Michel-Édouard Leclerc : toujours moins cher
Le président du comité stratégique des centres E.Leclerc, Michel-Edouard Leclerc a été auditionné le 19 janvier par la Commission des affaires économiques du Sénat. Entre crainte du retour à l’inflation et négociations commerciales, il est également revenu sur la polémique de la baguette à 0,29€.

Avec 721 magasins (hypers, supers et express), 690 drives, 2 541 enseignes spécialisées 140 000 salariés, 18,5 millions de clients et un chiffre d’affaires de près de 50 milliards d’euros par an, Michel-Édouard Leclerc est un poids lourd de la grande distribution. Lui-même le concède : « Leclerc a surperformé pendant la crise Covid ». C’est sans doute ce qui a agacé le sénateur Laurent Duplomb (LR, Haute-Loire) qui s’en est pris frontalement au patron des supermarchés. « Vous vous présentez comme le chevalier blanc du consommateur en faisant savamment oublier que vous vous enrichissez. Vous vous êtes enrichi en 2021 de près de 75 millions d’euros, augmentant votre rémunération de plus de 40 millions d’euros », l’a-t-il accusé. Quelque peu bousculé, le président du comité stratégique a tempéré préférant porter le propos sur les « premiers prix […] revenus à la lumière de la crise […] Les Français sont sensibles aux prix. Leur préoccupation essentielle, c’est le pouvoir d’achat », a-t-il insisté souhaitant « ne pas opposer un mur de hausse aux consommateurs ».
Transparence
Se défendant d’avoir abordé les négociations commerciales dans un sentiment de déflation mais bien au contraire d’inflation, Michel-Edouard Leclerc assure toutefois qu’il va demander la transparence sur les prix. A mots à peines couverts, il accuse les industries agroalimentaires de ne pas jouer le jeu. « Cependant, nous ferons passer les hausses nécessaires, (…) avec discernement, mais attention à ne pas casser la croissance », a-t-il averti. Selon lui, les centrales d’achat ont reçu des hausses de tarif supérieures ou égales à 6 % « 25 % du chiffre d’affaires du groupe est impacté par une hausse de +6 % sur les produits alimentaires et de +7 % sur le non alimentaire ».
« Arrêtons ce cinéma »
Interrogé sur la baguette de pain à 0,29 euros pour laquelle il n’a eu que « des retours positifs » de la part de sa clientèle, il a ouvertement accusé Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, d’avoir réagi un trop rapidement. « Nous n’avons pas baissé le prix. C’est le prix moyen de la baguette blanche 1er prix qui oscille entre 0,22 € et 0,32€. Nous avons décidé de geler le prix pour six mois à 0,29 €. C’est d’ailleurs le même prix qu’Intermarché l’an dernier sur le même produit », a-t-il ajouté. Parce qu’il considère la baguette comme un marqueur à la fois social, culturel et économique, « il faut rassurer le consommateur sur ce produit. Nombre de nos clients sont aussi des agriculteurs », a glissé Michel-Edouard Leclerc. Pressé sur le sujet, et un brin agacé, il a fini par lâcher : « 30 % de variation prix du blé, c’est un centime sur une baguette. Arrêtons ce cinéma ». Le grand patron est également revenu sur la crise du Covid pendant laquelle « on a mangé n’importe quoi. On a dit que c’était le bio qui avait marché. Non, ce n’est pas vrai, c’est le snacking, on n’a jamais mangé autant de pâtes, riz, plats transformés. Maintenant, c’est passé, la pédagogie sanitaire est réinstallée dans la consommation des Français […] La transformation du modèle alimentaire français vers un modèle plus vertueux, c’est en marche », a-t-il assuré.
Christophe Soulard (Actuagri)