Filière fruits
Pépinières Veauvy :  à la pointe de l’innovation

Riche d’un savoir-faire familial depuis quatre générations, les pépinières Veauvy, à Crest, s’attachent depuis plus de cent ans à garantir des arbres fruitiers de qualité, répondant aux besoins du marché.

Pépinières Veauvy :  à la pointe de l’innovation
Près de 450 000 arbres fruitiers – ici des pêchers - sont produits chaque année par les Pépinières Veauvy. (© Pépinières Veauvy)

Entreprise familiale de production d’arbres fruitiers à destination des professionnels de l’arboriculture, les pépinières Veauvy, riche d’une expérience centenaire, produisent chaque année 450 000 arbres de toute espèce (pommes, poires, abricots, pêches, nectarines, cerises, prunes et amandes) répartis sur 14 hectares à Crest. « La pépinière a été créée par mon arrière-grand-père, Alfred, expert agricole de formation, après avoir fait l’acquisition de la maison sur cette colline de Chantegrillet. La pépinière s’est formée tout autour et a su traverser les années, avec Marcel, mon grand-père, puis Hubert, mon père », explique Isabelle Veauvy-Vuillet, quatrième de la génération et aujourd’hui co-gérante aux côtés de son frère Jérôme. Les différentes générations de la famille ont toujours eu un attachement particulier au savoir-faire artisanal et à la recherche perpétuelle de la qualité. « Nous avons su conserver une identité historique en gardant une relation parfois très ancienne avec des clients. Ce sont des relations de partenariat historiques, des relations humaines. Comme nos clients, nous faisons un métier de producteurs : nous avons conscience que nous fabriquons leur outil de travail, d’où notre volonté de toujours leur proposer des produits de qualité », poursuit-elle. Les pépinières Veauvy commercialisent leur production uniquement aux professionnels basés partout en France, les particuliers n’étant pas leur cible de vente.
Pour rester à la pointe de l’innovation et dans un souci de qualité, Marcel Veauvy (le grand-père, ndlr) a fondé, en 1968 aux côtés de six autres pépiniéristes du sud-est de la France – et sous l’impulsion de Dominique Toulemonde -, la structure d’édition Star Fruits. « L’idée était de capter de l’innovation variétale pour pouvoir la multiplier dans la pépinière. Plus globalement, notre métier est complètement imbriqué dans le travail de recherche de créations variétales, avec un état d’esprit de filière », prévient Isabelle Veauvy-Vuillet.

Des démarches collectives pour protéger la filière

La création de démarches collectives est devenue – au fil des années - un enjeu majeur pour les pépinières Veauvy : « travailler collectivement permet non seulement de renforcer, mais aussi de protéger notre filière. Nous sommes le maillon d’un grand ensemble arboricole ».
Grâce au développement de Star Fruits, de nombreux programmes de recherches ont permis d’investir pour la filière : programmes d’hybridation, création d’une structure de commercialisation à l’export, etc. « Nous sommes une pépinière dans un réseau. Nous sommes complètement convaincus que nous n’y arriverons jamais tout seuls », assure la co-gérante.
D’autant plus que les dernières décennies n’ont pas été de tout repos pour la filière arboricole, la mettant en danger à plusieurs reprises. « Depuis ces vingt dernières années, c’est l’ensemble de la filière, tout un écosystème, qui a souffert. Nous devons faire face à des contraintes économiques, sociales, géopolitiques, climatiques, etc. L’agriculture est au cœur d’enjeux qui la dépassent. »
Les pépinières Veauvy ont subi de plein fouet les épisodes de grêle et de sécheresse intense avec les problématiques de l’irrigation, la crise de l’abricot et dorénavant celle de la pomme (la faute à une surproduction au niveau européen). « La pépinière subit toujours les soubresauts de la filière fruits et légumes », s’inquiète Isabelle Veauvy-Vuillet.

Jérôme Veauvy (responsable production et expérimentation) et Isabelle Veauvy-Vuillet (responsable du service commercial) - quatrième génération de la famille de pépiniéristes -, sont aujourd’hui à la tête des Pépinières Veauvy à Crest. 
(© Pépinières Veauvy)

Face à la baisse du nombre des arboriculteurs, les pépinières Veauvy mènent des stratégies simples : « l’idée première est surtout de ne pas surproduire et d’aller plutôt vers une diminution de la quantité produite, afin de maîtriser la production. Dans un deuxième temps, la diversification s’avère très importante : nous devons être multi espèces pour pouvoir répondre aux besoins du marché. Ce qui fait la complexité de notre portefeuille d’offres variétales fait aussi notre sécurité. Enfin, nous nous devons d’être toujours plus innovants et qualitatifs et d’être actifs sur les marchés commerciaux », note la responsable commerciale.

Des vergers de plus en plus techniques

L’innovation est toujours au centre des discussions de la filière arboricole. Et pour cause. Si le marché est en baisse, les vergers se modernisent davantage ces dernières années. « Les arboriculteurs attachent de plus en plus d’importance à la technicité. De ce fait, nous devons être assez innovants pour être pertinents, notamment en termes de choix de porte-greffes. Dans ce contexte, nous devons rester connectés au marché, dans une recherche permanente de création variétale », souligne-t-elle. Pour ce faire, les pépinières Veauvy abritent un verger expérimental pour les besoins de Star Fruits, sur des variétés nouvelles de fruits à noyau (pêches, nectarines, cerises et abricots). Ce verger permet ainsi d’améliorer l’expertise variétale et de communiquer sur l’innovation variétale.
D’autres essais agroécologiques sont menés au sein des pépinières Veauvy, et notamment sur les pratiques culturales en collaboration avec le Grab et le FiBL : bandes fleuries, enherbement des rangs, méthodes prophylactiques à base d’huiles pour limiter les intrants chimiques, matériels dotés d’intelligence artificielle pour maximiser l’efficacité des produits ou pour identifier les maladies, etc. 
Parmi les autres projets auxquels les pépinières Veauvy participent, celui de l’association Biovallée : « Re-use ». Ce dernier vise à mettre en œuvre une gestion innovante de réutilisation des eaux usées, afin d’en faire une ressource durable pour l’ensemble du bassin versant de la Drôme et ses activités. Car l’eau demeure un problème d’envergure pour le monde agricole, y compris pour les pépiniéristes. Isabelle Veauvy-Vuillet évoque notamment une mortalité des arbres en pépinière importante suite à l’épisode de sécheresse de 2022, et une prévision inquiétante pour la saison 2023. « Là encore, ce seront des efforts collectifs à consentir pour nous permettre de continuer à produire en France et maintenir une souveraineté alimentaire », conclut-elle.

Amandine Priolet