Prévigrêle : sensibiliser le grand public aux moyens de lutte
L’association Prévigrêle, membre du réseau formé par l’association nationale d’étude et de lutte contre les fléaux atmosphériques (Anelfa), cherche à faire entendre sa voix pour prévenir les dégâts liés aux chutes de grêle.

Association loi 1901 basée à Cavaillon (créée en 1997), Prévigrêle, nouvellement présidée par Laëtitia Lambert (exploitante agricole à Saint-Rémy-de-Provence), couvre cinq départements : l’Ardèche, les Bouches-du-Rhône, la Drôme, le Gard et le Vaucluse. « Notre mission est de faire de la prévention contre les dégâts liés aux chutes de grêle, par le biais d’installation en maillage de générateurs terrestres à vortex, à partir de la technique d’ensemencement des nuages à iodure d’argent (cf. encadré). Nous disposons aujourd’hui de 185 générateurs (dont 25 dans la Drôme) et de 197 grêlimètres, répartis sur quatre zones choisies en fonction des prévisions météorologiques de Kéraunos (observatoire des tornades et des orages, ndlr) », précise Sandra Scavennec, coordinatrice de l’association. Ces générateurs sont utilisés pendant la période du 25 mars au 10 octobre, période la plus propice aux risques d’orages grêligènes.
Nouer des rapprochements
L’assemblée générale organisée dernièrement à Bouchet a permis aux membres du bureau de rappeler l’importance de tisser des liens avec de nouveaux partenaires (dont des collectivités territoriales) et de nouveaux financeurs afin de mener à bien la mission imputée à l’association. « La communication sur notre réseau et notre méthode de prévention est indispensable. Notre action est encore trop fortement méconnue du grand public. Il faut savoir que tout un chacun en est bénéficiaire, même si les dernières demandes faites - et les plus nombreuses - émanent du monde agricole », stipule la coordinatrice.
Davantage de gros grêlons
Prévigrêle aimerait également nouer un rapprochement avec les compagnies d’assurances, dans le cadre de la prévention. « Les prévisions scientifiques sont unanimes : à courte échéance, nous aurons moins d’épisodes de chutes de petite grêle, mais plutôt un accroissement rapide et conséquent d’exposition à de gros grêlons. Sur nos exploitations agricoles, sur nos maisons, nos voitures, nos biens, privés et publics... Dans ce contexte, nous aimerions trouver une équipe universitaire pour réaliser une étude d’efficacité de notre action et avoir ainsi des données chiffrées à donner aux assureurs, qui restent aujourd’hui frileux », indique Sandra Scavennec.
À terme, les quinze réseaux de l’Anelfa aimeraient travailler sur l’obtention du statut d’utilité publique afin d’avoir une reconnaissance au niveau européen.
Amandine Priolet
La méthode d’ensemencement, quésaco ?
L’association nationale d’études et de lutte contre les fléaux atmosphériques (Anelfa) et ses réseaux utilisent depuis les années 1950 la méthode de l’ensemencement des nuages à iodure d’argent pour lutter contre la grêle. « Ce principe consiste à introduire artificiellement dans les nuages qui forment la grêle, les cumulonimbus, des noyaux glaçogènes d’iodure d’argent, explique Claude Berthet, directrice de l’Anelfa. On essaie de diminuer les facteurs qui sont favorables au grossissement des grêlons en apportant des noyaux de congélation artificiels », poursuit-elle. Cet ajout de particules dans l’atmosphère va permettre de modifier les échanges entre les différents états de l’eau (vapeur, liquide, solide). « Ainsi, en augmentant le nombre de particules, on multiplie le nombre d’éléments glacés. La dimension des grêlons sera alors réduite : ces derniers tomberont alors plus lentement ou fondront en partie avant d’atteindre le sol. » Cette méthode est possible grâce à l’utilisation de plus de 1 000 générateurs, installés sur une vingtaine de départements français. « Un générateur diffuse en moyenne 9 g d’iodure d’argent par heure, trois heures avant la chute de grêle prévue et ce, pendant 10 heures afin de couvrir la période de risque », conclut Claude Berthet.
Climatologie 2024 : une année très humide
Le centre de ressource et d’innovation pour l’irrigation et l’agrométéorologie en région sud (Criiam Sud) apporte chaque année son expertise météorologique. Lors de l’assemblée générale de Prévigrêle, Sylvain Maillard, conseiller agrométéo, a évoqué le bilan d’une année très pluvieuse, la plus humide depuis 2018. Plusieurs événements ont marqué 2024, dont « un mois de mars extrêmement pluvieux avec des pluviométries allant de quatre à six fois la normale. Dans le sud de la Drôme - et plus précisément le Tricastin -, l’excédent a toutefois été un peu moins violent. Les normales pluviométriques annuelles sont déjà dépassées depuis octobre », précise Sylvain Maillard. Dans la Drôme, les cumuls de janvier à octobre étaient déjà importants : 1 006 mm à Montélimar, 877 mm à Valence Chabeuil, 1 112 mm à Montauban-sur-l’Ouvèze...
« Le gel tardif du mois d’avril est survenu après quelques jours de températures élevées : c’est un phénomène récurrent depuis plusieurs années. En mai, période fraiche et humide, nous avons frôlé des records de températures minimales (11 °C le 2 mai au meilleur de la journée). Les températures élevées sont arrivées entre le 25 juillet et le 17 août, avec des minimales souvent supérieures à 20 °C. Il s’agissait du deuxième mois d’août le plus chaud derrière 2003 », ajoute-t-il.
Les orages de grêle répertoriés par le réseau datent du 30 mars (de Carpentras à la Drôme, en traversant l’Enclave des Papes) et du 12 juillet (des Cévennes à Montélimar) avec des phénomènes dynamiques puissants et des dégâts relevés importants. À noter, le secteur de Prévigrêle ne s’étend pas au-delà de Saulce-sur-Rhône, ce qui explique que le violent orage de grêle du 21 juin dernier n’ait pas été relevé par le conseiller du Criiam. « Globalement, les conditions météorologiques de l’année n’ont pas été très propices aux orages, surtout après l’année très agitée de 2023 », conclut le conseiller agrométéo.