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Forêt

Comment se porte la forêt drômoise ?

Plusieurs années de sécheresses estivales et l'arrivée de nouveaux ravageurs impactent la forêt.
Comment se porte la forêt drômoise ?

L'état de santé de nos forêts dépend principalement des variations des facteurs climatiques et de la dynamique des populations de parasites et prédateurs en tout genre.
Coté climatique, sur le moyen terme, plusieurs années de sécheresses estivales ont entraîné des mortalités significatives ou des rougissements parfois spectaculaires dans ce que l'on nomme traditionnellement « la sapinière sèche ». Ainsi, dans le Diois et sur les contreforts sud du Vercors par exemple, et sur sol superficiel, la sapinière a abandonné certains quartiers alors que sur d'autres secteurs (Treschenu-Creyers, Glandage) de vastes pans de forêt sont parfois passés du vert au rouge. Ailleurs, sur Valdrôme et une partie de la frange Est du département, c'est le gui, véhiculé par les oiseaux, qui profite du vieillissement de certains peuplements et du ralentissement de leur croissance pour devenir rapidement menaçant.

Les pins affaiblis

Face à la sécheresse de l'année 2017, les peuplements de pins et de pins noirs plus particulièrement ont été attaqués par un champignon parasite de faiblesse, sphaeropsis sapinea. Cela se traduit par des aiguilles ou des rameaux qui virent au rouge brun en quelques mois. Dans la vallée du Rhône, ce sont des bouquets de plusieurs hectares qui ne s'en sont pas remis.
Inversement, les attaques de chenilles processionnaires du pin voient leur intensité très fortement décroître. En effet, le travail des insectes les parasitant a naturellement réussi à endiguer cette pullulation. Pour quelques années, nous devrions être relativement tranquilles avec ce papillon, avant que le cycle ne se redéveloppe comme il se doit.

La pyrale du buis se déplace

Des pyrales du buis en train de se nourrir dans des champs de lavandin.

La pyrale du buis, après avoir fortement attaqué les buxaies des vallées de l'Isère puis du Rhône, devrait cette année défolier sévèrement cet arbuste en amont de Die et, plus généralement, sur le Sud-Est du département. Là encore et pour l'instant, aucune solution n'existe pour stopper ou réduire l'impact de ce papillon introduit par erreur et en provenance d'Asie. La chenille se nourrissant des feuilles de buis riches en alcaloïdes toxiques rendent sa consommation par des prédateurs peu attractive. On peut noter que certains diptères parasitoïdes de chenilles de pyrale commencent à être détectés et qu'il est probable que ces insectes prennent de l'ampleur. En tout cas, pour les zones forestières, aucun traitement efficace n'est envisageable.
Coté feuillus, un autre champignon invasif, la chalarose, commence à attaquer les frênes communs. Les symptômes ressemblent à des dégâts de gel sur les jeunes pousses au mois de mai-juin : elles se dessèchent subitement sous l'effet du blocage de la circulation de la sève dans les vaisseaux colonisés par le champignon. Là encore, aucune solution n'est connue pour l'instant pour stopper l'arrivée de ce nouveau ravageur.

Des équilibres instables

Sur chênes blancs et verts, nous observons des niveaux d'attaque « classiques », avec parfois de fortes mortalités de branches dues au bupreste bifacié ou à de nombreuses espèces d'agriles. Cependant, d'une manière générale, ces espèces ne semblent pas trop en difficulté à ce jour. Tout au plus, les forestiers surveillent le développement des populations de processionnaires du chêne dans d'autres régions de France en espérant ne pas trop les voir se rapprocher de la Drôme. Car cette espèce est plus urticante et plus dangereuse pour l'humain que sa cousine des pins.
En conclusion, la forêt drômoise souffre bien évidement des coups de boutoirs causés par les sécheresses, tout en ayant une forte capacité à leur résister. Elle s'est construite et a très fortement évolué et changé au cours du siècle précédent et il en sera de même dans les décennies à venir. Mais les modifications les plus brutales seront probablement dues aussi à l'arrivée d'espèces nouvelles pouvant modifier rapidement des équilibres, par nature toujours instables.

Pierre Tabouret, correspondant observateur du Département de la santé des forêts