État des cultures de blé et raisonnement du second apport d’azote
Dans la majorité des secteurs de la région, le blé a profité de conditions favorables à son implantation et à son développement pour atteindre le stade épi 1 cm. Il est temps de penser au deuxième apport d’azote.

La forte pluviométrie du début d’automne (de septembre à mi-octobre) et les récoltes tardives de cultures de printemps ont souvent retardé les semis de céréales, qui se sont majoritairement déroulés au cours de la dernière décade d’octobre et la première décade de novembre en Rhône-Alpes. Ces dates sont un peu plus tardives que la médiane pluriannuelle mais les conditions ont été favorables durant cette période dans la majorité des secteurs de la région, ce qui a globalement permis de bonnes implantations. Les semis très tardifs (après le 15 novembre) sont très peu nombreux cette année dans la région.
Un climat plutôt favorable depuis les semis
Les températures depuis les semis ont été légèrement plus douces que la normale, avec un cumul de températures depuis le 25 octobre supérieur d’environ 8 à 10 % à la médiane 20 ans, contre 30 % d’excédent de températures l’an dernier. Les semis les plus tardifs n’ont donc pas bénéficié de températures élevées propices à rattraper leur retard comme l’an dernier, mais bénéficient tout de même de bonnes conditions de développement. Le nombre de jours de gel rencontrés durant l’hiver 2024-2025 est très proche de la médiane sur 20 ans, alors qu’il était historiquement faible l’an dernier. La pluviométrie est globalement déficitaire de 10 à 35 % selon les secteurs de la région depuis le 25 octobre, mais elle avait été très excédentaire en septembre et début octobre, remplissant les réserves des sols. Les pluies ont tout de même été régulières depuis les semis et ont permis une bonne alimentation des cultures ainsi qu’une bonne valorisation du premier apport d’azote. Ce contexte climatique conduit à une atteinte du stade épi 1 cm très proche des dates médianes sur 20 ans. Ce stade a été atteint dès la première décade de mars dans la Drôme, où les variétés cultivées sont généralement précoces. En plaine de Lyon il est prévu entre le 15 et le 20 mars, puis entre le 20 et le 30 mars dans l’Ain selon les secteurs, les variétés et les dates de semis. Attention aux situations avec des sols engorgés en eau : cet engorgement refroidit le sol et tend à retarder l’avancée des stades. Sur ces parcelles il est important de vérifier le stade de la culture et d’adapter les interventions en conséquence, en attendant le ressuyage et le redémarrage de la culture pour apporter l’azote par exemple. Le stade « épi 1 cm » marque le début de la montaison. En deux mois, la culture passe d’environ 1 tonne à plus de 10 t de MS/ ha à la floraison. Elle va absorber 150 kg d’azote voire plus. Il est donc important d’accompagner cette croissance en apportant l’azote nécessaire.
Quelle dose apporter au second apport ?
La dose à apporter au second apport se calcule à partir de la dose calculée par la méthode du bilan (inscrite dans le plan de fumure), à laquelle on retranche la dose apportée au premier apport et la dose de « mise en réserve », à conserver pour le 3e apport. Attention, même en cas d’utilisation d’un outil de pilotage en fin de cycle (pince N-tester, pilotage par image satellite ou drone), une partie de la dose totale initiale doit être mise en réserve, et donc retranchée du second apport. Le conseil issu du pilotage ne s’additionne pas à la dose calculée par la méthode du bilan (et issue du plan de fumure).
Quand apporter le second apport d’azote ?
Dans les cas où le second apport n’a pas encore été réalisé, plusieurs options sont à envisager. Apporter la dose prévue du second apport en une fois, au plus proche du stade épi 1 cm, en visant une pluie. Fractionner cet apport en deux (pour une stratégie en quatre apports au total), en encadrant le stade épi 1 cm. Réaliser un apport de la moitié de la dose environ 10 jours avant le stade épi 1 cm, en visant une pluie, puis apporter la seconde moitié une dizaine de jours après l’épi 1 cm, toujours en visant une pluie. Cette stratégie est à privilégier lorsque la dose du second apport est élevée (fort potentiel, sols fournissant peu d’azote type graviers). Attention, en zone vulnérable la directive nitrates plafonne chaque apport d’azote à 100 unités maximum. Si la dose est supérieure, il faut fractionner en deux passages. L’efficience d’utilisation de l’azote par la plante en sera améliorée, avec des apports plus en phase avec les capacités d’absorption de la culture.
Dans tous les cas, il est indispensable de garder une mise en réserve à apporter en fin de cycle (entre dernière feuille étalée et gonflement), pour sécuriser à la fois le rendement et le taux de protéines. Dans nos essais, la stratégie « sécuritaire » en deux apports (au tallage et à épi 1 cm, sans apport de fin de cycle) obtenait systématiquement un rendement et un taux de protéines inférieurs aux stratégies en trois apports, qu’il s’agisse de contexte de production avec labour ou en agriculture de conservation des sols.
Ne pas oublier la fertilisation soufrée
Attention, la pluviométrie de l’automne et de l’hiver a été importante sur toute la région, entraînant potentiellement le lessivage du soufre présent dans le sol. Un apport de soufre de 30 à 50 unités est donc conseillé dans la majorité des situations, en particulier dans les sols pauvres en matière organique et ne recevant pas d’apport d’effluents. Cet apport, souvent combiné à un apport d’azote, est à réaliser avant le début de la montaison, donc au 2e apport s’il n’a pas été effectué lors de l’apport au tallage.
Pour plus de précisions sur la dose à apporter selon le contexte, consultez la « grille soufre arvalis » .
Ophélie Boulanger, ingénieure régionale Rhône-Alpes
Classement des variétés selon leur besoin en azote (coefficients b et bq11,5 %) en 2025
Toutes les variétés de blé n’ont pas le même besoin d’azote en fin de cycle pour atteindre le seuil de 11,5 % de protéines.
La dose d’azote à mettre en réserve pour le 3e apport pour chaque variété se trouve dans la colonne de droite. Cette dose est de 40 unités pour une grande partie des variétés, mais certaines, comme RGT Propulso ou KWS Ultim, largement cultivées dans la région, nécessitent de conserver 60 unités pour le dernier apport pour atteindre le seuil de 11,5 % de protéines.