Vignes : comment rebondir après une période de gel ?
Comment produire des vins de qualité après le gel du printemps ? Entre perte de volumes, hétérogénéité des vignes et décalage des maturités, les défis pour le millésime 2021 sont nombreux.

Un nouveau coup dur pour les viticulteurs. Dans la nuit du 7 au 8 avril dernier, ils ont dû faire face à une gelée noire totalement exceptionnelle. « Ce gel printanier est arrivé très tôt en saison. De ce fait, les cépages à débourrement tardif ont été un peu épargnés, contrairement aux pousses », explique Benoît Planche, consultant viticole sur le secteur Hérault au sein du groupe ICV (services aux entreprises viti-vinicoles).
« À la suite de cet épisode, les températures sont restées fraîches ce qui a entraîné une reprise décalée à l’origine d’une forte hétérogénéité au sein des parcelles, avec environ deux semaines d’écart que l’on retrouvera au moment des vendanges », poursuit-il. Les dégâts sont intenses et les rendements attendus sont forcément en baisse. Face à une tendance moyenne de 18 grappes par souche (chiffres relevés entre 2011 et 2021), les premières estimations font état de 13 grappes par souche cette année. Comment faire face ? Quelles actions engager à la vigne et en cave pour produire des vins adaptés à la demande des marchés ? Tout d’abord, il est préconisé de maintenir un enherbement restreint sur les parcelles pour limiter la compétition hydro-azotée et consacrer ainsi tous les efforts sur la vigne. L’assurance d’un bon état sanitaire (lutte contre le ver de grappe, le mildiou et l’oïdium, le black-rot, etc.) est plus que jamais nécessaire. « Il est aussi recommandé de soutenir la croissance de la vigne par l’irrigation pour en tirer le meilleur parti », prévient Benoît Planche. Il peut également être envisagé, dans les vignobles à forte valeur ajoutée, d’éliminer les grappes trop en retard.
Concentrer les efforts sur la vigne
« Cette année, le mot-clé sera la sélection parcellaire. Classifier ses parcelles pour orienter et piloter les vendanges sera un acte essentiel car l’hétérogénéité est globalement défavorable à la qualité.
Les parcelles beaucoup trop hétérogènes sont à déclasser ». Des outils technologiques, de notations, cartographie, peuvent faciliter cette opération. Les contrôles maturité seront également indispensables, pour déterminer la date optimale de vendange. À ce titre, plusieurs actions sont à mener : prélèvement de baies, analyse de Glories pour les maturités phénoliques, etc. « Ce sera sans doute un millésime avec des vendanges un peu inhabituelles et des chantiers de taille plus longs et plus techniques que d’habitude », indique Benoît Planche. Si les évaluations au vignoble sont cruciales (niveau d’hétérogénéité, qualité des contrôles de maturité, etc.), le travail au chai aura également un rôle primordial. « La macération carbonique, par exemple, même si elle impose des contraintes de récolte manuelle et une bonne maîtrise microbiologique, permet de gommer le manque de maturité », soutient le directeur scientifique du groupe, Daniel Granès. « L’essentiel se joue dans les vignes et la capacité à segmenter les potentiels. Il faut passer du temps dans les vignes, même si les volumes au vignoble sont plus faibles que ce dont on a besoin », observe Daniel Granès. « Mais il ne faut pas oublier d’adapter son protocole en cave avec des stratégies d’évaluation du niveau d’équilibre de l’ensemble des raisins et des stratégies d’enrobage et de la gestion du potentiel tannique ».
Le directeur scientifique du groupe rappelle enfin la nécessité de se concentrer sur les turbidités, l’oxygène et les choix de biotechnologies pour faire face, au mieux, aux défis de ce millésime 2021.