Abeilles ou néonicotinoïdes : des parlementaires appellent à choisir

Une quarantaine de parlementaires ont lancé le 24 juin un appel pour l'interdiction de tous les néonicotinoïdes. « Nous, députés et sénateurs, appelons nos collègues de l'Assemblée et du Sénat à voter l'interdiction de tous les néonicotinoïdes sur l'ensemble du territoire français à partir du 1er janvier 2016 », indique le texte cosigné par une majorité d'élus de gauche (PS et EELV), mais aussi de l'UDI (Bertrand Pancher, Chantal Jouanno notamment) ou Nathalie Kosciusko-Morizet (LR). Cet appel a été formellement lancé le 24 juin lors d'un forum à l'Assemblée au cours duquel syndicats d'apiculteurs et ONG ont témoigné, et les scientifiques fait part des connaissances sur l'interaction entre néonicotinoïdes et abeilles. L'interdiction totale des néonicotinoïdes au 1er janvier 2016 a été votée en 1ère lecture à l'Assemblée en mars dans le projet de loi biodiversité. « Les industriels ne devraient pas sous-estimer le rejet par la population d'un comportement de maximisation du profit, qui s'accompagne d'un discours trompeur tant sur l'innocuité des néonicotinoïdes que sur l'absence d'alternatives », a déclaré lors du forum le député PS Jean-Paul Chanteguet, président de la commission développement durable de l'Assemblée.
« L'interdiction des néonicotinoïdes créerait des difficultés »
Cette mesure est proposée alors qu’aucune solution alternative n’a encore été trouvée, s'inquiète la FDSEA de la Drôme. Elle redoute des difficultés et des distorsions de concurrence pour certaines filières. « C’est particulièrement vrai pour les cultures légumières où les impasses techniques en matière de protection sanitaires sont nombreuses », indiquent Didier Beynet, président de la FDSEA de la Drôme, et Serge Guier, président de la section légumes de la fédération. Dans un courrier adressé le 19 juin aux parlementaires drômois, « nul doute que les industriels et consommateurs se désintéresseront des légumes français et drômois au profit des produits de nos voisins européens exempts de pucerons et autres ravageurs, écrivent-ils. Certes, en légumes, les substances actives de la famille des néonicotinoïdes qui sont autorisées (acétamipride, thiametoxame, thiaclopride) ne représentent que 15 % des usages. Cependant, s’ils sont interdits, les producteurs devront faire face à de nouvelles impasses techniques. Cela serait d’autant plus injustifié pour la Drôme lorsque l’on considère qu’elle est également le premier département rhônalpin engagé dans des démarches de qualité. »
Préserver la compétitivité
Par ailleurs, s'agissant de la préservation des abeilles et autres insectes pollinisateurs, Didier Beynet et Serge Guier font remarquer qu'il n'y a pas de floraison à proprement dit sur de nombreuses cultures légumières (salades, poireaux, choux, etc.). Ils citent également l’ail dont les fleurs sèchent avant de s’épanouir et sont supplantées par les bulbilles ou encore les asperges, qui sont récoltées avant toute floraison.
D'un point de vue économique, ils rappellent que la Drôme est le premier département producteur de légumes en Rhône-Alpes (2 357 ha en 2010 soit un tiers de la surface maraîchère régionale). A l'échelle nationale, bien que les cultures légumières ne représentent que 0,71 % de la surface agricole française, les légumes frais représentent 8 % de valeur à la production. Ils rappellent aussi que cette filière occupe 11 % des salariés permanents agricoles. « Une réduction des surfaces cultivées en légumes se traduirait inéluctablement par une importante perte d’emplois », préviennent-ils. Aussi, la FDSEA juge « indispensable » la suppression des deux dispositions du projet de loi biodiversité relatives aux néonicotinoïdes, ceci « pour préserver la compétitivité des entreprises de production et les emplois associés ».