Vent de fraîcheur sur les légumes
Gélifruit, entreprise de stockage et de surgélation de fruits de la vallée du Rhône, s’est lancée dans une activité de légumes. La chambre d’agriculture de l’Isère l’a distinguée dans le cadre du Prix de l’Excellence agricole et rurale.

Des fruits aux légumes, le pas a été franchi par Gélifruit en 2023. L’entreprise de stockage et de surgélation de fruits basée à Chanas a mis son savoir-faire au service d’un marché et de producteurs locaux. Créée en 2006, l’entreprise est une SAS détenue en totalité par une vingtaine d’actionnaires agriculteurs. En 2008, elle s’est installée dans son propre bâtiment puis a procédé à deux extensions, en 2012 et 2023. Le récent agrandissement de 400 m2 de l’atelier de production a permis à cette entreprise de 23 salariés en équivalents temps plein (dont 13 CDI) de mettre en place l’activité de préparation de légumes. Elle réalise un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros, en évolution.
Le métier d’origine de Gélifruit est d’approvisionner les industriels du secteur, notamment les grands confituriers, en produits frais tout au long de l’année. Le segment est celui du fruit français transformé en France. « Un client achète des fruits à un producteur qui livre et stocke à Gélifruit après surgélation », décrit Luc Armanet, le président de Gélifruit. La production annuelle est de 2 500 tonnes de fruits stockés dans 24 000 m3 de chambres froides. « Nous ne faisons pas de commerce, mais uniquement de la prestation », insiste le président. Il ajoute : « Nous ne refusons aucun producteur local. L’outil de base a été créé pour cela. Nous gérons beaucoup de flux logistiques. Notre savoir-faire, c’est de s’adapter et de moduler en fonction de la demande du client. »
Des prix rémunérateurs
Concernant les légumes, les choses sont un peu différentes. « C’est un projet que nous avons démarré il y a trois ans et qui s’étoffe. C’est un axe de diversification qui répond à un besoin local », souligne Luc Armanet. En 2024, cette nouvelle activité d’achat, de préparation et de revente de légumes a traité 200 tonnes de productions locales, majoritairement de maraîchers isérois, mais aussi drômois. « Les producteurs sont de vrais partenaires. Nous leur payons le prix demandé et nous revendons aux cuisines centrales, à Guillaud traiteur qui travaille pour la restauration collective et à l’hôtel du Département. Les producteurs sont fidèles et satisfaits. Ils produisent du volume et ont des prix rémunérateurs. » L’entreprise compte une dizaine de fournisseurs mais peut en prendre davantage, à condition qu’ils soient locaux, en agriculture biologique ou pas.
Gélifruit s’engage sur un volume et un prix. Les légumes sont livrés en vrac pour être lavés, préparés, surgelés et mis en carton dans l’atelier. Ils sont étiquetés au nom du producteur pour des raisons de traçabilité et pour être valorisés. Si les prix pratiqués sont un peu plus élevés qu’en moyenne sur ce genre de marché, l’entreprise le justifie. « Nos clients communiquent sur la démarche. Nous vendons une histoire. Il y a des gens derrière. Ce ne sont pas des anonymes qui produisent. Nous les connaissons et ils nous font confiance. Ce sont des personnes dont on voit les champs, qui sont acteurs du paysage, que l’on croise sur les routes, qui font vivre des villages et qui sont là pour les années à venir. Il faut les faire connaître. » Depuis que Gélifruit a lancé cette nouvelle activité, Luc Armanet découvre en même temps nombre de jeunes producteurs « prêts à remettre en cause et à valoriser leurs productions car cela a du sens pour eux d’approvisionner le consommateur en local ».
Des investissements
Pour accompagner son développement, en fruits comme en légumes, Gélifruit a donc procédé à différents investissements. L’extension de l’atelier lui permet d’accueillir de nouvelles machines : chaudières, trancheuses, brosseuses... pour un montant de 300 000 euros aidé à hauteur de 40 % par le Feader*, France relance et le Département de l’Isère dans le cadre du plan alimentaire territorial. Les légumes transformés sont les courgettes, aubergines, carottes, choux-fleurs, potimarrons et oignons. D’autres, comme la tomate, sont en cours d’essais. En revanche, des légumes comme les poireaux ou les haricots, difficiles à transformer, ou les pommes de terre, parce qu’il faut les précuire, n’entrent pas dans la gamme de Gélifruit.
Le soutien de la chambre d’agriculture
La mise en place de cette nouvelle activité s’est opérée avec le soutien de la chambre d’agriculture de l’Isère et du Département. « Nous travaillons tout le temps avec eux. Ils nous suivent et nous construisons le projet ensemble. C’est un développement important pour la chambre d’agriculture et pour les producteurs. C’est un outil d’aide à la diversification », explique Anna Bourget, responsable de production. La communauté de communes Entre Bièvre et Rhône est aussi partie prenante.
Luc Armanet confie enfin que les projets ne s’arrêtent pas là puisque le Département, avec le Pôle agroalimentaire et dans le cadre du développement de la marque IsHere, souhaite élargir les légumes surgelés aux marchés des grandes surfaces et des particuliers. Cette initiative économique a été distinguée par la chambre d’agriculture de l’Isère, qui a remis aux actionnaires de Gélifruit le trophée du développement de gamme dans une démarche collective, dans le cadre du Prix de l’Excellence agricole et rurale, organisé en septembre 2024 à Beaucroissant par le journal Terre Dauphinoise.
Isabelle Doucet
* Feader : Fonds européen agricole pour le développement rural.
La chaîne du froid

Livrés par les producteurs, les fruits et légumes arrivent en pallox sur les quais de l’entreprise. Ils sont identifiés et placés dans les chambres de froid positif, entre 4 et 8°, pour ensuite passer en production et en surgélation. Le froid est produit selon un process générant peu de gaz à effet de serre, avec du CO2 et du NH3, et permettant de récupérer de l’énergie. Les fruits et légumes traversent ensuite différentes machines selon le type de transformation souhaité : peler ou trancher les fruits et légumes (en rondelles ou en cubes), blanchir les légumes à la vapeur, dénoyauter, oreillonner les abricots, trieurs laser pour repérer les défauts... Puis ils passent dans un gros surgélateur
- sorte de tapis roulant de refroidissement sur plusieurs niveaux - d’où ils ressortent à -20 ou -25 °C. Ils sont alors prêts pour être conditionnés et stockés en froid négatif à -20 °C.
L’extension de l’atelier permet de traiter deux productions spécifiques séparément.
I.D.