Céréales : profiter de la période de redoux pour désherber
Depuis plusieurs jours les températures remontent légèrement sur la région et l’absence de précipitations laisse entrevoir des créneaux favorables aux interventions dans les parcelles. Arvalis-Institut du végétal conseille de donner la priorité au désherbage avant la fertilisation.

Même s’il faut s’attendre à des reliquats faibles, les besoins des cultures restent très modérés jusqu’au tallage et une fertilisation trop précoce profiterait davantage aux adventices. Il est donc conseillé de donner la priorité aux chantiers de désherbage. Au vu de l’étalement des semis sur plusieurs mois, il convient cependant de distinguer plusieurs cas de figure.
Les solutions herbicides disponibles
Habituellement, à cette date, les solutions le plus souvent évoquées sont les solutions herbicides dites « de sortie d’hiver ». Si les solutions herbicides ciblant les dicotylédones en sortie d’hiver sont assez nombreuses, celles contrôlant les graminées sont réduites. En effet, ces dernières reposent sur seulement deux modes d’action (groupes HRAC 1 et 2) très concernés par des phénomènes de résistance dans nos régions.
Les herbicides racinaires encore utilisables
D’un point de vue réglementaire, le nouveau catalogue des usages, paru en août 2023, considère désormais comme céréales d’hiver, celles semées avant le 1er février. Attention, ce classement au titre du catalogue des usages phytosanitaires n’a rien à voir avec le statut des cultures du point de vue de la réglementation Pac. Ainsi, un blé semé courant janvier demeure un blé d’hiver, ce qui ouvre la possibilité de le désherber avec les herbicides habituellement appliqués à l’automne. Toutefois, des précautions sont à prendre : avec des spécialités dont l’AMM spécifie une interdiction d’application au-delà du 31 décembre (par exemple Merkur) ou pour lesquelles la firme mentionne explicitement des conditions d’emploi particulières. Par ailleurs, dans ces conditions de semis très tardifs, le risque de salissement sera grandement limité, tout particulièrement vis-à-vis des adventices dites automnales. De fait, il limitera l’emploi des herbicides « dits d’automne ». Si leur emploi devait s’envisager en début d’année civile, bien valider avec la firme cette possibilité.
Pour les semis qui seront réalisés à partir du 1er février, la culture devient « culture de printemps » du point de vue des usages phytosanitaires. Dans ce cas, la liste des herbicides possibles se restreint.
Parcelles semées avant mi-novembre
Lorsqu’ils ont pu être réalisés, les herbicides d’automne ont donné des résultats hétérogènes. La grande majorité des parcelles n’a en revanche pas été désherbée et les adventices sont aujourd’hui nombreuses et développées. Sur résistances avérées aux produits de sortie d’hiver et/ou sur des parcelles très infestées avec des graminées tallées et/ou un manque de peuplement : arrêter les frais et envisager une culture de remplacement. Sinon intervenir dès que possible et avant les premiers apports avec un produit « sortie hiver ».
Parcelles semées à partir de fin novembre et jusqu’en janvier
Le principal avantage du décalage forcé des dates de semis est d’éviter les plages préférentielles de levée des adventices à germination automnale. Les labours souvent nécessaires aux semis ont pu cependant remonter du stock grainier en surface. Il faudra rester vigilant avec les parcelles ayant une forte problématique ray-grass, voire vulpin.
Les stratégies de désherbage
• Si le blé n’a pas atteint 3 feuilles : possibilité de faire encore des produits racinaires : prosulfocarbe, chlortoluron (CTU), flufénacet, DFF… Cette stratégie est à réserver aux situations à forte pression en graminées et à éviter sur des cultures déjà stressées. On peut aussi moduler les doses avec par exemple CTU 2,5 + Compil 0,15 ; Défi 2,5 + Compil 0,15 ; ou encore Battle Delta 0,4.
• Si le stade 3 feuilles est dépassé : arrêt en grande majorité des produits racinaires et basculer sur les produits foliaires de sortie d’hiver : base sulfonylurée (+ DFF). Attention aux résistances.
Attention aux conditions d’applications
La sélectivité des herbicides céréales peut être résumée en trois classes :
• La sélectivité de position (pendiméthaline, prosulfocarbe, flufénacet) dont les causes de phytotoxicité résultent d’une mise en contact de la graine avec le produit (lit de semence mal rappuyé, graines en surfaces, fortes pluies après précipitations, sols filtrants).
• Les substances actives d’automne à sélectivité par détoxification (chlortoluron, prosulfocarbe, flufénacet). La détoxification par la culture sera d’autant moins efficace que la plante sera en contact avec le produit (idem classe précédente) et que les
conditions pénalisent la métabolisation du produit (amplitudes thermiques, gels, autres stress…).
• Les substances actives de sortie d’hiver à sélectivité par détoxification (sulfo, FOPs, DEN) : ne pas appliquer si un gel est prévu le jour même et ceux qui suivent. Éviter les forts écarts thermiques (> 15 °C dans la journée). Les risques sont accrus sur cultures déjà stressées (hydromorphie, phytotoxicité des interventions précédentes, problèmes d’enracinement etc).
Désherbage mécanique !
Les conditions des prochains jours (sols ressuyés, temps séchants) devraient permettre des interventions mécaniques (houe, herse étrille, roto-étrille). Si ces opérations doivent être réservées à des céréales bien enracinées et au stade 3 feuilles, les semis tardifs ont permis de limiter le salissement de certaines parcelles et une gestion en mécanique est envisageable (sur dicots peu développées notamment).