« Les Meuh du 39 » en route  pour le Rallye des Gazelles

«Une nuit à deux heures du matin, j’ai envoyé un SMS à Sandy pour lui parler du Rallye des Gazelles, et nous avons décidé de tenter l’aventure », se souvient Fanny Ducrey.  Créé en 1990, le Rallye Aïcha des Gazelles est une épreuve à part. Sur neuf jours et six étapes, dont deux marathons, 190 équipages féminins doivent relier des points de contrôle en hors-piste en utilisant uniquement des cartes, une boussole et une règle de navigation. Le GPS et le téléphone sont interdits. « Nous n’avons le droit qu’à deux mails par jour », précise Fanny.  Le classement ne récompense pas la vitesse, mais le plus petit kilométrage parcouru en pointant un maximum de balises. « Ce rallye met en avant l’orientation et l’entraide. Des pénalités sont appliquées aux concurrentes qui ne s’arrêtent pas lorsqu’une autre a besoin d’aide », souligne Sandy.

Un rallye écoresponsable et solidaire

Il s’agit également d’une épreuve sportive humanitaire. Chaque équipage parraine l’association de son choix. « Nous avons choisi d’avancer notre participation à 2026, car ce sera la 35e édition avec une enveloppe spéciale de 10 000 € pour l’association partenaire du lauréat », raconte Fanny.
Les deux jeunes femmes ont choisi de soutenir SOS Préma, une association qui accompagne les parents d’enfants prématurés, une difficulté que toutes les deux ont connue. « Ce n’est pas simple d’être confrontés à la prématurité. Heureusement que des associations comme SOS Préma existent. Elles permettent aux parents de rester près de leurs enfants et apportent un soutien matériel et psychologique. Avant de les connaître, je faisais un aller-retour à Lyon chaque jour… », témoigne Sandy.
Chaque participante consacre, en plus, une journée à la caravane médicale « Cœur de Gazelles », qui monte des dispensaires temporaires le long du parcours. Plus de 93 000 personnes ont ainsi été soignées depuis la création de l’événement. Les déchets générés sont collectés et recyclés – les plastiques sont réutilisés pour rénover des écoles –, et des palmiers dattiers sont plantés pour constituer une palmeraie solidaire. L’ensemble est certifié ISO 14001.

“ Les Meuh du 39  ” aux couleurs du Jura

Sous le nom d’équipe « Les Meuh du 39 », clin d’œil à leur ancrage agricole, Fanny et Sandy entendent afficher leur département et ses valeurs. « Notre force, c’est notre mental et notre détermination. Même dans les moments compliqués, nous saurons nous soutenir mutuellement. Et en cas de petit coup de mou, nous aurons du comté dans la glacière pour nous rebooster et avoir un peu de Jura avec nous », plaisantent-elles.
Leur participation représente aussi un moment de respiration. « Le mois de mars est une période plus calme à la ferme. Mon mari pourra s’en occuper seul, les bêtes commencent à sortir, la période de fenaison n’a pas encore commencé », explique Fanny. Sandy, en congé parental jusqu’en avril, envisage de se réorienter ensuite vers des soins à domicile, « avec plus de contact et de valeur humaine qu’en Ehpad ».

37 000 euros et un 4x4 tout-terrain

Pour participer, il leur faut réunir environ 37 000 euros. Le véhicule a été acheté par le mari de Fanny, sur ses fonds propres : un Nissan Patrol YGI de 1999. L’ancien propriétaire faisait du franchissement et du trial avec, il est donc déjà équipé tout-terrain. Après le rallye, il servira aux travaux des champs. 
Mais pour pouvoir participer, il leur reste encore près de 22 000 euros à trouver. Certaines entreprises locales, comme la fromagerie d’Arinthod où Fanny livre son lait, ont déjà répondu présentes et fait un don sans contrepartie. Les particuliers peuvent aussi s’impliquer : « À partir de 30 euros, nous inscrirons le prénom du donateur sur la voiture. Le flocage des t-shirts et gilets est déjà réservé, mais tous les emplacements sur le véhicule sont encore disponibles », précisent-elles. Dans leur dossier sponsors, elles détaillent les formules de partenariat allant de 100 à 28 000 €, avec logos sur les casques ou la carrosserie et des animations personnalisées dans les entreprises. Les sponsors disposeront d’un lien pour suivre le rallye en temps réel sur internet. Il sera aussi retransmis à la télévision sur les chaînes M6 et W9.
Pour compléter leur budget et faire connaître leur projet, Fanny et Sandy multiplient les initiatives. Vente de crêpes et de gaufres sur les marchés, brioches et tombolas, organisation d’une soirée à thème… tout est bon pour collecter des fonds. Elles ont aussi imaginé des « goodies » aux couleurs des Meuh du 39 : t-shirts, mugs, autocollants, porte-clés ou encore tote-bags qu’elles proposent sur diverses fêtes agricoles. Elles tenaient ainsi un stand lors de la finale départementale de labours. « C’est une manière conviviale d’associer les habitants et les entreprises à notre aventure, et chaque euro récolté nous rapproche du désert marocain », expliquent-elles. « Et si nous dépassons la somme nécessaire, tout le surplus sera intégralement reversé à SOS Préma ».

Stages de navigation, mécanique et départ local

En attendant le grand départ officiel, prévu le 27 mars 2026 à Monaco, les deux Jurassiennes s’entraînent. Elles doivent suivre un stage d’orientation pour apprendre à manier boussole et compas puisque le GPS est interdit, et un autre de conduite. Quant à la mécanique ? « Mettre les mains dans le cambouis ne nous fait pas peur. Avec la ferme, on n’a pas le choix, j’ai déjà les bases », sourit Fanny. L’assistance est assurée chaque soir, mais les organisateurs demandent aux équipages de connaître les gestes essentiels. Avant de rejoindre Monaco, elles organiseront un départ local « au milieu des bottes de paille, avec nos familles, amis et sponsors ». Et même si elles ne terminent pas premières, elles entendent profiter pleinement de l’expérience. 

S.C.

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