Épisode de gel, quelles conséquences pour le colza ?
Après les coups de chaleurs entre le 28 mars et le 1er avril, le thermomètre est descendu très bas dans les nuits du 6 au 7 et du 7 au 8 avril, faisant craindre des impacts pour le colza. Certes, ces gelées pourraient laisser des traces, mais ce sont bien les conséquences des difficultés de maîtrise d’insectes qui restent le plus à redouter.

La quasi-totalité des colzas étaient au stade début floraison (F1) en début de la semaine 15 en région Auvergne-Rhône-Alpes. Les situations précoces de Limagne et de la plaine de Lyon présentaient des parcelles plus avancées dans la floraison. Théoriquement, les fleurs avortent dès 0 °C. Ce sont surtout les fleurs les plus exposées, sur les parties hautes des hampes, qui souffrent. Des gels précoces, à ce stade, sont généralement très bien compensés par les organes reproducteurs des hampes secondaires et tertiaires. Les boutons tolèrent quant à eux des températures plus basses : jusqu’à - 5°, - 6 °C, le colza supporte assez bien, selon les observations empiriques. Pour les stades un peu plus avancés, les jeunes siliques (moins de 1 cm) sont bloquées à partir de - 3 °C, les siliques plus âgées (2 à 4 cm) supportent des gels jusqu’à - 5 °C.
Quelles conséquences visibles à ce jour ?
Les valeurs seuils restent indicatives et de nombreux autres paramètres entrent en ligne de compte : topographie et exposition des parcelles, architecture, biovolumes et turgescence des plantes, variétés… Après les deux nuits de gel, ce sont essentiellement des courbures de hampes principales (parties hautes) et des avortements de fleurs sur le haut des couverts qui se manifestent pour l’instant. Des tiges raides, cassantes, gelées de l’intérieur ont toutefois été rapportées et ces situations seront à suivre de près. Des nécroses au niveau des hampes pourraient se révéler dans ces cas. Ces jours-ci, le métabolisme des plantes paraît beaucoup moins affecté qu’en 2020. Les plantes se revigorent assez bien dans l’ensemble, il n’y a pas de pliure ou de tige « en U inversé ». Une chance, les implantations étaient bonnes à très bonnes à l’automne 2020 et les plantes n’ont pas eu à endurer un vent glacial. Des pluies pourront favoriser le redémarrage de la floraison. Les parcelles très perturbées après le froid de février nous laissent, quant à elles, toujours perplexes quant à leur niveau de productivité.
Les effets des insectes
Les différences d’aspects entre parcelles, que l’on risque bien d’observer dans les prochaines semaines, dénoteront surtout la sévérité des dommages causés par les insectes : larves d’altises (dégâts type « pieds buissonnants - fasciés »), larves de CBT localement dans l’Ain et Nord Isère, charançons de la tige par-ci par-là et méligèthes absolument partout. La pression exercée par les méligèthes dans les derniers jours de mars 2021 fut relativement importante. Avec le temps froid, les insectes restants après les interventions ont été anesthésiés mais des avortements de boutons, sans doute bien plus forts que ceux causés par le froid, seront à déplorer dans les quinze prochains jours (floraison délicate). L’état sanitaire et nutritionnel des plantes conditionnera la capacité du colza à compenser. La pluie sera une aide précieuse pour redresser le tir.
Déjà remarqués en 2019, des symptômes de feuilles jaunes aux teintes orangées ont été signalés sur des variétés à résistance partielle contre TuYV (pouvant causer la jaunisse du colza). © Terres Inovia
Fongicides : conduite à tenir pour la suite
Après tous ces événements, il n’y a rien d’autre à faire que de poursuivre le suivi insectes et de raisonner au mieux le positionnement fongicide anti-sclérotinia à l’échelle de la parcelle (pour ceux qui ne l’avaient pas encore fait). Les attaques de méligèthes et les avortements de boutons et fleurs peuvent compliquer la notation de stade. Il faudra trouver un compromis pour positionner le fongicide à un moment où interviendra la chute des premiers pétales après une relance significative de la floraison. Une protection fractionnée en deux passages peut être utile pour gérer les parcelles à floraison hétérogène. En présence d’oïdium (fréquent en 2020), il conviendra d’assurer une lutte conjointe sclérotinia et oïdium avec un fongicide adéquat : les spécialités fongicides à base de triazole ont une efficacité curative et préventive reconnue au champ.
Des feuilles jaunes parfois repérées sur les étages inférieurs des plantes
Déjà remarqués en 2019, des symptômes de feuilles jaunes aux teintes orangées ont été signalés sur des variétés à résistance partielle contre TuYV (ex : LG Aviron, LG Ambassador, LG Amplitude, Temptation, Cadran...). Ces « chloroses » se sont développées courant mars entre les nervures de vieilles feuilles lobées majoritairement. Les nervures restent vertes. Le phénomène s’observe généralement par foyers ou sur des pieds isolés. Pour ces variétés, ces symptômes ne s’observent pas systématiquement en toute situation. Aucune explication d’ordre pathologique, ni de carence nutritionnelle n’ont pu être mises en évidence à ce jour.
Votre contact régional, Alexis Verniau : [email protected] - Terres Inovia