Binage du tournesol et du soja : une technique qui gagne à être connue

Le binage est tout d'abord un composant efficace du programme de désherbage des oléagineux de printemps, qu'il soit « tout mécanique » ou mixte. Dans ce dernier cas, il permettra une réduction d'usage d'herbicide sous réserve que la pression en mauvaises herbes soit faible à moyenne. En agissant sur des adventices plus développées que celles que peuvent arracher la herse étrille ou la houe rotative, la bineuse permet, par ailleurs, d'intervenir plus tardivement en cours de végétation et offre ainsi une plus grande souplesse d'organisation.
Sur adventices difficiles (chardon, datura, xanthium, bidens...), le binage en conditions sèches apporte un bon complément pour diversifier la lutte contre ces espèces et mettre toutes les chances de son côté, mais aussi en rattrapage quand les programmes herbicides ont été mis en défaut. Par son mode d'action qui sectionne et recouvre les adventices, et bien qu'elle n'intervienne pas sur le rang (sauf si doigts rotatifs), la bineuse a une certaine action sur vivaces en ralentissant leur croissance, ce qui n'est pas le cas avec une herse étrille ou une écrouteuse. Le binage est envisageable sur tous types de sol, même s'il reste à éviter dans des situations de sol peu nivelé avec des courbes et dévers ou une présence importante de résidus ou de cailloux. Par ailleurs, le binage a une influence positive sur l'alimentation en eau de la plante, par l'effet combiné d'une baisse de l'évaporation du sol et d'une meilleure infiltration de l'eau de pluie ou d'irrigation après passage.
Les conditions de réussite du binage
Quelle que soit la culture (tournesol ou soja), il faut en amont soigner la préparation du sol, prévoir un grand écartement (au moins 40 cm) et exclure les parcelles à gros cailloux. Au moment du passage de la bineuse, le sol doit être ressuyé, et pour éviter tout phénomène de repiquage des plantules, il faut s'assurer que la météo prévoit des conditions séchantes pour les jours suivants.
Intervenir au bon stade des adventices
Bien que la plage d'intervention du binage soit plus large que celle d'autres outils de désherbage mécanique, le stade des adventices reste une clé de réussite. Pour une efficacité optimale, les adventices doivent être jeunes : jusqu'à 3-4 feuilles pour les dicotylédones et avant tallage pour les graminées.
Régler le matériel avec soin et tester préalablement l'outil
Les réglages sont essentiels pour préserver la culture tout en détruisant un maximum de mauvaises herbes. Il est conseillé de tester préalablement l'outil sur une distance courte mais suffisante pour que la vitesse de travail soit atteinte. Attention, ces réglages doivent être renouvelés à chaque stade de développement de la culture et des adventices, et à chaque nouvelle parcelle (surtout si les types de sol diffèrent). Avant tout, s'assurer que l'outil conserve bien la trajectoire du tracteur. Ajuster ensuite la profondeur des éléments et l'angle d'attaque des dents en fonction du type de sol et des éventuelles zones de compactions derrière les roues du tracteur. Le troisième point sert à mettre les éléments d'aplomb par rapport au sol et trouve tout son intérêt dans les sols compactés.
Pour protéger les jeunes plants de soja ou de tournesol contre les projections de sol, des disques ou roues crénelées (protège plants) peuvent être montés sur la bineuse. Pour travailler au plus près du rang, des doigts rotatifs en caoutchouc ou des lames Lelièvre peuvent également être utilisés pour désherber au plus près de la culture, là où une bineuse classique ne peut accéder. Le type de dent (rigide ou flexible), la largeur et la forme des socs influencent le travail du sol et la qualité du désherbage. Si les conditions météo le permettent, il est conseillé d'envisager plusieurs binages pour garantir un résultat satisfaisant. Adapter alors la profondeur de travail, le choix des dents et socs au comportement du sol.
à quel moment intervenir avec les outils ?
Le binage est réalisable à partir d'une paire de feuilles du tournesol ou des premières feuilles unifoliées du soja à la condition d'utiliser des protèges plants et de travailler à vitesse faible (environ 3 km/h). Par la suite, l'intervention peut être réalisée sans protèges plants et en avançant dans le cycle on peut se permettre d'augmenter la vitesse de passage (jusqu'à 8/10 km/h).
Les plages d'intervention doivent être décidées de manière à épargner la culture et à maximiser les chances de destruction des mauvaises herbes.
Qu'en est-il d'un point de vue économique ?
Terres Inovia a évalué l'efficacité technico-économique du binage comparée à plusieurs stratégies et modalités d'utilisation. Les résultats montrent que les modalités avec prélevée en plein, uniquement herbicide à dose pleine (référence) ou à dose réduite associée au binage (prélevée IFT), sont efficaces mais ce sont celles qui coûtent le plus cher.
La modalité binage(s) seul(s) est la plus compétitive en termes de coût avec une efficacité intéressante mais pas toujours satisfaisante en fonction de la pression adventice. La modalité qui combine le meilleur rapport efficacité/coût est la prélevée localisée (dose pleine), technique appelée « herbisemis » puis binage.
Claire Martin-Monjaret et Fanny Vuillemin - Terres Inovia
Contact régional : A.Verniau [email protected]
A consulter la sélectivité des outils de désherbage mécanique sur les oléagineux
Combiner herbicide et bineuse ?
La pulvérisation localisée sur le rang, complétée par du binage, est une technique qui permet de ne traiter qu’un tiers de la surface et donc de réduire les quantités d’herbicides à l’hectare (et ainsi l’IFT) et de maîtriser les coûts de production, tout en conservant une efficacité de désherbage égale ou supérieure à la référence en plein. Compte tenu de l’économie de deux tiers d’herbicide (gain de 50 à 60 €/ha) et du coût limité d’un binage (environ 25 €/ha matériel, traction et main-d’œuvre comprise), il devient possible d’envisager un second binage et/ou l’utilisation d’un produit haut de gamme si besoin. De plus, cette technique permet d’envisager la maîtrise des flores non contrôlables par la seule voie chimique (ammi majus, mercuriale, renouée liseron…).• Stratégie herbicide puis binage : « L’herbisemis » est une technique qui consiste à appliquer l’herbicide de prélevée de façon localisée sur le rang en même temps que le semis, grâce à un kit de traitement monté sur le semoir. Le binage viendra par la suite en cours de végétation compléter ce passage. On peut aussi envisager de pulvériser sur le rang avec un herbicide de post-levée sur soja ou tournesol tolérant puis de biner ensuite, sous réserve d’être équipé d’une rampe de pulvérisation localisée.
• Stratégie herbicide et binage : « Le désherbinage » est une technique qui semble peu réalisable : elle consiste à associer en post-levée un traitement dirigé sur le rang à un binage dans l’inter-rang en même temps, sur soja ou tournesol tolérant aux herbicides. En effet, les conditions favorables à ces deux opérations (traitement herbicide et binage) sont rarement réunies : sol ressuyé et temps séchant pour le binage et hygrométrie suffisante pour le traitement.
En savoir +
• Plusieurs articles de référence sur les résultats issus des travaux de Terres Inovia sur le désherbage mécanique du tournesol et du soja sont en libre accès sur www.terresinovia.fr.
• Guide tournesol bio 2020 à télécharger gratuitement.
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