Benjamin Gauchon, à fond dans la spiruline

Qu'est-ce qui a amené Benjamin Gauchon à s'intéresser à la spiruline, un jeune de 29 ans titulaire d'un master en environnement marin ? « L'aspect écologique de sa culture m'intéressait. Elle n'a besoin d'aucun produit phytosanitaire, demande peu d'eau. On la nourrit avec du bicarbonate de sodium, un peu d'urée et de sel. On peut aussi ajouter du sulfate de fer. En plus, la productivité par unité de surface est importante. Et il y a tout à inventer. » C'est ce qu'il répond, le 6 juillet, à des élus de Porte de DrômArdèche venus visiter son site de production, la ferme de Bancel : Pierre Jouvet et Patricia Boidin, président et vice-présidente de cette communauté de communes (et conseillers départementaux), ainsi que Frédéric Chenevier, maire d'Andancette.
Du système D
Retour en arrière. Benjamin se lance dans la culture de la spiruline en 2016. Cet été-là, il débute les travaux : une serre bi-tunnel de 1 200 m2 est installée sur un terrain appartenant à la famille, à Andancette (quartier les Blachettes, à côté de la RN7). Il fabrique un premier bassin lui-même (de 50 m de long, 4 m de large, 10 cm de profondeur) et « bricole » le matériel nécessaire à cette production : une table de récolte, une presse... Du système D.
600 m2 de bassins
Benjamin ensemence son bassin avec la souche de spiruline Lonar et s'essaie à cette culture en faisant plusieurs récoltes au cours de l'automne 2016. « Cela m'a permis de vérifier que tout fonctionnait à peu près bien et d'apporter quelques corrections ». L'hiver suivant, il construit deux autres bassins identiques au premier et autant de tables de récolte. Le jeune spirulinier dispose ainsi de 600 m2 d'espace de culture en tout. La serre peut contenir un quatrième bassin mais ce sera pour plus tard (« c'est un dimensionnement pour travailler au moins à deux »).
En 2017, Benjamin attaque sa première saison complète. Les bassins sont alimentés par le réseau d'eau potable. Ainsi sont évités des risques de contamination liés à la qualité de l'eau. Précaution supplémentaire, les lots de spiruline sont analysés par un laboratoire avant commercialisation.
Récoltes de mars à octobre
La période de production s'étale de mars à octobre. « La température de l'eau doit être supérieure à 20°C pour que la spiruline pousse, précise Benjamin. Et plus la température se rapproche de 37°C, plus elle pousse vite ». La spiruline a tendance à remonter à la surface et, ainsi, à former une surface opaque. « Ce n'est pas bon. » Afin d'éviter ce phénomène, des petites pompes agitent l'eau. Pour la récolte (plusieurs par semaine), l'eau des bassins est pompée, préfiltrée (pour retenir les grains de sable...) puis filtrée (30 microns). Elle est ensuite renvoyée dans les bassins (circuit fermé). La spiruline, elle, reste sur la table de récolte. Elle est ensuite pressée avec du matériel de fromager adapté par Benjamin. Etape suivante, la pâte ainsi obtenue est extrudée avec un poussoir à saucisses, matériel de charcutier, qu'il a également modifié. Il en ressort des spaghetti qui seront mis à sécher (à basse température) sur des claies (trois chariots d'échelles de pâtisserie). Equipé de ventilateurs et d'un déshumidificateur, le séchoir est lui aussi « bricolé » par le jeune spirulinier.
Etre autonome d'ici la fin de la saison
Benjamin assume seul toutes les étapes de la production à la commercialisation. En période de récolte, il attaque sa journée à quatre heure du matin. L'hiver, seule l'évaporation de l'eau est à surveiller. Comme production, il vise un kilo de spiruline sèche par m2 et par an. En théorie, il devrait annuellement en récolter 600 kilos au total. En 2017, il a atteint 210 kilos. Et, pour 2018, il vise les 400 kilos (depuis le début de la saison, il en est à 150). Son objectif est d'être autonome à la fin de cette saison.
Vente en sec et en direct
Benjamin stocke sa spiruline sèche à l'abri de l'humidité de la lumière. Il la commercialise sous la marque Label spiruline, conditionnée en sachets de 100 g (au prix unitaire15 euros) et boîtes de 500 g (70 euros). Il vend en direct sur place (le samedi de 15 à 18 heures ou sur rendez-vous au 06 66 24 81 08) et sur internet, ainsi que via un seul intermédiaire entre lui et le consommateur. Pour l'instant, il ne propose pas de spiruline fraîche car il n'est pas « équipé pour. J'y viendrais peut-être un jour, dit-il. Mais c'est un autre produit ».
A noter encore, Benjamin adhère à la fédération des spiruliniers de France, qui regroupe la plupart d'entre eux (180 membres dont 110 installés depuis plus d'un an). « La spiruline reste du vivant, elle est capricieuse, observe-t-il. Entre spiruliniers, on s'entraide, on partage. »
Annie Laurie
La spiruline


La spiruline est riche en antioxydants, protéines et acides aminés, vitamines A, B1, B2, B3, B6, B9, B12, E, K, phosphore, potassium, magnésium, fer, cuivre, zinc, manganèse...