Aménagements des bâtiments d’élevage : s’appuyer en priorité sur l’existant
Installer des ouvertures dans les parties basses du bâtiment, isoler la toiture, créer des ombrages et des espaces de rafraîchissement… Les techniciens des conseils élevage se mobilisent pour apporter aux éleveurs des solutions simples et de bon sens afin de lutter contre les canicules.

C’est grâce à l’installation de caméras vidéo dans les stabulations que le groupe des spécialistes nutrition et comportement animal des conseils d’élevage en Auvergne Rhône-Alpes ont pu déterminer avec précision l’emploi du temps des vaches laitières*. « C’est ainsi que nous avons pris conscience des conséquences du stress thermique en constatant que les vaches qui ont trop chaud, restent perchées, inactives. Conséquences, elles ne mangent pas, maigrissent, se fatiguent, développent des problèmes d’aplomb et voient leur immunité baisser », détaille Alexandre Batia, de Rhône Conseil Elevage. La station perchée est un signe d’inconfort de la vache. C’est le cas lorsqu’une vache est debout dans sa logette, avec les deux pattes postérieures dans le couloir : elle est en position perchée.
Dans le bâtiment de l’élevage de Duerne (Rhône), à la base du pan côté nord, des ouvertures ont été aménagées. Grâce à des volets, elles peuvent être fermées ou ouvertes selon la saison. ©A. Batia
Aménagements pour 70 vaches laitières
Alexandre Batia évoque les aménagements entrepris par un éleveur de 70 vaches laitières à Duerne (Rhône) au cours de l’hiver 2019-2020 suite à un été caniculaire qui a impacté lourdement sa production. Dans sa stabulation, une caméra vidéo a été installée ainsi qu’un capteur THI (index de température et d’humidité). Lors des relevés, en juillet 2019, la température extérieure était de 38,3 °C. Dans la stabulation, sous les translucides, elle s’élevait à 54 °C, la température corporelle des vaches avait atteint 38,9 °C. Face à ces constats, en concertation avec son technicien du conseil élevage, l’éleveur a opéré des aménagements dans son bâtiment.
Pour optimiser le confort du couchage, l’éleveur a fait l’acquisition de matelas qui garnissent désormais les logettes et sont recouverts de 3 kg de paille. Afin d’augmenter la ventilation naturelle, il a aménagé des ouvertures dotées de volets qui s’ouvrent ou se ferment selon la saison. Ces « fenêtres » sont situées, côté nord, à la base du bâtiment, en tête de logettes. Ainsi, les vaches couchées sont rafraîchies par le courant d’air mesuré à 3,2 m/s. Pour favoriser la thermolyse des animaux, les parties les plus basses du toit (pan sud) ont été isolées avec des panneaux sandwich qui permettent, là encore, de faire baisser la température ambiante à 24 °C. Alors que les relevés effectués entre les plaques de fibrociment et les panneaux isolants affichaient 56 °C !
Les vaches prennent une douche
Sur le paddock extérieur où elles stationnent deux fois par jour, pendant le paillage, les vaches prennent une douche. En été, elles bénéficient même d’un rafraîchissement, quatre fois par jour, sans que l’humidité n’augmente à l’intérieur du bâtiment. Sur le même espace, en période de canicule, un abreuvoir supplémentaire a été rajouté portant les longueurs d’abreuvement de 7 à 12 m. Enfin, l’éleveur a décidé de peindre les translucides avec de la peinture blanche à la chaux. Celle-ci ne diminue pas la luminosité, mais coupe le rayonnement solaire qui va, en particulier, chauffer la ration. Petite astuce, l’éleveur conseille de peindre les translucides à l’intérieur du bâtiment. Juché sur son télescopique, il a pu le faire en toute sécurité. Cela permet aussi de garantir la pérennité de la peinture qui est à l’abri des intempéries et reste accessible au nettoyage.
Avec caméras et capteurs
Dans la Loire, un élevage de 100 vaches, situé à 900 m d’altitude, a participé à l’expérience avec caméras et capteurs. « C’est ainsi que les associés du Gaec ont pris conscience que, même à cette altitude-là, le troupeau hébergé dans un bâtiment traditionnel souffrait de stress thermique, indique Louka Joassard, de Loire Conseil Elevage. Ils ont décidé d’engager d’importants investissements pour améliorer le bien-être animal dans leur élevage. A la suite d’un fort épisode de grêle, les éleveurs ont entrepris de restaurer la couverture en installant un toit en bac acier avec faîtage reprise d’écaille. Il est doté d’une isolation de 40 mm d’épaisseur. Dans le même temps, ils ont enlevé les translucides. »
Le contrôle de la circulation de l’air dans le bâtiment avec un fumigène a révélé une mauvaise extraction. Ce test a conduit les associés à installer un mur latéral gonflable. Doté d’une sonde thermique, le mur se baisse ou se lève suivant la température, le vent et l’humidité. Situé le long du couloir de distribution, il fait face (côté logettes) à un nouveau pan en tôles perforées en remplacement d’un bardage, ceci a permis d’augmenter encore de 30 % les entrées d’air.
Bardages bois coulissants
Dans la Drôme, un élevage de 120 laitières à Saint-Michel-de-Savasse a aussi pris part à l’expérimentation. « Les caméras et capteurs installés dans le bâtiment d’élevage de l’exploitation ont permis de cartographier de larges zones de stress sévères, en raison de températures élevées, d’une humidité relative de 46 % et d’une vitesse d’air faible de 0,68 m/s », détaille Yannick Blanc de Drôme Conseil Elevage. Face à ce constat, les associés du Gaec ont aménagé des ouvertures au nord en installant des bardages bois coulissants. Ils ont également procédé à l’isolation du toit. « Ces aménagements ont apporté des améliorations sensibles au niveau de l’ambiance au sein du bâtiment et du comportement des animaux », poursuit Yannick Blanc.
En Isère, à Mottier, dans un élevage de 110 laitières, on a misé sur l’amélioration de la ventilation en enlevant le bardage côté couloir d’alimentation, afin d’apporter de la vitesse de déplacement d’air.
Magdeleine Barralon
* Note d’état de forme 2.0 (NEF 2.0) : l’analyse scientifique des données de confort, de santé et de bien-être animal. Les experts nutrition de la Fidocl et d’Optilait, épaulés par l’analyse scientifique de VetAgro Sup, ont enquêté et recueilli des données de confort, de santé et de bien-être animal mettant en lumière de nouvelles notions sur le cycle de vie et l’emploi du temps optimum des vaches. Ce projet de R & D financé par la Région Auvergne Rhône-Alpes (dispositif Pepit) s’est focalisé dans un premier temps sur les bâtiments logettes. Cette expérience s’est déroulée de juin à août 2019 puis de décembre à février 2020.