Le désherbage des vignes s’adapte à la réduction des intrants
À l’occasion d’une journée technique organisée par la chambre d’agriculture du Rhône sur le thème de la modernisation du vignoble et des alternatives aux produits phytosanitaires, plusieurs méthodes de désherbage sans utilisation de produits phytosanitaires ont été présentées.

C’est sous un soleil de plomb et des températures printanières que s’est tenue une journée technique dédiée au désherbage, dernièrement à Pizay (Rhône), sur le thème de la modernisation du vignoble et des alternatives aux produits phytosanitaires. De nombreux professionnels de la vigne avaient fait le déplacement sur des parcelles appartenant au lycée agricole Bel Air. Des enjambeurs aux robots viticoles, en passant par différents modèles d’interceps et de la traction animale, plusieurs ateliers de démonstration ont été proposés.
Le robot Ted et son nouveau comparse Jo
Ted, le robot phare à l’essai dans les vignes de la Sicarex Beaujolais, était déjà bien connu. Équipé d’un système de GPS, d’une caméra et d’un laser, ce robot a été choisi par l’Institut français de la vigne et du vin pour des tests dans le cadre du plan Ecophyto avec l’objectif d’une réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires de l’ordre de 50 % à l’horizon 2025. Ce robot, coqueluche de son développeur Naïo Technologies, peut atteindre une vitesse maximale de 4,5 km/h. Mais sa grande taille et son poids ne lui permettent pas de passer dans une parcelle de vignes dont la pente est supérieure à 10 %. Son petit frère, Jo, présente les mêmes caractéristiques.
À la différence près que ce premier modèle de chenillard autonome a été conçu pour les vignes étroites. Jo avance à une vitesse d’un peu plus d’1 km/h dans une pente de 5 à 9 %. Ces deux modèles présentent le même intérêt : le gain de temps. « Comme les vignobles font face à un manque de main-d’œuvre, les robots peuvent devenir une alternative intéressante », affirme Damien Gayet, chargé de mission agroéquipement et numérique à la FRCuma Auvergne-Rhône-Alpes. Mais la législation actuelle ne leur permet pas encore de fonctionner en totale autonomie. Un opérateur doit se trouver à une distance de 250 m maximum, car ces robots dépendent de la directive européenne « machines » et ne peuvent pas se déplacer sur la route.
Le robot enjambeur viticole Ted est guidé par GPS RTK, ce qui permet une précision centimétrique lors du désherbage des cultures. © DR
Un enjambeur électrique bientôt automatisé ?
Fabriqué par Sabi Agri, l’enjambeur électrique automatisé a la capacité de se déplacer de façon autonome sur la route. Le modèle mis en démonstration présente une grande adaptation à certaines largeurs de vignes. Doté d’outils interceps, d’une rogneuse et d’une écimeuse, cet enjambeur peut travailler des inter rangs de 1,10 m. Il a besoin de 3,80 m pour effectuer son demi-tour en bout de rang. « Son débit de chantier est similaire à celui d’un enjambeur thermique, avec l’intérêt de la fiabilité de l’électrique et d’un entretien plus avantageux », note le chargé de mission.
Plusieurs outils interceps ont été présentés, dont le modèle Radius SL Plus, développé par Clemens Technologies. © DR
Les interceps toujours en vogue
Plusieurs marques - Clemens, Boisselet, Belhomme - ont présenté des outils interceps : lames, décavaillonneuse, disques et disques émotteurs. Leur limite ? Le temps de travail nécessaire sur l’année. « Bien souvent, le nombre de pieds sur le rang et l’écartement ne sont pas les mêmes d’une vigne à l’autre. Cela pose aussi la question de la gestion de l’érosion des sols en coteaux, souligne Damien Gayet, mais cela répond aussi à la gestion de l’herbe sur le rang sans passer par l’usage de produits phytosanitaires. » L’occasion de rappeler que ces outils demandent beaucoup d’attention, surtout pour des vignes qui n’ont jamais été mécanisées. « Le système racinaire ne sera pas forcément prêt, mieux vaut être doux et méticuleux. »
Tarifs indicatifs des méthodes
Coût d’achat d’un robot Ted : 175 000 € avec remorque de déplacement et sans outil. Électricité 1 €/h, entretien 2 €/h, abonnement 2 000 €/an.
Coût d’achat d’un enjambeur électrique : 130 000 € avec quatre roues motrices et sans outil. Électricité 1 €/h, entretien 2 €/h.
Coût d’achat d’un enjambeur thermique : 120 000 € avec quatre roues motrices et la cabine. Consommation 8 l/h, entretien 3 €/h.
Léa Ronchon
Le désherbage par la traction animale
À quelques mètres de la démonstration d’un enjambeur, un cheval de trait pesant près de 900 kg détonne dans le paysage. Après quelques passages dans la vigne, Alain Gauthier, viticulteur et animateur de l’atelier, confie que les conditions du sol ne sont pas des plus optimales : « Si la vigne est trop sèche, les outils ont plus de mal à rentrer dans le sol ». Pourtant, le désherbage par traction animale connaît un certain regain d’attention au sein du vignoble. « La jument ne crée pas de tassements dans les sols et on peut y attacher une décavaillonneuse. Je l’utilise sur 4 ha de vignes, le terrain est plus souple et comme on aère les sols, on peut aller jusqu’à 15 ou 20 cm, on retrouve plus de biomasse et de biodiversité », détaille Alain Gauthier. Lorsque les sols sont assez souples, le viticulteur estime qu’il faut compter 8 à 10 h de travail par hectare. Une méthode visiblement adaptée à la limitation des intrants et aux petites surfaces mais qui comporte aussi ses limites : un cheval et son meneur travaillent en moyenne 8 h par jour et requièrent un sol ni trop sec, ni trop enherbé, pour être le plus élastique possible.
L. R.
Le viticulteur Alain Gauthier a présenté la traction animale, une méthode de désherbage efficace.
En moyenne, cette prestation est facturée 65 à 80 € HT de l’heure.