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Grandes cultures

Bien réussir sa culture de colza en bio

Si la culture du colza en agriculture biologique est délicate et technique, il existe plusieurs points clé incontournables à suivre pour parvenir à de bons rendements et des taux d’huile suffisants.

Bien réussir sa culture de colza en bio

Par rapport à la demande de la filière, la culture de colza biologique reste anecdotique en France, même si les surfaces en colza bio augmentent rapidement ces dernières
années de + 51 % entre 2014 et 2015, par exemple. Les agriculteurs français en bio produisent environ 900 tonnes pour une demande en 2016 autour de 5 000 tonnes. Au vu de ces chiffres, son développement serait une bonne chose car les débouchés existent grâce à la trituration afin de produire de l'huile alimentaire de colza bio et des tourteaux de qualité pour l'alimentation des monogastriques en élevage bio. D'un point de vue agronomique, l'intérêt du colza n'est plus à démontrer. C'est une culture intéressante dans un assolement car elle permet d'allonger les rotations et de valoriser l'azote à l'automne. Souvent jugée comme une culture difficile par les producteurs qui l'abandonnent après leur conversion à l'agriculture biologique, la réussite d'un colza n'est pas insurmontable si on suit avec attention quatre points clé :
- assurer une bonne disponibilité en azote à l'automne ;
- choisir la bonne variété ;
- réussir l'implantation (date et densité de semis) ;
- récolter à maturité complète en veillant au bon réglage de la machine.

Une bonne disponibilité en azote à l'automne

« La réussite de l'implantation du colza en bio conditionne le succès de la culture, souligne Arnaud Micheneau de Terres Inovia, l'institut technique des oléoprotéagineux. Un colza, c'est comme un arbre qui doit avoir des ramifications nombreuses pour bien fleurir. » Contrairement aux céréales à paille ou au maïs, le colza doit avoir le temps entre le semis et la période hivernale de créer son potentiel de récolte. « C'est une plante qui crée ses fleurs de la mi-octobre à la Toussaint, explique l'ingénieur agronome. Cela se passe à l'intérieur des tissus, c'est donc très peu visible. Si le colza a une belle vie à l'automne, tous les ingrédients d'une belle culture au printemps et d'une bonne récolte sont en place. » Il faut donc retenir que le rendement du colza se fait sur les premiers mois de la culture. Pour y parvenir, la plante doit mobiliser des quantités d'azote importantes à l'automne (jusqu'à 150 kg/ha) pour une croissance régulière et suffisante. En situation de faibles reliquats azotés avant l'implantation du colza, il est donc conseillé d'apporter une fertilisation organique en privilégiant les produits à minéralisation rapide (lisier, fientes de volaille, vinasses...) qui seront rapidement utilisables par la culture. Si ces produits ne sont pas disponibles, le colza pourra être implanté après une jachère de légumineuses qui relèvera le statut azoté de la parcelle : féverole, trèfle violet, luzerne, autres protéagineux d'hiver.

Choisir les bonnes variétés

Pour mettre à profit les progrès génétiques, il faut choisir une variété peu sensible au phoma et à l'élongation automnale. « Le choix de la variété est crucial, souligne Arnaud Micheneau. Sélectionner une variété résistante au phoma est indispensable pour donner à la culture une capacité de compensation. Par ailleurs, il faut également éviter l'élongation automnale grâce à une génétique peu sensible pour limiter les dégâts de gel sur la culture en cas de grand froid. » Dans les zones où la hernie des crucifères est à craindre, privilégier une variété peu sensible. Il en est de même pour les secteurs où l'orobanche rameuse est présente. Toutes ces caractéristiques variétales, ainsi que la productivité, peuvent être consultées sur le site www.myvar.fr

La grosse altise est gênée dans sa production quand le colza est associée à une légumineuse.

Des stratégies innovantes contre les insectes

Il existe plusieurs bonnes pratiques contre les ravageurs du colza : altise d'hiver également appelée grosse altise, charançon du bourgeon terminal notamment ou méligèthes. Contre les deux premiers, il faut se tourner du côté de l'utilisation de plantes compagnes. « Lorsque l'on peut utiliser une légumineuse semée en même temps que le colza, on s'aperçoit que sa présence est très défavorable aux ravageurs du colza, souligne Arnaud Micheneau. Leurs impacts diminuent de 60 à 70 % sur la culture. On teste ainsi dans le Centre-Est, un mélange lentille et féverole à hauteur d'un semis de 10 à 15 pieds de féverole par m². Il faut viser une levée des plantes compagnes au plus tard au 5 septembre pour obtenir un développement végétal suffisant permettant aux légumineuses de perturber les insectes. » Autre méthode, l'association d'une variété de rendement avec une variété de colza à floraison très précoce comme ES Alicia à hauteur de 5 à 10 % du mélange lors du semis. La variété précoce fleurissant très tôt, elle agit comme un piège à méligèthes et limite ainsi la nuisibilité des attaques de cet insecte sur la variété de rendement.

Favoriser la croissance avant l'hiver

Un colza robuste, bien enraciné, aura la capacité de compenser les dégâts liés aux bioagresseurs et aux accidents climatiques grâce à ses innombrables ramifications. Le colza est une plante dotée d'une petite graine : elle nécessite un travail du sol qui affine suffisamment la terre mais sans la dessécher ; son pivot nécessite par ailleurs un sol bien ameubli pour pouvoir croître. Afin de maximiser sa croissance automnale et son pouvoir concurrentiel vis-à-vis des adventices, il est nécessaire de semer tôt, entre le 15 et le 25 août dans le Centre-Est, jusqu'à mi-septembre dans les zones plus douces.
Viser un peuplement autour de 30 à 40 plantes/m², pas plus : semer trop dense n'est pas bénéfique. Dans les régions françaises où les pluies de fin d'été sont rares, une irrigation avant ou après semis conditionne la réussite de la culture.

Récolter le colza au bon moment

La récolte du colza se fait idéalement quand les graines sont aux environs de 9 % d'humidité, soit à pleine maturité. Si les pailles du colza sont encore majoritairement vertes, il est préférable de récolter d'abord les blés et de revenir plus tard moissonner les colzas pour éviter des pertes de rendement. Les normes de commercialisation du colza fixent l'humidité à 9 %, le taux d'impuretés à 2 %, et le taux d'huile à 40 % (aux normes d'humidité et d'impuretés).

Andainer en cas de fortes présences d'adventices

Lorsque la récolte est rendue délicate par la présence trop importante d'adventices, il est possible d'andainer le colza. Les mauvaises herbes se dessécheront rapidement et ne gêneront pas la récolte qui se fera par reprise d'andains à la moissonneuse-batteuse classique une huitaine de jours après l'andainage. 
C.P.
Source : Les quatre points clés de la réussite d'un colza d'hiver en bio – septembre 2017 - APCA, Terres Inovia et l'Institut technique de l'agriculture biologique.

 

PRATIQUE / Colza et absorption de l’azote

Pour évaluer la consommation d’azote d’une culture de colza sur une parcelle, les ingénieurs agronome de Terres Inovia proposent une méthode simple. Prélever tous les pieds de colza au niveau du colleret sur un m² de la parcelle. En pesant cette biomasse, vous serez en mesure d’évaluer les unités d’azote absorbées. Il faut savoir qu’un kilo de colza représente 60 unités d’azote. Si vous obtenez trois kilos de colza sur un m², cela signifie que 180 unités ont été absorbées.

Valoriser le colza  / Les atouts du tourteau en alimentation animale

Le colza est en premier lieu valorisé pour l’huile alimentaire, qu’elle soit produite à la ferme ou par une huilerie après collecte. Les tourteaux, en complément, possèdent de réels atouts en alimentation animale. Les tourteaux de colza sont utilisés en alimentation des vaches laitières en correcteur azoté. Leur faible disponibilité sur le marché biologique encourage à les consacrer prioritairement aux porcs et aux volailles.
Les premières données issues du projet Secalibio (financements Casdar) sur la digestibilité du tourteau de colza bio montrent une bonne valeur nutritionnelle. Cela va permettre de proposer des tables spécifiques pour utiliser au mieux cette matière première dans les aliments biologiques. Les tourteaux de colza biologiques sont riches à très riches en matières grasses et plutôt riches en protéines. Compte tenu de la variabilité importante de la composition chimique des tourteaux de colza en matière azotée totale, il est impératif de réaliser des analyses chimiques avant de l’utiliser.