Accès au contenu
Aviculture

Comment sortir les poules pondeuses des cages ?

Techniquement, plusieurs options existent pour convertir en système alternatif un élevage de poules pondeuses en cages.
 Comment sortir les poules pondeuses des cages ?

Transformer en système alternatif un élevage de poules pondeuses en cages était l'un des thèmes de la session régionale d'information Itavi* du 29 mars à Valence. Romaric Chenut, chargé d'études au sein de cet institut, a traité le sujet en s'appuyant sur une étude conduite en 2016-2017 (financée par le CNPO**) ainsi que sur un voyage d'étude en Allemagne et Hollande. « Ces deux pays ont une dizaine d'années d'avance dans les systèmes alternatifs », avec seulement 10 % de poules en cages pour le premier et 16 % pour le second, contre 69 % en France (en 2016).

Romaric Chenut, chargé d’études à l'Itavi.

Volières : les plus et les moins

Les volières sont une possibilité de conversion pour les élevages en cages. Ce système, selon l'intervenant, présente des avantages en termes de résultats techniques, mise en place, enlèvement, surveillance, ramassage des poules mortes... Cependant, les éleveurs doivent être plus observateurs, réactifs. Les risques de stress et piquage sont plus élevés. En volière, le déplacement vertical des poules est présenté comme un facteur de bien-être mais aussi une cause de blessures. Sont en outre à prendre en compte la poussière, les pontes au sol, davantage de temps de travail qu'en élevage en cages (une heure de plus par jour). A savoir encore, « il est indispensable que les poulettes aient été élevées en volière. Sinon, elles ne s'adaptent pas ».

Transformation à moindre coût

L'intervenant a donné plusieurs exemples de conversion de bâtiments avec cages, à commencer par l'un avec transformation à moindre coût (2 à 5 euros par place de poule pondeuse). Il consiste à ouvrir les cages aménagées, supprimer la rangée du bas, couvrir les mangeoires et ajouter des perchoirs. « C'est un peu du bricolage, a-t-il remarqué. Cela peut convenir pour des cas particuliers. Mais j'appelle à la prudence, vu les conditions d'ambiance, sanitaires. Cette solution est la plus risquée, donc à ne pas privilégier ».

Volières sur un ou deux niveaux

La dernière session régionale d’information œuf de l’Itavi a réuni quelque 80 participants.

Deuxième exemple, « le plus simple », c'est de démonter les cages et les remplacer par des volières dans les bâtiments. Plusieurs possibilités se présentent, selon la configuration des bâtiments. « Finalement, chaque cas est particulier et il pourra y avoir une perte assez importante en capacité d'hébergement », a observé Romaric Chenut. Il y a toujours une solution, disent les équipementiers et les constructeurs de bâtiments. Mais c'est du cas par cas. Et le coût peut varier sensiblement. » Il a cité un exemple de bâtiment passant ainsi de 40 000 pondeuses en cages à 20 000 en volières (coût de 16 à 20 euros par place). Puis un autre, assez haut et dont la structure est solide, passant de 40 000 à 30 000 places avec deux niveaux de volières (même coût plus 3 euros pour la construction d'un plancher intermédiaire).

Poules au sol et volières au-dessus

 

Troisième exemple cité : un bâtiment ayant une fosse profonde. Dans celle-ci, ont été mises en place des poules au sol et au-dessus, sur une surface en béton, des volières. La capacité d'hébergement est passée de 50 000 à 40 000 places (- 20 %).

Volières et plein air

Lors de la dernière session régionale d’information œuf de l’Itavi.

Autre possibilité : remplacer les cages par des volières et ajouter de l'élevage en plein air, à condition de disposer de foncier. Dans ce cas, le coût par place est de 16 à 20 euros sans compter le foncier (2 à 4 euros), les trappes et la révision de la ventilation. « Pour 40 000 poules, il faut 16 hectares de parcours, a indiqué l'intervenant. Actuellement, seulement un tiers des éleveurs ont, a priori, la possibilité pratique de mettre leurs poules dehors. Le jardin d'hiver est peut-être une solution pour augmenter la surface utile. » Avoir deux codes d'élevage dans un même bâtiment est réglementairement possible (par exemple, des pondeuses au sol dans la partie haute et plein air au-dessous). « C'est expérimenté sur certains sites mais il faudra "bétonner" la traçabilité. »

Jardin d'hiver

Autre point abordé lors du voyage d'étude en Hollande et Allemagne : le jardin d'hiver. Il s'agit d'un préau sur toute la longueur du bâtiment, d'un seul côté ou des deux, donnant ou non accès a un parcours. Le pan long est ajouré (grillage ou palissade bois), donc l'air circule et la lumière entre. Sa surface peut être comptée dans la surface utile du bâtiment. Elle peut être réglementée par des cahiers des charges. C'est le cas en Europe du Nord, par exemple, où le jardin d'hiver est considéré intéressant pour le bien-être animal et la promotion de l'image d'un élevage. En plus, en cas d'influenza aviaire, les volailles conservent un accès à l'air libre.

Annie Laurie

* Itavi : institut technique de l'aviculture.
** CNPO : comité national pour la promotion de l'œuf.

Orientations / A la demande de l'Etat, l'interprofession de l'œuf a réfléchi et écrit un plan de filière en fin d'année dernière.
Le plan de la filière œuf
Philippe Juven, président du CNPO, et Jean-Marie Fontanet, responsable de l'antenne Itavi Rhône-Alpes-Auvergne (de gauche à droite).
Dans le cadre des Etats généraux de l'alimentation (EGA), l'Etat a demandé au CNPO (interprofession de l'œuf) d'établir un plan de filière. Ecrit et remis fin 2017, il s'articule autour de quatre axes. Jean-Marie Fontanet, responsable de l'antenne Itavi Rhône-Alpes-Auvergne, les a détaillés lors de la dernière session œuf de cet institut. En voici les grandes lignes.
Quatre axes
Le premier axe est de répondre aux demandes des consommateurs et de la société tout en maintenant la souveraineté alimentaire et la compétitivité de la filière. Objectifs : augmentation des productions alternatives à la cage aménagée ; poursuite des améliorations en matière de bien-être animal, segmentation des produits et traçabilité ; renforcement de la biosécurité et de la sécurité sanitaire des aliments de poules.
Le deuxième axe se rapporte aux relations dans la filière : élargir le CNPO à l'aval de la filière (distribution, industrie), engager un nouveau travail sur la contractualisation...
Le troisième consiste à développer la recherche et les innovations au service de la filière œuf ainsi qu'à poursuivre la conquête des marchés : améliorer la génétique, réduire les intrants chimiques, développer de nouveaux débouchés valorisants.
Enfin, le quatrième axe concerne l'amélioration des connaissances sur la production et la consommation d'œufs et d'ovoproduits ainsi que sur les échanges avec d'autres pays (via des observatoires).
Des règles espérées stables
« Des discussions sont engagées et des actions sont en cours de construction », a précisé à ce sujet le président du CNPO, Philippe Juven, éleveur de pondeuses dans la Drôme. Il a aussi indiqué que le logo « œuf de France » (rattaché à l'association des produits agricoles de France et remplaçant du logo « pondu en France ») sera mis en place en septembre. Concernant la contractualisation, « il faut travailler avec les services de l'Etat pour s'intégrer dans ce nouveau dispositif, a-t-il noté. [... ] On nous a demandé de faire un plan de filière, nous demandons qu'il soit appliqué. La loi post-EGA doit être votée avant l'été. Il faut des règles stables, des orientations claires et pouvoir travailler dans la confiance. Nous sommes sur le pont et restons mobilisés pour faire passer nos messages. Notre souci est de garder notre capacité de production tout en faisant évoluer nos élevages vers des modes plus attendus par les consommateurs. »
A. L.

 

Marché de l'œuf : la France bien positionnée /

François Cadudal, chargé d'études à l'Itavi.
La France est « bien positionnée » sur le marché européen et mondial de l'œuf, « qui est porteur », a souligné à la session Itavi l'un de ses chargés d'études, François Cadudal. Avec 873 000 tonnes d'œufs produits en 2016, elle est leader en Europe. Plus élevés qu'en d'autres grands pays avicoles, ses coûts de production sont atténués par ses performances techniques en élevage, son savoir-faire dans la transformation et la valorisation des œufs en ovoproduits.
Les Pays-Bas sont ses plus sérieux concurrents. Ils ont une capacité à regrouper l'offre européenne pour exporter des œufs coquille ou ovoproduits en Europe et ailleurs. Ils ont accès à l'énorme marché allemand. En plus, le port de Rotterdam est un atout pour importer des matières premières et exporter des produits finis.
L'Espagne et la Pologne - dont les marchés restent focalisés sur l'œuf coquille - élèvent plus de 90 % de leur cheptel en cages, pour l'instant, « mais la situation peut vite évoluer ».
Et l'intervenant de conclure : « Des opportunités existent sur les marchés européens et extra-européens. Pour la France, c'est plutôt sur des produits à valeur ajoutée ».François Cadudal, chargé d'études à l'Itavi.