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Actes de malveillance

Atteintes au monde agricole : un dispositif de lutte exceptionnel

Une cellule pluridisciplinaire de lutte contre les atteintes aux biens des agriculteurs vient d'être mise en place dans la Drôme, « Demeter 26 ». Objectif : rassurer les agriculteurs, stopper la série d'incendies et interpeller le(s) auteur(s).
Atteintes au monde agricole : un dispositif de lutte exceptionnel

Après les incendies de bâtiments agricoles à Geyssans, Parnans et Montoison les 22 et 23 novembre, un dispositif exceptionnel a été mis en place dès le 26 pour lutter contre les atteintes aux biens des agriculteurs dans la Drôme. « La Drôme est département pilote dans la lutte contre les actes de délinquance et de malveillance touchant des exploitations agricoles », a annoncé le préfet Hugues Moutouh, le 29 novembre, lors d'une conférence de presse. Juste avant, s'étaient tenues deux réunions. La première interne aux services de l'Etat, avec les force de l'ordre, la DDT et la DDPP, en présence du procureur de la République, pour faire un point. La seconde ouverte aux représentants agricoles et parlementaires pour leur présenter le dispositif Demeter 26.

Demeter 26, une cellule interservices

Le colonel Christophe Deshayes, commandant du groupement de gendarmerie de la Drôme, a expliqué : « Demeter 26 est plus qu'une cellule d'enquête. C'est une cellule intégrée et pluridisciplinaire de lutte contre les atteintes au monde agricole. » Elle regroupe dix militaires : des enquêteurs judiciaires, un analyste renseignement, un référent sûreté spécialiste de la prévention, un technicien en identification criminelle (constatations sur les lieux des délits), un technicien en nouvelles technologies (pour recherche d'éventuelles revendications sur les réseaux sociaux). L'objectif est triple : « rassurer les agriculteurs, stopper cette série mortifère, interpeller le (ou les) auteur(s) ». Outre cette cellule, des contrôles coordonnés des personnes et véhicules sont opérés la nuit « sur les lieux les plus sensibles et aux horaires les plus adaptés ». Et, en journée, les brigades vont au contact des agriculteurs pour leur apporter écoute, conseils dans la sécurisation de leur exploitation et faire remonter des renseignements. « Demeter est le bras armé du dispositif », a noté le colonel. « C'est la dernière pièce maîtresse du dispositif », a ajouté le préfet.

« La Drôme est département pilote dans la lutte contre les actes de délinquance et de malveillance touchant des exploitations agricoles », a annoncé le préfet Hugues Moutouh, le 29 novembre, lors d'une conférence de presse.

Des services de l'Etat « déterminés et mobilisés »

Dans la lutte contre la délinquance, « il n'y a pas de lutte prioritaire ; les agriculteurs qui vivent en milieu rural ont les mêmes droits que les citadins, a noté le préfet. « Cette nouvelle organisation est le symbole de la détermination et de la mobilisation des services de l'Etat. L'objectif prioritaire est de mettre fin à la multiplication des actes de délinquance à l'encontre des exploitations », a-t-il repris, avant d'indiquer qu'il venait d'apprendre la destruction à la masse de bornes d'irrigation dans des champs. « Dans le climat actuel de haine, défiance », les services de l'Etat se mobilisent « pour assurer la sécurité et la tranquillité des agriculteurs, qui ont suffisamment à faire avec les aléas climatiques. »
Le procureur de la République, Alex Perrin a appuyé : « C'est devenu une priorité judiciaire, pour que le milieu agricole puisse travailler dans des conditions de sécurité et de paix ». Il constate une accélération des passages à l'acte avec cette série d'incendies « clairement criminels ». Et de rappeler l'installation d'un comité de vigilance en avril dernier puis la signature d'une convention de partenariat pour la sécurisation des exploitations agricoles entre le préfet, le groupement départemental de gendarmerie, la direction départementale de la sécurité publique, la chambre d'agriculture, la FDSEA, les Jeunes Agriculteurs et la fédération de la chasse de la Drôme.
Sur ces affaires, « on est extrêmement mobilisés, a-t-il assuré. On met les moyens techniques nécessaires afin que les enquêtes prospèrent, qu'on réussisse à identifier et interpeller le (ou les) auteur(s) des faits. L'objectif est d'élucider ces affaires et faire en sorte qu'elles ne se renouvellent pas dans l'avenir. » Il demande aux agriculteurs d'être attentifs à ce qui se passe sur leur exploitation et celle de leurs voisins mais n'attend pas d'eux une mobilisation active : « On est sur une position utile pour aider les enquête et non pour créer une tension supplémentaire ».

Le monde agricole s'interroge

Dans le monde agricole, ces incendies suscitent inquiétude et interrogations. « Des actes volontaires d'une telle cruauté dépassent toutes les barrières imaginables, a confié le président de la chambre d'agriculture de la Drôme, Jean-Pierre Royannez. Nous faisons une grande confiance aux services de l'Etat et au procureur. Faire savoir que tous les moyens sont mis en œuvre évitera l'escalade et des drames. Les agriculteurs sont plus vigilants. Ils surveillent en préventif. Mais les tours de garde ne sont pas de notre rôle. » Il a espéré que les enquêtes avanceront vite et que le (ou les) criminel(s) sera(ont) interpellé(s). « Ces actes criminels sont déplorables. Je suis glacée », a dit Sandrine Roussin, vice-présidente de la chambre d'agriculture et de la FDSEA. « Ça fait froid dans le dos. Qu'est-ce qu'on a fait pour mériter ça ? », se demande Benjamin Aubert, secrétaire général des Jeunes Agriculteurs, qui a dit la grande incompréhension des agriculteurs. « C'est très compliqué aujourd'hui, mentalement, pour nous tous. » Tous trois ont salué la mobilisation des services de l'Etat.

Annie Laurie

Le point sur les enquêtes

« On peut dire que ces incendies sont criminels, volontaires. Mais ils ne sont pas revendiqués, a indiqué le colonel Deshayes, commandant du groupement de gendarmerie de la Drôme, le 29 novembre. On travaille à 360 degrés. On étudie toutes les pistes, en fermant les portes les unes après les autres. Cela demande du temps, il ne faut pas avancer trop vite. »
Trois faits ont eu lieu en Drôme des collines et Isère. « L'unité de temps et de lieux interpelle », a commenté le préfet. « On est sur un périmètre et un temps limités mais toutes les possibilités sont examinées », a précisé le procureur de la République, Alex Perrin.

 

Autres dispositifs
Le réseau Vigi Agri 26 participe à la sécurité des exploitations agricoles. Dès qu'un agriculteur signale par un appel au 17 la commission ou la tentative de commission d'un méfait à la gendarmerie ou la police, celles-ci diffusent un message d'alerte par SMS collectif. Le message décrit synthétiquement les faits constatés, le lieu de commission, les modes opératoires succincts et le nombre potentiel d'auteurs. Depuis les incendies criminels de cette fin novembre, le nombre d'agriculteurs inscrits à Vigi Agri 26 a bondi, passant de 25 à plus de 120.
La facilitation de l'accès à la pré-plainte en ligne est toujours en place. Les agriculteurs victimes d'atteintes aux biens peuvent y recourir sur le site https://www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr.