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Alimentation

Bien se nourrir pour bien vivre

« Qu'est-ce que bien manger ? », tel était le thème d'une conférence donnée par Bruno Parmentier à destination des élèves du lycée agricole du Valentin.
Bien se nourrir pour bien vivre

 

Après une carrière en grande partie dans la presse et l'édition, Bruno Parmentier a dirigé l'école supérieure d'agriculture d'Angers (de 2002 à 2011). A présent, il donne des conférences et intervient dans les médias sur des thèmes liés de l'agriculture, l'alimentation et la faim. Le 23 novembre après-midi, dans le cadre de l'opération « Terres animées » portée par Valence-Romans Agglo, il a tenu une conférence pédagogique auprès des élèves du lycée agricole du Valentin à Bourg-lès-Valence sur le thème « Qu'est-ce que bien manger ? ».

Des affamés et des obèses

Dans le monde, 815 millions d'humains ont faim (autant qu'en 1900). Un milliard de malnutris mangent tous les jours pareil (riz, manioc...) et manquent de protéines, vitamines. Pour quatre des sept milliards d'êtres humains, manger est un souci. Plus de gens meurent de faim que de trop manger. Néanmoins, l'obésité est « une épidémie planétaire » : elle touche 350 millions d'adultes (croissance de 5 % par an), 22 millions d'enfants de moins de cinq ans et 1,6 milliard de personnes sont en surpoids.

Tendances et risques

Bien manger pour nos contemporains, a expliqué l'intervenant, cela veut dire suffisamment mais pas trop, se régaler, ne pas s'empoisonner et vivre longtemps en bonne santé sans trop réchauffer la planète et en préservant ses ressources (développement durable). Ils veulent être rassurés. « Pourtant, on risque six fois moins la salmonellose en mangeant à Paris qu'à Berlin et 28 fois moins qu'à Prague. En France, on a une superbe alimentation, a noté Bruno Parmentier, avant d'enchaîner sur les risques actuels : alcoolisme, tabagisme, allergies, intolérances, obésité, anorexie, boulimie, orthorexie(*), maladies nouvelles liées à des expositions prolongées à des toxiques. « L'obésité est une maladie des riches des pays pauvres et des pauvres des pays riches. C'est d'abord une maladie de déstructuration sociale, du chômage, de l'acculturation, de ceux qui mangent seuls à pas d'heure devant la télé... » L'anorexie, elle, touche 5 % des adolescentes et gravement 2 % des femmes. « Elle est devenue une maladie sociale, de la représentation du corps, qui présente de graves dangers, y compris de mort. » Quant à l'espérance de vie, elle était de 26 ans en 1750, contre 79 en 2016 pour les hommes et 86 pour les femmes (20 ans de plus qu'en 1946 pour celles-ci).

Les élèves du Valentin pendant la conférence de Bruno Parmentier.

Les agriculteurs « assurent »

Les agriculteurs, eux, ont fait « des progrès immenses » en Europe, a souligné l'intervenant. Et d'expliquer qu'en France un agriculteur nourrit plus de 100 consommateurs aujourd'hui, contre à peine cinq en 1945. « Bravo, ils assurent, a-t-il noté. Les gens des villes leur disent rarement merci. » En plus, « on mange bien pour pas cher » : entre 1960 et 2016, le temps de travail au Smic français pour acheter un kilo de poulet est passé de près de 4 heures et demi à 30 minutes, celui d'un litre de lait de 14 à 6 minutes. Et, dans le budget des ménages français, la part des dépenses consacrées à la nourriture à domicile s'est réduite : 14 % en 2014, contre 38 en 1960. Mais, dans notre pays, on gâche en moyenne 240 kilos de nourriture par personne par an : un tiers au champ ou en mer, autant dans l'industrie et le commerce, un sixième dans la restauration et autant à domicile.

Des recommandations

Bruno Parmentier conseille de manger, chaque fois que possible, tranquillement, en quantité justes suffisantes, avec moins de sel, sucre, matières grasses, viande et lait, plus de fruits et légumes (de saison), des céréales, légumineuses, de la diversité, ainsi que du local, bio et équitable « sans en faire une religion »... « Il faut se nourrir bien et tous, modifier nos habitudes alimentaires, moins gâcher, "manger bon pour le climat" (produits locaux, de saison), a conclu Bruno Parmentier. Il faut soutenir toutes les agricultures, à commencer par celles de son département et sa région, une agriculture écologiquement intensive faisant "plus et mieux avec moins", changer les règles du commerce international... » Et d'ajouter : « Les paysans ne sont pas ringards mais post-modernes ».

Annie Laurie

(*) Orthorexie : trouble du comportement alimentaire se caractérisant par une obsession de manger sainement.