Grandes cultures
Goutte-à-goutte enterré : de l’eau économisée et du temps gagné

Ce début octobre en partenariat avec Valence Romans Agglo, la chambre d'agriculture de la Drôme a organisé une rencontre « Bout de champ » dédiée à l'irrigation avec du goutte-à-goutte enterré sur maïs et les économies d'eau possibles.

Goutte-à-goutte enterré : de l’eau économisée et du temps gagné
Lors de la rencontre « Bout de champ » sur le goutte-à-goutte enterré, organisée par la chambre d'agriculture de la Drôme en partenariat avec Valence Romans Agglo le 5 octobre à Mours-Saint-Eusèbe.

Le 5 octobre au matin, la chambre d'agriculture de la Drôme - en partenariat avec Valence Romans Agglo dans le cadre des captages prioritaires - avait donné rendez-vous à Mours-Saint-Eusèbe dans un champ cultivé par Michel Rozand. Une demi-journée sur le thème de l'irrigation en grandes cultures avec le goutte-à-goutte enterré et des économies d’eau possibles.

« Cette technique innovante est intéressante dans le contexte actuel de changement climatique et de moins d’eau disponible », souligne François Dubocs, conseiller spécialisé agronomie-irrigation à la chambre d'agriculture. Une fois en place, le goutte-à-goutte enterré exige une surveillance, un nettoyage du filtre à tamis mais pas de déplacements de matériel. « Les économies d’eau peuvent aller jusqu’à 30 %, ce qui est loin d’être négligeable ! Côté main-d’œuvre, on peut gagner jusqu’à une heure par jour par rapport à un enrouleur », signale le conseiller. Le dispositif est fixe, il n’y a pas de matériel à déplacer et l’irrigation peut être programmée à l’avance. « C’est un gros gain en temps de travail », ajoute-t-il.

Un système efficient

Le goutte-à-goutte enterré est efficient. En effet, la quantité d'eau apportée est répartie uniformément sur toute la parcelle, même sur les bords. Avec l’aspersion, les extrémités de champs sont insuffisamment arrosées ou, à l’inverse, sur-irriguées. En outre, « le principe des goutteurs autorégulants est intéressant dans les parcelles longues ou en pente car ils apportent la même quantité d’eau partout », poursuit François Dubocs, avant de mettre aussi en avant le système anti-bouchage : un mécanisme anti-syphon (une languette en silicone se ferme après irrigation) empêche racines, terre et autres débris d'entrer dans les tuyaux. Encore des atouts, le goutte-à-goutte évite les pertes d’eau liées à la dérive (vent) ainsi qu’à l’évaporation. La fertirrigation est possible. Et, question pérennité, le système « vieillit bien, a priori ».

Des précautions à prendre pour la pose

Le goutte-à-goutte enterré a toutefois quelques inconvénients, que relève François Dubocs. Une filtration est indispensable. Le coût est élevé (matériel, amenée d’eau, filtration). Le conseiller attire l’attention sur des précautions à prendre lors de la pose, vu que l’installation reste en place plusieurs années. Un bon décompactage est nécessaire, ainsi qu’un passage de sous-soleuse spécifique pour la mise en place. Le peigne (canalisation d’amenée de l’eau) doit être enterré assez profondément pour ne pas être détérioré par des outils de travail du sol. Il ne faut pas, non plus, labourer trop profond pour ne pas endommager le système d’irrigation. Autre problème, s’il y a besoin d’arroser pour faire lever une culture, le goutte-à-goutte enterré ne suffira par sur certains types de sols car l’eau ne remontera pas jusqu’aux graines. Par conséquent, dans ces cas-là, un autre système d’irrigation devra être utilisé. Quant à la pression à la borne, elle doit être d’au moins quatre bars (mais c’est moins qu’un enrouleur, qui en demande huit à neuf).

Aide à l’investissement

Dans le cadre de la mesure 4.15 du PDR* 2015-2020, un investissement dans du goutte-à-goutte enterré peut être subventionné. « On est en attente d’informations de la Région sur les dates, modalités, nouveaux formulaires pour 2021, signale François Dubocs. L’appel à candidatures n’est pas encore ouvert. » Le taux de l’aide appliquée aux projets individuels sélectionnés est de 40 % des dépenses éligibles sur les premiers 40 000 euros.

Annie Laurie

* PDR : Le programme de développement rural est financé par la Région, ainsi que l’Europe via le Feader (fonds européen agricole pour le développement rural).

Michel Rozand a adopté le goutte-à-goutte enterré
« Dans la mesure du possible, je continuerai à installer du goutte-à-goutte enterré sur d’autres parcelles », confie Michel Rozand.

Michel Rozand a adopté le goutte-à-goutte enterré

Michel Rozand, dont le siège de l’exploitation est situé à Romans-sur-Isère, irrigue du blé et du maïs avec une dizaine de pivots. Il a adopté le goutte-à-goutte enterré en 2014. Il s’en sert pour arroser les angles de trois parcelles irriguées avec des pivots. Cette année, il a équipé en goutte-à-goutte enterré quatre hectares de plus mais, cette fois-ci en totalité (pas seulement dans les angles). La raison : il n’y a pas de pression à la borne d’irrigation) sur cette parcelle, donc pas la possibilité de faire fonctionner un enrouleur. L’installation est enterrée à une profondeur de 45 centimètres. Les lignes de goutteurs sont espacées de 1,20 mètre. Et les goutteurs sont placés tous les 50 centimètres sur les lignes. L’investissement s’élève à 15 000 euros pour les quatre hectares, soit 3 750 euros par hectare. La mise en place par une entreprise s’élève à environ 3 000 euros à l’hectare mais le coût est très variable d’une parcelle à l’autre.

2 000 m³ d’eau au lieu 3 000

Sur la surface équipée en totalité cette année, Michel Rozand indique avoir consommé 2 000 mètres cubes d’eau à l’hectare, contre plus de 3 000 auparavant avec une couverture intégrale, soit une économie de 30 %. C’est aussi, pour lui, un gain en termes de main-d’œuvre, de déplacement.

Dans le goutte-à-goutte enterré, il voit plusieurs avantages : « Une économie d’eau, pas d’évaporation ; on n’arrose pas les routes, donc les riverains ne se plaignent pas ; une fois en place, il n’y a pas de travail si ce n’est de la surveillance »… Et comme inconvénients : « C’est du travail à l’installation. Le coût est supérieur à celui d’un enrouleur ». Mais « il a été réduit, avec l’aide du PDR à hauteur de 40 % de l’investissement », reprend Michel Rozand. Et de confier encore : « Dans la mesure du possible, je continuerai à installer du goutte-à-goutte enterré sur d’autres parcelles. »

A. L.