Boiron frères contractualise de la pêche

Installée à Rovaltain, la SAS Boiron Frères est une référence mondiale sur le marché des fruits surgelés (entiers, purées, coulis) destinés aux professionnels. Elle a récemment mis en place un partenariat avec deux coopératives, Lorifruit (Loriol) et Rhoda-coop (Saint-Rambert-d'Albon), sur une variété de pêche. Cette collaboration a été présentée le 27 février en deux temps, chez des arboriculteurs engagés dans la démarche : Francis Genton (adhérent de Rhoda-coop), à Granges-lès-Beaumont, et Jean-François Besson (Lorifruit), à Mirmande. Dans le verger du premier, la pluie a empêché la plantation symbolique de pêchers mais pas dans celui du second.
Des contributions
Qu'est-ce qui a guidé Boiron Frères vers la contractualisation avec deux structures collectives ? « Un besoin croissant de production et de plus en plus de difficultés à trouver des variétés qui nous conviennent, a constaté son PDG, Alain Boiron. Les variétés ayant ces caractéristiques ont tendance à disparaître. Cela nous a amené à travailler, depuis 2011, avec la Sefra(*). Nous leur avons demandé de chercher des variétés ayant de telles caractéristiques. Elle nous en a proposé une dizaine, que nous avons testées à la transformation et à la surgélation. Il en est ressorti trois. Après des tests en grandeur nature en 2012 et 2013 pour confirmation et validation de notre choix, nous avons retenu Bellerime. » La chambre d'agriculture de la Drôme aussi a apporté sa contribution, avec le soutien du conseil général. Ceci, dans la mise en relation des acteurs ainsi que l'identification et la caractérisation des variétés susceptibles d'intéresser l'industriel.
Cette variété a été choisie par le transformateur pour sa saveur, son équilibre sucre-acidité, sa texture (« pas flotteuse »), ainsi que la couleur de sa purée (donnée par sa chair rosée autour du noyau et son épiderme). L'arbre est poussant, facile à conduire, productif. Et son fruit, d'un bon calibre, est apprécié pour sa qualité gustative. Mais si cette pêche a eu sa place dans le calendrier variétal pour la commercialisation en frais, d'autres lui sont aujourd'hui préférées. C'est pourquoi Boiron Frères a eu l'idée de vergers dédiés.
De la visibilité
Avec ces contrats, une visibilité est donnée aux arboriculteurs concernés en termes de débouchés mais aussi de niveau de prix. Et, pour l'industriel, c'est une sécurisation de l'approvisionnement. « Nous nous sommes également mis d'accord sur les techniques de production », a ajouté Alain Boiron, qui a dit sa grande satisfaction de ce partenariat entre production et industrie : « Il montre notre capacité à travailler ensemble dans cette région où les fruits, et en particulier la pêche, connaissent des difficultés. Ce type de débouché offre de la pérennité tant pour les producteurs que pour nous. Même si les volumes ne sont pas très élevés, c'est une opportunité et un exemple intéressant à mettre en avant. Nous commençons par expérimenter ce schéma mais souhaitons aller vers une montée en puissance. »
Une sécurité
Francis Genton cultive quatre vingt-dix-hectares dont huit de pêchers et vient de planter 0,8 hectare de la variété Bellerime. Il a été séduit par l'aspect contractuel et sécurisant de la proposition du transformateur. « L'idée m'a paru intéressante, novatrice, indique-t-il. C'est un verger spécifiquement mis en place, qui nous assure un débouché. On plante en sachant à l'avance à qui l'on va vendre les fruits et à quel prix. Le prix sera déconnecté du marché du frais. Là, on n'est plus dans une logique de spéculation mais de contractualisation. En plus, Boiron Frères prendra en charge l'installation de filets paragrêle pour protéger mes pêches Bellerime. Et, pour protéger le verger du gel, une tour à vent est en place dans mon verger depuis une vingtaine d'années. »
Des perspectives
Pour le directeur de Lorifruit, Vincent Faugier, l'initiative « montre qu'il est possible d'aller plus loin qu'une simple contractualisation annuelle. La transformation est un complément qui peut redonner des perspectives aux producteurs. Nous avons la chance d'avoir un industriel qui a osé et deux partenaires qui ont dit "oui". C'est peut-être le démarrage d'une nouvelle approche aussi du côté de la production ». Il a, en outre, fait remarquer qu'une coopérative pouvait regrouper des cueilles afin de permettre à l'outil industriel de fonctionner dans de bonnes conditions. « C'est une autre raison de la signature de ce contrat. » Quant à la coopérative Rhoda-coop, son directeur, Christophe Claude, a fait remarquer qu'elle était déjà liée à Boiron Frères par des contrats annuels pour plusieurs fruits mais pas à long terme. A propos du partenariat « Bellerime », il a confié : « C'était à faire », avant d'espérer que ce soit « le début d'une aventure peut-être aussi sur d'autres produits ».
Annie Laurie
(*) Sefra : station d'expérimentation fruits Rhône-Alpes.
Les contrats Bellerime /
- Contrats signés entre un industriel, Boiron Frères, et deux organisations de producteurs, Lorifruit et Rhoda-coop. 5 arboriculteurs concernés dont deux adhérents de la première et trois de la seconde.
- 4,5 hectares de pêchers de la variété Bellerime plantés cet hiver sur les communes de Granges-lès-Beaumont, Mirmande (Drôme), Andancette (Ardèche) ainsi que Bellegarde et Saint-Martin-de-Crau (Gard).
- Premiers fruits récoltés en 2017, montée en puissance en 2018 et potentiel de production de 130 tonnes.
- Contrats sur 15 ans (durée de vie de la plantation) portant sur la totalité de la production, avec engagement d'achat pour le transformateur et de livraison pour les arboriculteurs.
- Un cahier des charges.
- Financement par Boiron Frères de plants, systèmes d'irrigation, filets paragrêle, selon les producteurs et parcelles.
- Prix des fruits au kilo négocié entre les deux coopératives et l'industriel sur un tonnage théorique atteignable (à charge des arboriculteurs de produire un volume minimum). Ce prix prendra effet à partir de la première livraison. Il tiendra compte de tous les coûts de production et sera indexé sur un coefficient d'évolution des prix en agroalimentaire.