Accès au contenu
CAPRINS

Echanger de bons conseils pour contrôler la qualité du lait

Eleveurs caprins et techniciens se sont réunis à l’occasion d’une journée technique à la ferme caprine du Pradel à Mirabel (Ardèche) pour découvrir la nouvelle installation de traite de l’exploitation. La restitution des travaux dans le cadre du projet CmaFlaura était également très attendue. 

Echanger de bons conseils pour contrôler la qualité du lait
A la ferme du Pradel (Ardèche), techniciens et éleveurs ont échangé de bons conseils pour garantir bien-être animal et qualité du lait. © PLB

Quelque soixante-cinq techniciens et éleveurs étaient présents, fin novembre, à la ferme expérimentale caprine du Pradel à Mirabel (Ardèche), pour participer à une journée technique. La restitution des travaux dans le cadre du projet CMaFlaura par Alice Hubert, cheffe de projet élevage à l’Institut de l’élevage, a représenté un temps fort de cette rencontre technique.  Le projet CMaFlaura a concerné la nouvelle installation de traite de la ferme du Pradel. Il avait pour objectifs de tirer les enseignements de la mise en service de ce nouvel équipement, d’apprécier l’impact d’une installation de traite et d’acquérir des références sur les effets de la nouvelle installation sur la procédure de nettoyage et la qualité microbiologique du lait. 

Bien penser l’aménagement de son bâtiment permet de s’assurer du bien-être des animaux comme des travailleurs. ©PLB

Trois ans de travail

« Ce projet a porté sur l’évaluation de l’incidence d’un changement d’installation de traite, le fonctionnement et l’organisation de la traite, la qualité du lait et la production de fromages en AOP Picodon au lait cru. Il s’est déroulé sur trois ans, de 2019, année de mise en service de la nouvelle installation de traite, à 2021. Nous avons suivi l’installation du biofilm dans la machine à traire pendant un mois et demi après la mise en service de la machine à traire, une grande première », a expliqué Alice Hubert. « Le constat : la procédure de nettoyage de la machine à traire impacte à minima la vitesse de développement du biofilm. L’implantation se fait assez lentement, après plusieurs semaines d’utilisation. Nous avons tiré des enseignements de cette période de transition délicate. Il est utile de l’anticiper en congelant du lactosérum de bonne qualité en amont de la transition et en suivant la qualité du lait cru avec lactofermentation. Nous avons testé différentes procédures de nettoyage et de désinfection de la machine à traire, pour évaluer si elles avaient un impact sur le biofilm de la machine à traire et l’ensemencement du lait cru en micro-organismes. Nous avons évalué l’impact sur la transformation fromagère en picodon AOP lait cru et constaté que les procédures de nettoyage et désinfection de la machine à traire testées n’apportent pas de contrainte majeure.» Le rapport recommande de bien sécuriser les démarrages d’une nouvelle installation de traite avec les contrôles de nettoyage. La conception de la machine à traire doit être simple pour avoir un nettoyage efficace. Elle doit être entretenue dans les règles et ne doit comporter aucun défaut de nettoyage.

Lutter contre les Stec HP 

« Ces résultats sont encourageants pour poursuivre les travaux autour de la réduction de l’impact environnemental de ces procédures. Mais un défaut de température semble bien entraîner des conséquences négatives sur la fabrication fromagère, probablement du fait du développement de flores indésirables dans le biofilm de la machine à traire. Il convient d’être particulièrement vigilant sur les paramètres du nettoyage avec le TACT : températures de la solution de lavage, action mécanique, concentration des produits, temps de contact de la solution de lavage », a ajouté Alice Hubert.  Hélène Le Chenadec, cheffe de projet qualité du lait à l’Institut de l’élevage, a abordé la question des Stec HP (bactéries fécales) qui peuvent se retrouver dans le lait. Le projet Malistec doit permettre de limiter le passage des Stec dans le lait. « Depuis plusieurs années, les Stec HP (Escherichia coli) d’origine fécale menacent les filières au lait cru, notamment en élevage caprin. Afin de limiter la multiplication et la transmission de ces bactéries dans le lait, le projet Malistec s’est penché sur deux leviers : la mamelle et la litière. En cas de présence avérée de Stec HP en élevage, il est essentiel de limiter leur passage dans le lait et la circulation dans l’élevage. La traite est alors une étape clé, et l’utilisation ponctuelle de procédures de désinfection des trayons peut être envisagée en pré-traite, en anticipant les conséquences sur le temps de travail, et la pénibilité engendrée, a rappelé Hélène Le Chenadec. Les bonnes pratiques en amont de la traite sont indispensables, notamment pour le paillage et l’entretien de la litière : elles permettent de s’assurer de la propreté des animaux et des trayons avant la traite, et de réduire la circulation des bactéries d’origine fécale dans la ferme ».
Pierre-Louis Berger

Le bien-être avant tout

Cinq ateliers se sont déroulés pendant cette journée technique : adaptation en fromagerie, sécurisation de la traite, désinfection des trayons, bâtiment et santé, lait de qualité et matériel. Dans l’atelier conduit par la MSA 
Ardèche-Drôme-Loire, les éleveurs, exploitants et techniciens ont dû, sous la forme d’un jeu, établir toutes les étapes, de la réflexion à la conception d’un bâtiment d’élevage. Les conseils portaient sur la conception et la réalisation du bâtiment pour réduire les dangers, améliorer la santé et la sécurité des travailleurs. « Notre idée est d’interpeller systématiquement le service santé-sécurité au travail dès la phase de réflexion d’un bâtiment nouveau pour être ensuite bien conseillé par les services de la MSA. À titre d’exemple, concernant les dimensions et l’aménagement de la fosse et des quais, les objectifs visés sont la prévention des accidents et la facilité de déplacement des trayeurs. Pour le matériel de traite, il est essentiel de faciliter la manipulation, l’automatisation des tâches et la diminution des risques de troubles musculo-squelettiques. Confort visuel, luminosité, sonore, facilités d’accès aux mamelles participent à leur niveau à la bonne ambiance au travail. On conseille de tester le matériel envisagé chez soi ou dans une autre ferme avant de se décider ce qui permet d’éviter les mauvaises surprises » a expliqué la technicienne animant l’atelier, en compagnie d’un vétérinaire et de deux exploitants.
P-L. B.

En service depuis 2019, la nouvelle salle de traite du Pradel a été en partie financée grâce au programme régional Pepit. ©PLB

Une nouvelle salle de traite pour se prémunir des risques sanitaires

La ferme expérimentale caprine du Pradel en Ardèche a mis en service sa nouvelle salle de traite en janvier 2019. Elle comprend deux quais de traite avec une machine sur chaque quai et une salle de traite expérimentale et de production du lait. La machine à traire a nécessité un coût de 75 000 €. L’opération a obtenu des financements de la région Auvergne-Rhône-Alpes via le programme Pepit (appel à projets) et Anicap (filière interprofessionnelle caprine). Les partenaires sont la ferme caprine du Pradel (domaine Olivier de Serres et Cap‘ Pradel), la chambre d’agriculture de l’Ardèche, le groupement sanitaire de l’Ardèche et la MSA Ardèche-Drôme-Loire. Des essais ont été en partie conduits à la ferme du Pradel depuis 2019 dans le cadre du projet CmaFlaura sur la maîtrise de la flore du lait cru de chèvre à la traite. Selon Laurent Balmelle, président de la ferme caprine du Pradel, éleveur à Ribes (Ardèche) et président de Cap’ Pradel, association gestionnaire des essais des éleveurs, les expérimentations de la nouvelle machine à traire ont porté sur la pression, les lavages ou encore les températures de lavage : « Dorénavant, on peut élargir les essais avec cette nouvelle machine à traire. À l’heure où l’on parle de biodiversité, on peut savoir comment les bonnes flores s’installent dans les machines à traire. Nous défendons le lait cru au Pradel, le Picodon en est un bel exemple. Tous ces essais permettent de sécuriser et minimiser les risques sanitaires dans nos laits crus. Le projet Malistec s’est focalisé sur un nouveau pathogène. Notre outil va permettre d’améliorer la qualité du lait. » Alice Pradier, technicienne à la ferme du Pradel, précise : « Nous avons 228 chèvres à la ferme du Pradel et nous réalisons deux traites par jour. Notre salle est une salle d’expérimentation et de production où nous prenons en compte le bien-être animal. Il faut que les bêtes soient traitées de la même façon tous les jours ». Elle poursuit : « Il faut savoir créer des habitudes, une routine et éviter l’adrénaline chez les chèvres. Nous avons trois règles : régularité, sécurisation et homogénéité. Le trayeur doit savoir étudier le comportement de la chèvre s’il veut obtenir une qualité optimale du lait. Quand la bête rumine, c’est un signe que la traite se passe bien. Le nettoyage doit être constant (régulateurs, manchons…). La traite doit être silencieuse pour favoriser le bien-être animal. Ici, on travaille sur le One Welfare, c’est-à-dire le bien-être partagé, pour le trayeur comme pour les animaux. » 
P-L. B.