Aviculture drômoise : une dizaine de foyers de salmonelles en 2018 ?

Les contaminations par des salmonelles demeurent fortes dans les élevages avicoles drômois. En 2015, elles étaient cinq fois supérieures à la moyenne nationale(1). Et ce, malgré les efforts accomplis, l'amélioration du parc de bâtiments, le plan d'action mis en place en 2010... Une mission nationale est venue expertiser le problème(2) en juin 2015. Dans leur rapport présenté à l'automne, les missionnaires ont proposé 19 actions.
L'administration et la profession (au sein d'un comité de pilotage) ont décliné ces recommandations dans un nouveau plan départemental d'action multi-partenarial pour les années 2016 à 2018. Afin de porter à la connaissance des aviculteurs les mesures de celui-ci et d'en discuter, la DDPP(3), la chambre d'agriculture, Filavi 26(4) et le GDS(5) de la Drôme ont organisé trois réunions d'information. Elles ont eu lieu les 17, 21 et 22 mars, respectivement à Marsanne, Peyrins et Montvendre et rassemblé près de 180 participants en tout.
Enjeu de santé publique et économique
A la dernière de ces réunions, le secrétaire général de la préfecture, Frédéric Loiseau, est venu « témoigner du soutien de l'État ». Les salmonelles dans les élevages avicoles drômois, ils les considèrent comme un sujet « préoccupant auquel l'on a du mal à trouver un remède pérenne ». Mais, de son avis, « avec de l'énergie et la bonne volonté de tous, l'on devrait arriver à en venir à bout. Notre objectif est d'expliquer l'action de l'État et de faire en sorte de concilier les impératifs économiques et sanitaires ».
Les salmonelles sont à la fois un enjeu de santé publique et économique. « Nous avons des moyens de production à pérenniser », a observé Paul Despesse, vice-président de la Chambre d'agriculture en charge de l'aviculture. Les salmonelles ont un coût pour les producteurs, l'État (5,2 millions d'indemnités versées aux éleveurs), l'amont et l'aval de la filière. Par exemple, pour l'abattoir Bernard Royal Dauphiné (Grane), les lots de volailles contaminées sont ramassés, abattus, découpés en dernier, ne peuvent être destinés aux plats cuisinés et les abats sont jetés. Une double désinfection s'impose... « C'est un manque à gagner de 15 à 20 % », a précisé le directeur de cet abattoir, Gilbert Pourtier, venu témoigner à la réunion de Montvendre.
Du retard à récupérer
« La lutte doit être collective, a martelé Paul Despesse. Tous les acteurs de la filière doivent adhérer au plan d'action ». C'est en allant tous dans le même sens qu'ont pu être maîtrisées des maladies comme la brucellose et la tuberculose en ruminants, a rappelé le directeur du GDS, Benjamin Deltour. Concernant la pathologie de la salmonelle, celui-ci a appuyé sur la forte résistance de la bactérie dans l'environnement mais aussi sa sensibilité aux désinfectants, et les multiples facteurs de risque à maîtriser. Michel Clément, qui représentait Filavi, a remarqué : « La seule façon de préserver au maximum nos bâtiments, c'est de mettre des "barrières de sécurité" ».
La mission d'expertise a reconnu la pertinence du plan d'action 2010 mais noté des marges de progrès en matière de biosécurité, dépistage et d'assainissement. Ses recommandations visent à améliorer l'efficacité des mesures de lutte. Des contraintes renforcées, donc, pour les éleveurs. Mais le directeur de la DDPP, Bertrand Toulouse, a insisté sur « la nécessité de gagner en efficacité collectivement pour retrouver un niveau sanitaire satisfaisant, c'est-à-dire une dizaine de foyers à l'échéance de 2018. En Bretagne, ils s'en sont sortis. La Drôme a du retard à récupérer dans la mise en place des mesures de prévention. » Et le secrétaire général de la préfecture a ajouté : « Dans l'hypothèse d'une toxico-infection alimentaire collective, au-delà du préjudice d'une consommation reportée sur d'autres aliments, je ne voudrais pas que des éleveurs, voire des fonctionnaires de l'État se retrouvent au tribunal pour homicide. Car la société du 21ème siècle veut des responsables et réparations. Le risque pénal n'est jamais absent, aujourd'hui ».
Sécuriser les pratiques
Anne-France Julia, adjointe du chef de service protection et santé animale, a expliqué le nouveau plan d'action et les points sur lesquels une attention forte sera portée(6). « Il ne faut pas nous voir comme des empêcheurs de tourner en rond, a-t-elle confié. On est là pour sécuriser vos pratiques. » Elle a aussi détaillé l'arrêté du 8 février 2016 pris dans le cadre de la lutte contre l'influenza aviaire(6). Celui-ci étend les mesures de biosécurité à toutes les espèces de volailles, quelle que soit la taille de l'élevage.
Annie Laurie
(1) : 27 foyers de salmonelles détectés en 2015 (13 en volailles de ponte et 14 en volailles de chair) et 6 depuis début 2016.
(2) : voir page 27 de L'Agriculture Drômoise du 26 novembre 2015.
(3) DDPP : direction départementale de la protection des populations.
(4) Filavi 26 : interprofession avicole.
(5) GDS : Groupement de défense sanitaire.
(6) : voir page 21 de L'agriculture Drômoise du 17 mars 2016.