RECOMMANDATIONS
Eau : L’appel à la sobriété de trois inspections
Trois organismes ministériels se sont penchés sur la gestion de l’eau pendant la période de sécheresse de l’été 2022. À la lumière de ce retour d’expérience, ils proposent en 18 recommandations générales un changement radical dans l’approche des usages de l’eau.
Après être revenu sur un constat connu de tous sur la sécheresse de l’été 2022 et l’avoir analysé, (1 000 communes sans eau, baisse des rendements agricoles, chute de la production d’électricité d’origine hydraulique, etc.), les membres de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IEGDD), l’Inspection générale de l’administration (IGA) et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGEAAR) sont arrivés à la conclusion que « la gestion de crise ne pourra pas garantir dans la durée le maintien des usages actuels », indique leur rapport1. « Seules des politiques de transformation permettront d’éviter les ruptures brutales », poursuit-il, insistant sur un nécessaire et inévitable « changement radical dans nos pratiques ». Dans le droit fil du plan Eau présenté le 30 mars par le président de la République, les experts lancent un appel à la sobriété. Le rapport insiste d’ailleurs sur « la fragilité de notre modèle agricole et l’impérieuse nécessité d’un effort collectif massif pour en accélérer la transformation ». Si les experts n’entrent pas dans le détail des mesures à prendre, ils ont en tête les objectifs de la transition agroécologique. Ainsi quand ils évoquent, « l’équité de traitement », ils s’inquiètent des conséquences de l’irrigation sur le niveau des eaux de surface, des nappes phréatiques, sur la biodiversité, etc.
Renforcer les contrôles
C’est ce qui explique notamment qu’ils suggèrent de rendre obligatoire la déclaration des prélèvements domestiques par forage et des prélèvements en nappes de surface afin d’assurer une meilleure connaissance sur le niveau des prélèvements et imposer des compteurs au-delà d’une consommation de plus de 250 m3 par an ! De même, les trois inspections souhaitent déployer des compteurs télérelevés (connectés, ndlr) pour les plus gros consommateurs, avant leur généralisation obligatoire d’ici à cinq ans – une mesure contenue dans le plan Eau –, ainsi que la régularisation des forages domestiques non déclarés. L’agriculture figure explicitement dans cette recommandation. Les experts entendent aussi renforcer les contrôles et les sanctions pour les forages non déclarés et proposent aussi de reprendre quelques-unes des préconisations qu’ils avaient formulées lors de précédents rapports comme « définir à l’échelle nationale une liste de dérogations, notamment agricoles et les rendre publiques ». L’agriculture n’a cependant pas à supporter seule l’entièreté de cette sobriété, remarquent en creux les trois inspections. Mettant aussi les politiques face à leurs responsabilités, elles leur demandent de mieux s’appuyer sur les outils de prévision existants comme la plateforme AQUI-FR, qui avait identifié, dès le mois d’avril 2022, les territoires présentant les risques de sécheresse les plus importants.
Christophe Soulard
(1) Le rapport est disponible sur le site de l’IEGDD : www.igedd.developpement-durable.gouv.fr
Le CESE contre les subventions aux retenues d’eau
Dans un avis rédigé par Pascal Guihéneuf représentant la CFDT et Serge Le Quéau (Solidaires), le Conseil économique social et environnemental (Cese) émet 23 recommandations pour améliorer la gestion de l’eau et sa gouvernance. Les deux rédacteurs demandent que « soient rendus publics les volumes totaux prélevés et les stratégies d’irrigation agricole ». Ce même rapport « préconise qu’il soit interdit de subventionner par des fonds publics tout projet de création de mégabassine, notamment celles alimentées par pompage dans la nappe phréatique ».
L’avis qui a été adopté à 98 voix pour, 13 contre (le groupe Agriculture) et 17 abstentions est disponible sur le site du Cese : www.lecese.fr