Trufficulture
Hughes Blachère : « Défendre  notre truffe et la différencier »

Vice-président du marché aux truffes de Saint-Paul-Trois-Châteaux, Hughes Blachère a créé en octobre 2020 l’association Artisans de la truffe noire 26-84 à Suze-La-Rousse, dont il est le co-président. Elle compte aujourd’hui une trentaine d’adhérents, tous prêts à défendre la qualité de la truffe du Sud-Drôme et de l’Enclave des Papes. Entretien.

Hughes Blachère : « Défendre  notre truffe et la différencier »
« Nous sommes attachés à donner à notre truffe un nom, une marque, un label. », explique Hughes Blachère, co-président de l’association Artisans de la truffe noire 26-84.

Dans quel contexte avez-vous créé l’association Artisans de la truffe noire ?
Hughes Blachère : « Vice-président du marché aux truffes de Saint-Paul-Trois-Châteaux aux côtés de Claude Paulin depuis une grosse dizaine d’années, nous avons créé un petit groupe de travail en 2018,  devenue association en 2020, après avoir pris conscience que notre filière trufficole était en danger. Aujourd’hui, elle a deux concurrents : les arômes naturels et la culture agro-industrielle étrangère. D’un côté, les arômes naturels sont un vrai poison que l’on voit fleurir dans de nombreux magasins. Ils habituent les consommateurs à un mauvais goût de la truffe. De l’autre, la production agro-industrielle en-dehors de nos frontières est un danger par rapport à notre production. Nos trufficulteurs sont avant tout des jardiniers de la truffe. Ces productions massives conduites par financiarisation du produit amènent les truffes sur notre territoire à environ 300 euros le kilo. A ce prix-là, notre filière trufficole locale n’est pas en capacité de vivre. L’idée de cette association est donc de sauvegarder un trésor de notre territoire avec comme valeur principale de préserver la qualité. »

Après plus d’un an d’existence, quels sont les objectifs de l’association ?
H. B. : « Nous voulons défendre notre truffe et la différencier des autres. Nous souhaitons la caractériser d’une manière littéraire en expliquant son histoire, en parlant de la transmission des exploitations et de la passion qui en découle, en présentant les truffières... Nous souhaitons également la caractériser de manière scientifique en mettant en avant ses qualités organoleptiques. De plus, nous envisageons de faire une analyse chimique par chromatographie en phase gazeuse qui consiste à déterminer les molécules qui sont porteuses d’arômes. Cela nous permettrait de créer une carte d’identité propre à notre produit du terroir. Enfin, nous sommes attachés à donner à notre truffe un nom, une marque, un label. Aujourd’hui, toute truffe présente en France s’appelle la Tuber Melanosporum - Truffe du Périgord. C’est le nom générique face auquel nous ne pouvons pas lutter. C’est pourquoi nous souhaitons lui donner un nom différent, de façon à permettre à notre filière d’exister et de résister à la pression étrangère ».

Justement, la concurrence étrangère est un frein au développement de la truffe française. Qu’en est-il concrètement ?
H. B. : « En France nous produisons environ une trentaine de tonnes de truffes par an. En Espagne, ce sont plus de 140 tonnes par an alors que ce pays n’a pas encore ni la gastronomie ni la culture de la truffe. Il n’en consomme pas. Les truffes espagnoles sont exportées et se répandent sur les marchés français, excepté celui de Saint-Paul-Trois-Châteaux, à des prix défiants toute concurrence. Malheureusement, la machine est en marche et nous ne pouvons pas contrer cela. C’est le pot de terre contre le pot de fer. Nous ne pouvons pas lutter donc notre but est de se mettre à côté pour que le rouleau compresseur de cette truffe financiarisée ne nous écrase pas et que notre produit du terroir garde sa qualité. » 

Propos recueillis par Amandine Priolet

Une charte éthique interne à l’association 

Une charte éthique interne à l’association 

 
« Tout trufficulteur qui souhaite adhérer à l’association Artisans de la truffe noire 26-84 doit s’engager à respecter une charte éthique interne à l’association », explique Hughes Blachère. Parmi les engagements à honorer, des conditions de production encadrées (aucun intrant, eau en petite quantité en cas de nécessité, etc.) dans un secteur géographique précis (les deux communautés de communes que sont Drôme Sud Provence et Enclave des Papes - Pays de Grignan et les communes avoisinantes). D’autre part, les trufficulteurs ont l’interdiction de vendre des truffes cavées de plus d’une semaine « afin de privilégier la vente de truffes fraîches et de qualité ». 
A. P.

Le bureau de l’association

Co-présidents : Hughes Blachère et Henry Davin.
Secrétaire : Hervé Jardin.
Trésorière : Virginie Simian.
Trésorière adjointe : Andrée Jovine.