéral reste proscrit pendant la période interdite. Pour information, pendant la période d’interdiction, il n’y aura pas de sanction, si la taille intervient pour des raisons de sécurité imposées par une autorité extérieure. L’entretien reste possible au pied des haies pour éviter le désherbage chimique, sans tailler les branches (entretien horizontal). La taille d’une branche reste possible en présence d’un problème particulier (branche qui touche une clôture électrique par exemple). »

Questions concrètes

Si des mairies souhaitent que les agriculteurs broient des haies en été pour des raisons de sécurité routière, cela est-il sans conséquence ? La mairie peut réaliser un arrêté communal ou adresser par écrit la demande directement à l’exploitant en mentionnant la localisation de la haie, le linéaire concerné et le motif de la coupe. En effet, il est important que ce ne soit pas les agriculteurs qui décident quelles sont les portions dangereuses, mais bien la commune.
Si mon propriétaire a broyé une haie durant la période d’interdiction, que se passe-t-il ? Si la parcelle est déclarée dans le dossier Pac, cela signifie, pour l’administration, que l’agriculteur doit avoir l’entière responsabilité de sa haie. Cependant, si cela est fait sans l’accord de l’agriculteur, il ne peut être tenu responsable s’il est prouvé que c’est bien le propriétaire qui est à l’origine de l’infraction.
Si je souhaite déplacer ou supprimer une haie, comment faire ? Certains cas dérogatoires existent pour lesquels une destruction, un déplacement ou un remplacement de haies BCAE sont autorisés après une déclaration préalable auprès du service économie agricole de la direction départementale des territoires.

Une valorisation en bois plaquette possible

Le Gaec de Nolat est une exploitation en polyculture-élevage de quatre associés. Sur ces 400 hectares de SAU, l’exploitation compte naturellement des kilomètres de haies dont l’entretien est une charge importante. En effet, il faut près de 400 heures pour broyer les haies sur toute la surface, sans compter les coûts matériel et énergétique.
Ainsi, la valorisation de certaines haies en bois plaquette pour la litière permet de compenser, en partie, les charges liées à la haie en se substituant à la paille. Le Gaec Nolat valorise ainsi 250 m3 apparents plaquettes (MAP) chaque année qui équivaut à 60 tonnes de paille pour un coût de 50 € HT la tonne équivalent paille (4 MAP = 1 t de paille).
Pour cela, la Cuma compost 71 accompagne les agriculteurs dans les chantiers avec un coût entre 10 et 15 € / MAP (abattage + déchiquetage) en fonction de la qualité du linéaire abattu.

Stocker du carbone

Aujourd’hui, d’autres pistes sont possibles pour valoriser la haie. En effet, la haie est un moyen de stocker du carbone et des démarches existent. Carbon-Agri est une méthodologie pour certifier les réductions d’émission de gaz à effet de serre sur les exploitations agricoles. La méthode propose de nombreux leviers techniques pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre (gestion du troupeau et de l’alimentation, optimisation des intrants, gestion des déjections animales…) et l’augmentation du stockage de carbone (implantation de prairies temporaires et de couverts végétaux, plantation et gestion des haies…) pour réduire l’empreinte carbone de l’exploitation. La vente de ce carbone « évité » permet d’avoir un revenu « complémentaire » tout en réduisant son empreinte.

Loïc Belin

Pacte de la haie : 50 000 km d’ici 2030
Dans le cadre de la conditionnalité de la Pac, l’entretien des haies est interdit entre le 16 mars et le 15 août inclus. © FDC

Pacte de la haie : 50 000 km d’ici 2030

Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau et la secrétaire d’État à la Biodiversité Sarah El Haïry ont présenté le Pacte en faveur de la haie lors d’un déplacement dans le Morbihan fin septembre. Ce pacte – qui fait partie de la Planification écologique – vise à obtenir « un gain net du linéaire de haies de 50 000 km d’ici 2030 ». Un « observatoire de la haie » sera créé pour améliorer la connaissance du linéaire et « assurer un suivi quantitatif et qualitatif ». Les règlementations existantes sur la haie (agricoles, environnementales et urbanistiques) seront harmonisées pour simplifier la gestion. Ce pacte prévoit par ailleurs de « structurer des filières de valorisation des produits des haies » qui devront être gérées de manière « durable ». Un « effort inédit d’accompagnement financier » est promis pour soutenir la plantation et la production de plants et graines « de qualité, adaptés aux enjeux du changement climatique ». Enfin, la formation et le conseil seront renforcés, en lien avec les chambres d’agriculture et les associations. Au total, « 25 actions » seront développées en feuilles de route d’ici fin novembre, pour être déployées dans les territoires « début 2024 ». 

23 000 km de haies disparaissent chaque année en France

Selon un rapport d’avril 2023 du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), dépendant du ministère de l’Agriculture, la surface en haies et alignements d’arbres en France métropolitaine est en constante diminution. Depuis les épisodes de remembrements apparus à partir de 1945, 70 % des haies présentes au début du vingtième siècle auraient disparu soit 1,4 million de kilomètres de haies. 
Selon une estimation de l’Afac Agroforesteries et de Solagro, la perte annuelle moyenne de 10 400 km/an
 entre 2006 et 2014 est passée à 23 571 km/an entre 2017 à 2021, malgré une politique de plantation d’environ 3 000 km/an. Ces 23 571 km rapportés à la valeur estimée du linéaire total (Géoportail IGN 2023), représentent une érosion du linéaire de l’ordre de 1,5 % par an.
Pourtant, face aux aléas climatiques de plus en plus intenses et fréquents, les haies et les arbres représentent une vraie solution grâce aux nombreux services qu’ils rendent à l’agriculture et au territoire :
- bénéfices agronomiques permettant une amélioration du rendement agricole et de la productivité des animaux : effet brise-vent, bien-être animal par l’ombrage, rétention des sols et lutte contre l’érosion, enrichissement des sols, lutte biologique, pollinisation ;
- services écosystémiques : stockage de carbone, préservation du paysage, régulation de l’eau, préservation de la biodiversité et des corridors écologiques. 
Le rapport complet à consulter