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AGROÉCOLOGIE

Collectifs Écophyto, GIEE : les groupements d’agriculteurs se développent

Fin juin était organisé un webinaire sur le thème de la transition agroécologique. À cette occasion, plusieurs organisations collectives ont été présentées ayant pour objectif commun d’unir des agriculteurs engagés dans un changement de leurs pratiques.
Collectifs Écophyto, GIEE : les groupements d’agriculteurs se développent

Crise sanitaire oblige, la journée de la transition agroécologique organisée par la chambre d'agriculture d'Auvergne-Rhône-Alpes, la FRCuma, la Coopération agricole et le réseau Trame s'est tenue par écrans interposés. « L'idée de ce séminaire est de capitaliser sur les démarches agroécologiques dans leur diversité. Nous nous sommes fixé deux objectifs : partir des expériences du terrain et faire partager les initiatives recensées à des réseaux divers, notamment les GIEE et les groupes Écophyto. Il ne s'agit pas de savoir qui est le plus agroécologique mais de s'enrichir mutuellement », a expliqué en introduction Michel Sinoir, directeur de la Draaf Auvergne-Rhône-Alpes. « Le travail collectif a fait la force du développement agricole dans les années 1970-1980, c'est par ce biais que les agriculteurs peuvent aujourd'hui redonner un sens à leur métier », a rappelé Gilbert Guignand, président de la chambre régionale d'agriculture d'Auvergne-Rhône-Alpes.

30 000 agriculteurs engagés dans des collectifs Écophyto

Les échanges de la matinée ont démarré par un état des lieux des différents groupements d'agriculteurs existants. Action majeure du plan Ecophyto, le dispositif Dephy Ferme a notamment été mis à l'honneur. Il vise à promouvoir des systèmes agricoles réduisant l'usage des produits phytosanitaires grâce à des techniques économiques, environnementales et sociales performantes. Couvrant l'ensemble des filières de production et mobilisant les partenaires de la recherche, du développement et du transfert, le réseau rassemble aujourd'hui plus de 3 000 exploitations agricoles dont 230 en région Auvergne-Rhône-Alpes. Le premier bilan annuel du dispositif Dephy Ferme se révèle positif. Les agriculteurs engagés se sont montrés motivés et sont venus en nombre assister aux actions de démonstration organisées lors des portes ouvertes. Plusieurs limites sont néanmoins apparues, comme des difficultés chez certains agriculteurs à dégager du temps et la nécessité de mieux structurer le mouvement à l'avenir grâce à une meilleure animation.

Les GIEE en plein essor

Lancé en 2012 par Stéphane Le Foll, alors ministre de l'Agriculture, le dispositif GIEE a quant à lui été pensé pour favoriser les dynamiques de transition agroécologique menées collectivement et adaptées au plus près des besoins de chaque territoire. L'objectif alors défini était de mieux reconnaître les collectifs d'agriculteurs s'engageant dans des projets pluriannuels de modification et de consolidation de leurs pratiques agricoles pour concevoir des systèmes agroécologiques visant une performance à la fois économique, environnementale et sociale. Aujourd'hui, nous comptons quelque 600 GIEE en France et 40 en région Auvergne-Rhône-Alpes. « L'avant GIEE est une période déterminante pour construire un collectif ayant des objectifs partagés sur la base d'un diagnostic agroécologique initial. À ce stade, la mise en place d'indicateurs de performance est essentielle. Pendant la vie du GIEE, tout l'enjeu est d'entretenir une dynamique de groupe et de favoriser son fonctionnement en organisation apprenante. Les besoins en animation sont alors importants car le groupe, mais aussi le projet, peuvent être amenés à évoluer », a expliqué Manon Courias, stagiaire à la Draaf Auvergne-Rhône-Alpes ayant travaillé sur le fonctionnement des GIEE. Le plan Écophyto 2 s'étant donné pour ambition d'engager à l'avenir 30 000 exploitations agricoles dans la transition agroécologique, des journées et des visioconférences seront organisées dans les prochains mois de manière à mettre à disposition des agriculteurs engagés des ressources sur un espace collaboratif.

Pierre Garcia

Ail Dephy 30 000 /

Diminuer l’usage des intrants

Le groupe Ail Dephy 30 000 s’adonne au désherbage mécanique. Le groupe Ail Dephy 30 000 a vu le jour en 2018, porté par la chambre d’agriculture de la Drôme pour une durée de trois ans. Il regroupe douze exploitations et vise à développer les techniques alternatives et diminuer l’emploi des produits phytosanitaires sur l’ail, sans dégrader la rentabilité économique et la pénibilité du travail. Au-delà de mettre en place des pratiques préventives pour limiter les bioagresseurs (décalage de plantation, rotation, fertilité des sols, etc.), l’accent est mis sur le désherbage mécanique. Ainsi, le fait de réaliser un à deux passages de bineuse puis de herse étrille présente un intérêt particulier. Au bout de deux ans, l’indicateur de fréquence de traitement (IFT), de 9.9 au départ en 2017, a baissé de 15 à 25 % sur les parcelles d’ail où l’expérimentation a été réalisée. Une baisse qui devrait encore s’accentuer en 2020. Cependant, l’intégration du désherbage mécanique induit des investissements et du temps de travail supplémentaire.  Si tous ont pris en compte l’intérêt du désherbage mécanique, certains ont d’ores et déjà prévu de s’équiper en guidage RTK et en bineuses plus performantes, pour gagner en efficacité et réactivité. À l’avenir, de nouvelles techniques seront testées par le groupe Ail et feront l’objet de rencontres sur le terrain pour découvrir les nouveautés en termes de chariot pour désherbage manuel, robotique, intelligence artificielle et désherbage de précision, etc. « La pression sociétale ainsi que la recherche des signes de qualité (HVE, ZRP, AB) nous poussent à trouver des solutions innovantes. Nous souhaitons également tester la culture de l’ail sous paillage avec goutte-à-goutte, qui peut lever des freins techniques, prévient Mikaël Boilloz, conseiller légumes et grandes cultures à la chambre d’agriculture de la Drôme. Tout producteur d’ail drômois qui souhaite rejoindre ce groupe est le bienvenu »

 

La promotion des prairies à flore variée

Le GIEE Lós Bons Prats travaille sur le développement des prairies multi-espèces en réduisant la part d’intrants.
Fruit de l’association d’agriculteurs du Forez-Emblavez en Haute-Loire, le GIEE Lós Bons Prats, « Les Bons Prés » en patois, est né en 2017 au cours d’une formation organisée par Vivea pour promouvoir l’autonomie des exploitations par les nouvelles pratiques culturales. Au total, ce sont seize exploitations qui se sont portées volontaires pour participer à ce projet qui vise plusieurs objectifs : développer des prairies multi-espèces, préserver l’environnement en réduisant la part d’intrants, favoriser une dynamique collective et améliorer les conditions de travail tout en s’adaptant aux effets du changement climatique. Depuis 2017, 243 ha de prairies à flore variée ont déjà été plantés au sein du GIEE et trois commandes groupées de semences ont été effectuées. Pendant six ans, un suivi des parcelles sera effectué avec des collectes de données et des analyses de sol. Les données recueillies seront ensuite diffusées lors de journées techniques et de formations.

 

Le défi du changement climatique

Le Geda du Buron a réalisé un essai sur la fertilisation du maïs dans la raie de semis, à Bussières et Pruns. Créé en 1995 par des agriculteurs du Puy-de-Dôme, le Geda du Buron compte aujourd’hui 37 membres pour 3 500 ha. Sur ces parcelles où se cultivent à 75 % du blé et du maïs, le potentiel agronomique est très variable mais les aléas climatiques depuis 2003, amplifiés ces dernières années, remettent en question la viabilité des exploitations. Le groupe a toujours pratiqué l’agriculture raisonnée et les plans de fumure sont basés sur les reliquats azotés. De plus, ce groupe est un support d’expérimentation pour la chambre d’agriculture : essais sur le biocontrôle, la fertilisation, les variétés tolérantes à la sécheresse, etc. Depuis plus de dix ans, les agriculteurs sont formés à la pulvérisation bas volume et à la conservation du sol. Face au défi du changement climatique, le groupe s’adapte en passant du raisonnement à l’agriculture intégrée. La sécheresse 2019 a encouragé les exploitants à travailler sur de nouvelles techniques (récolte prématurée du maïs à 15 % d’humidité). De nouvelles cultures sont aussi en phase de test : lin, avoine de printemps, lentille, haricot…