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Visite de terrain

Au domaine Raspail : première plantation résistante au mildiou et à l’oïdium

Au programme de la journée bio du 6 avril, une visite au domaine Raspail à Saillans. Echanges sur les pratiques culturales dans le vignoble du Diois afin de limiter les traitements cuivre et soufre, et présentation des quatre cépages résistants à l’oïdium et au mildiou créées dans le cadre du programme Resdur1.

Au domaine Raspail : première plantation résistante au mildiou et à l’oïdium
Frédéric Raspail a expliqué que, depuis son installation en bio en 1997, il a divisé par trois son utilisation de cuivre.

Le vigneron Frédéric Raspail, en compagnie de Julien Vigne, conseiller viticulture à la chambre d’agriculture de la Drôme, a accueilli dix visiteurs dans son caveau. Dès les premiers échanges, une préoccupation partagée s’exprime : « On se passerait tous des traitements au cuivre notamment, si c’était possible. La psychose vis à vis des phytosanitaires est sensible chez les consommateurs et les riverains de nos parcelles ». Frédéric Raspail précise que depuis son installation en bio en 1997, il a divisé par trois la quantité de cuivre épandue sur ses 15 hectares. « L’expérience et un climat plus sec nous permettent de réduire les doses en intervenant rapidement au bon moment, et les pulvérisateurs ont évolué. Je travaille de moins en moins le sol, quatre à cinq passages d’interceps par an suffisent, je laisse une bande enherbée et j’apporte régulièrement du fumier composté en mars pour favoriser l’autodéfense de la vigne. J’utilise aussi des décoctions de prêle et des huiles essentielles d’agrumes quand la pression n’est pas trop forte », explique le vigneron. Comme ses voisins, il multiplie épamprages, effeuillages, rognages en période chaude. Et pour mieux estimer les risques mildiou, Julien Vigne conseille de s’appuyer sur le bulletin Zoom Clairette de Die diffusé par la chambre d’agriculture.

250 ceps de Floréal

Pour réduire encore l’utilisation d'intrants de protection des cultures, par conviction et/ou respect des normes à venir, les marges de progression devenant moindres, les vignerons s’intéressent de plus en plus aux nouveaux cépages résistants au mildiou et à l'oïdium (voir encadré). Ils peuvent notamment permettre de créer une ceinture de parcelle à proximité d’habitations, de rivière, etc. L’an dernier, Frédéric Raspail a planté 250 ceps de Floréal, l’une de ces quatre variétés résistantes, au long d’une maison voisine. Il avait dégusté ce cépage voilà deux ans au Sitevi.

«J’utilise aussi des décoctions de prêle et des huiles essentielles d’agrumes quand la pression n’est pas trop forte» a expliqué le vigneron

Comme lui, d'autres vignerons dans la Drôme et en France ont planté ces variétés résistantes pour produire en IGP à plus grande échelle. « Pour la prochaine vendange, on commencera à avoir des volumes conséquents au niveau national », indique Julien Vigne. Lors de la présentation du programme Resdur, le conseiller a expliqué qu’il faudra une génération pour remplacer les plantations, alors que les AOC ont également lancé leurs programmes de recherche et veulent évaluer les intérêts organoleptiques des futures nouvelles variétés.

Louisette Gouverne

Cépages résistants : expérimentation nationale et drômoise

Depuis la domestication de la vigne, les hommes ont cherché à améliorer les cépages et créé de nouvelles variétés, en utilisant la sélection clonale (bouturage) ou bien la reproduction sexuée qui permet d’obtenir une nouvelle plante distincte des deux parents. Cette deuxième méthode de croisements interspécifiques a été retenue pour introduire sur des Vitis vinifera des gènes de résistance aux maladies cryptogamiques repérés sur des variétés non vinifera provenant des Etats-Unis ou d’Asie. Le programme « Résistance Durable » (Resdur) a débuté en 2000 pour créer des variétés de raisins de cuve (Inrae de Colmar).

Les premières expérimentations de VATE (valeur agronomique, technologique et environnementale) ont démarré en 2011 en collaboration avec l’IFV et des organisations professionnelles régionales. Ces suivis ont abouti en janvier 2018 à l’inscription au catalogue français d’Artaban N, Vidoc N, Floréal B, Voltis B. Des parcelles de suivi se trouvent dans le Sud-Drôme pour les quatre cépages à Mollans-sur-Ouvèze et à La Laupie pour Floréal, Artaban et Vidoc (Resdur1).

Une deuxième et troisième série de ce programme sont en cours. A terme, le programme Resdur mettra une trentaine de nouvelles variétés rouges et blanches à disposition des viticulteurs. Ces variétés « résistantes » nécessiteront malgré tout un accompagnement phytosanitaire, un à deux traitements judicieusement placés autour de la floraison et/ou en fin de saison selon la pression parasitaire. Des micro-vinifications sur 50 ou 100 litres permettent de tester les qualités organoleptiques des quatre cépages. Une dégustation a suivi cette visite.

L. G.

* Une synthèse de ces expérimentations figure dans le « guide des vignobles Rhône Méditerranée 2021 » page 42 (version papier) ainsi que sur le site

https://herault.chambre-agriculture.fr/publications/detail-de-la-publication/actualites/guide-des-vignobles-viticulture-raisonnee-et-biologie-2018-2019-rhone-mediterranee/

chapitre focus, page 123.

Régularité et savoir-faire pour fidéliser

Les vins du domaine Raspail (vendange manuelle) sont fréquemment primés dans divers concours. Les dernières années, l’export représente 10 à 12 % des volumes produits. Jusqu’en 2019, 65 % de la production en bio - clairette tradition 65 % et crémants 35% ainsi que des vins tranquilles y compris vendanges tardives - étaient vendus au caveau. « La régularité de notre production, notre savoir-faire valent tous les discours et priment pour fidéliser une clientèle » souligne Frédéric Raspail. La cuverie thermorégulée permet de vinifier au mieux les clairette et crémant, remués sur pupitre et dégorgés à la glace.