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Dégâts de rongeurs

Campagnols : lutter avant d’être envahi dans les vergers

Les dégâts de campagnols progressent dans les vergers. La Fredon incite les arboriculteurs à lutter constamment par différents moyens.

 Campagnols : lutter avant d’être envahi dans les vergers
En vallée du Rhône, le campagnol envahit des vergers et cultures porte-graines. Combiner les moyens de lutte et maintenir la pression sur ce ravageur est impératif, avertit Patrice Monier, technicien sanitaire à la Fredon Aura.

« Quand les producteurs voient des tumuli, il pense aux taupes mais pas forcément aux campagnols et bien souvent, c’est déjà trop tard », constate Patrice Monier, technicien sanitaire Drôme à la Fédération régional de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) d’Auvergne-Rhône-Alpes (Aura). Les dégâts dans les vergers peuvent alors être redoutables. » Le 31 mars à Etoile-sur-Rhône, lors d’une journée d’information et de démonstration, il a repéré quelques tumuli, le signe d’une vaste invasion souterraine du campagnol provençal. « Ces rongeurs creusent des galeries et lorsqu’ils tombent sur un arbre, ils le mangent en faisant le tour sous terre », explique-t-il. Printemps et automne sont des saisons de prolifération des campagnols. « Un couple peut très vite donner naissance de 150 à 200 individus. Ce qui peut entièrement détruire des vergers, notamment de cerisiers, surtout ceux avec le porte-greffe Sainte-Lucie. » Les jeunes plantations d’abricotiers sont aussi très touchées, partout en Drôme. Mais également les cultures porte-graines de luzerne où sévit le campagnol des champs, qui creusent des galeries ouvertes.

Biodiversité, piégeage

Le piégeage est l’un des moyens de lutte contre les campagnols. Après avoir repéré un tumulu (petit tas de terre très fine repéré ici par le piquet orange), insérer le Topcat dans la galerie située à côté. « Le piège est à relever deux fois par jour tant que des captures sont effectuées. Ensuite, il faut le déplacer », explique Patrice Monier.

Qu’il soit terrestre, provençal ou des champs, le campagnol est classé animal nuisible. Il est donc possible de lutter. « En premier lieu, il convient de favoriser les environnements pour attirer des auxiliaires de lutte », conseille Patrice Monier. L’installation de perchoirs amovibles pour faucon crécerelle près des tumuli est préconisée. « Cela sert de tour de contrôle au rapace pour repérer les campagnols. » Pour attirer ces faucons, la pose de nichoirs dans les haies est vivement conseillée. A noter, ces mêmes haies peuvent servir de cache aux renards, l’un de plus grands prédateurs de campagnols.

En complément de ces moyens de luttes indirectes, s’ajoutent des méthodes de piégeage. La Fredon met en avant le Topcat, un cylindre en aluminium équipé d’un ressort pour faire office de guillotine. « Pour un hectare, il faut compter entre 20 et 50 pièges à répartir de manière cartésienne, insiste Patrice Monier. Il ne faut pas les éparpiller mais les poser tous au même endroit et les laisser là tant que des campagnols sont attrapés. Ensuite, si au bout de deux jours aucune capture n’est faite, il faut déplacer les Topcat sur le rang. » Il est possible de se procurer ce matériel auprès de la Fredon Aura.

Combiner les moyens de lutte

Un autre moyen de lutte est le recours à la chimie. « Le produit le plus efficace sur le campagnol provençal est le Ratron® GW », indique Patrice Monier. La matière active est le phosphure de zinc enrobé dans des grains de blé. L’épandage se fait manuellement à raison de 2 kg par hectare au maximum. « Comme pour les pièges, il faut repérer la galerie, faire un petit trou et déposer cinq grains à l’aide d’une canne prévue à cet effet. »

Un autre système, le Rodenator, fonctionne avec un mélange de 3 % de propane et le reste en oxygène. « On l’introduit dans la galerie pour le faire exploser et la détonation tue instantanément les campagnols, assure Patrice Monier. Ceux qui sont en dessous remontent ce qui facilite leur piégeage. » Utilisé deux fois par an (au printemps et à l’automne) sur les vergers infestés (possible de traiter 20 ha par jour), le Rodenator a cependant été interdit par certaines communes en raison du bruit qu’il génère. Cela pose problème en agriculture biologique où cette solution est compatible et plus rapide que les pièges.

« Maintenir la pression toute l’année »

En arboriculture, les campagnols provoquent d’importants dégâts sur cerisiers (photo) et abricotiers.

« Il faut combiner les moyens de lutte et trier dans cette boîte à outils ce qui correspond à sa structure, souligne Catherine Prave, technicien sanitaire à la Fredon chargée du suivi campagnols en Isère. Par exemple, lorsque des saisonniers sont disponibles entre deux tâches, l’agriculteur peut mettre cette main-d’œuvre au piégeage. Pour un exploitant seul, le recours au chimique peut s’avérer plus facile à gérer. Quoi qu’il en soit, il faut maintenir une énorme pression sur ce rongeur toute l’année et intégrer cette tâche dans l’itinéraire de culture. »

Les causes de la prolifération du campagnols ne sont pas encore bien connues. « Selon l’Inrae, cela pourrait s’expliquer par la modification à grande échelle de la structuration paysagère avec plus ou moins de forêts, l’extension de l’urbanisation…, indique Catherine Prave. Les recherches se poursuivent pour mieux comprendre ce phénomène. » En attendant, la lutte contre ce rongeur s’avère indispensable en agriculture.

Christophe Ledoux

Contact à la Fredon Aura : Patrice Monier (mail : patrice.monier@fredon-aura.fr - tél : 06 84 37 18 78).

Observations du campagnol : une zone pilote à Etoile-sur-Rhône

Observations du campagnol : une zone pilote à Etoile-sur-Rhône

Depuis trois ans, une quinzaine de parcelles est suivie par la Fredon Aura sur la commune d’Etoile-sur-Rhône. Des observations et des comptages sont réalisés deux fois par an. « La pullulation augmente fortement surtout en vergers de cerisiers et porte-graines de luzerne », constate Patrice Monier.