Bruno Darnaud : « Organiser la filière pour la distribution »

Avec un marché européen saturé et des prix bas, la campagne 2017 s'est avérée compliquée en pêche-nectarine et abricot. A quoi s'attendre cette année ?
Bruno Darnaud : « 2017 a été une année exceptionnelle en volumes (679 817 tonnes en Europe, 156 642 en France, ndlr) pour l'abricot. En 2018, on attend une perte de 100 000 tonnes en Europe, alors que l'Espagne annonce une hausse de production. En France, on prévoit plutôt une perte de 20 %. Les producteurs français n'ont surtout pas envie de revivre une année comme 2017. En pêche-nectarine et en abricot, on a bien réussi le basculement avec les distributeurs qui n'étaient pas sûrs de l'approvisionnement et se sont tournés vers l'Espagne. »
Comment convaincre la distribution ?
B. D. : « Cette année, on a dit aux distributeurs qu'on serait là en juin, malgré le retard que l'on rattrape (de sept à huit jours), et les quelques variétés qui ont gelé au départ. Ils veulent démarrer la campagne sûrs des volumes, or les stocks ont été mal gérés. Au sein de notre AOP, 50 entreprises font souvent les deux produits (pêches et abricots), d'où la campagne de communication télé de l'AOP sur France 2 et France 3, pour accompagner ce basculement. » (voir encadré ci-dessous).
La recherche variétale est aussi un moyen de mieux se positionner auprès des distributeurs...
B. D. : « Dans le cadre de nos partenariats avec les marchés écoresponsables, l'aspect qualitatif des pêches-nectarines est satisfaisant, mais la qualité des abricots essuie des reproches. L'abricot a changé, on était sur de l'abricot traditionnel. Aujourd'hui, beaucoup de nouvelles variétés existent mais elles sont très hétérogènes et se travaillent donc différemment. Du coup, le consommateur peut être très satisfait ou très déçu. On travaille à cette déception en rayon. »
Comment ?
B. D. : « Déjà au verger, il y a du boulot. Ce n'est pas une question de variété mais de mode de conduite. Dans les stations, soixante variétés sont testées par an. Notre AOP a planté 70 variétés différentes en 2017, car il y a un vrai besoin d'organiser la filière pour la distribution et trouver une segmentation. On essaie par couleur, par taux de sucre... C'est long de travailler une variété. En pêche, on a mis dix ans pour répondre à la demande, et on y est arrivé ! On se donne un plan à trois ans. »
La démarche Vergers écoresponsables, dans laquelle vous êtes engagés, contribue à cette réorganisation de la filière ?
B. D. : « L'attrait de la démarche Vergers écoresponsables, que l'on a rejointe il y a trois, quatre ans, nous réunit. Le cahier des charges évolue à la hausse chaque année. De plus, on enregistre beaucoup de demandes d'adhésions. On compte une dizaine d'adhérents cette année, sur les cinquante entreprises déjà dans l'AOP. Des audits sont mis en place chez les producteurs avec Global gap (référentiel de bonnes pratiques pour la filière fruits et légumes reconnues internationalement, ndlr). L'AOP a le vent en poupe. »
Propos recueillis par Philippe Douteau
En campagne écoresponsable
En 2018, l’AOP pêches et abricots de France met le paquet à la télé. Engagée dans le respect de la charte des Vergers écoresponsables, l’association de producteurs, présidée par Bruno Darnaud, prévoit une double offensive promotionnelle. D’abord sur France 2 et France 3 au mois de juin : du 4 au 17 juin pour les abricots et du 11 au 24 juin pour les pêches. Des films pédagogiques sont également prévus à destination des professionnels et des amateurs, ainsi qu’une campagne personnalisée par producteur, via la partie e-store du site : www.pechesetabricotsdefrance.fr.En rejoignant la démarche Vergers écoresponsables, les arboriculteurs s’engagent à cueillir leurs fruits manuellement, produire dans le respect de l’environnement (conservation des sols, biodiversité, préservation des ressources en eau…), garantir une traçabilité depuis le verger, sous contrôle d’organismes indépendants. Le tout, en produisant de A à Z, 100 % français.