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Syndicalisme

Congrès FDSEA : les parlementaires appelés à s'engager

Dans le contexte actuel de crise agricole aigüe, la FDSEA de la Drôme, lors de son 70ème congrès, a mis l'accent sur l'urgence de prix rémunérateurs et la simplification administrative. Les parlementaires ont été invités à signer une lettre d'engagement.
Congrès FDSEA : les parlementaires appelés à s'engager

Sécheresse, instabilité réglementaire, prix en baisse, dégâts de gibiers, complémentaire santé obligatoire ou encore déclarations Pac sans fin... « 2015 a été une année difficile, a confié Didier Beynet, président de la FDSEA de la Drôme, en ouverture du 70ème congrès de la FDSEA, le 26 février à Valence. Où est la simplification promise ?, a-t-il demandé aux représentants de l'État. Dans les exploitations agricoles, la situation est tendue. En 2015, et encore récemment, les agriculteurs ont manifesté souvent. Et des promesses leur ont été faites, notamment par le Premier ministre Manuel Valls. « Nous attendons avec impatience les résultats », a déclaré Didier Beynet.

« Mobilisés sur de nombreux fronts »

En présentant le rapport d'activité de la FDSEA, Grégory Chardon et Alain Aubanel, respectivement secrétaire général et secrétaire adjoint, ont rappelé, mois après mois, la somme de travail réalisée. Bien sûr pour défendre le métier d'agriculteur lors de multiples négociations, d'opérations de contrôle de l'origine des produits ou encore de manifestations comme à Lyon en juillet. Mais aussi pour apporter des services, des aides et des avantages comme la création d'un groupement d'achat d'électricité à tarif préférentiel. Malgré les difficultés, l'année 2015 compte des points positifs. Ainsi, a été mis en avant la bonne santé des filières caprin lait, Ppam et viticole. Et la fresque réalisée lors du passage du Tour de France dans le département a permis de valoriser l'agriculture drômoise. « Nous avons été mobilisés sur de nombreux fronts pour faire entendre la voix des agriculteurs », ont-ils insisté.

Les parlementaires invités à s'engager

Malgré toute l'énergie déployée, la plupart des agriculteurs ont l'impression de devoir en faire toujours plus pour des prix de plus en plus faibles. Pour tenter d'en finir avec des exigences trop fortes et une absence de visibilité économique, les parlementaires ont été vivement invités à signer une « lettre d'engagement ». Dans celle-ci, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs de la Drôme et de la région leur demandent de défendre au niveau français « un cadre législatif organisant la contractualisation à grande échelle incluant un engagement de prise en compte du coût de revient des productions ». Ce coût deviendrait la base de discussion du prix payé aux producteurs. Sont aussi demandés un décret rendant obligatoire l'étiquetage de l'origine sur l'ensemble des produits alimentaires (y compris ceux transformés), une accentuation des contrôles et sanctions administratives pour lutter contre les pratiques commerciales déloyales ainsi que la mise en œuvre « par tous les moyens » d'un approvisionnement de la restauration hors domicile (RHD) avec les produits français. De plus, FDSEA et JA exigent qu'aucune loi durcissant les contraintes (environnementales, fiscales, sociales...) des agriculteurs ne soit votée sans en avoir évalué l'impact au préalable. D'autres points concernent le niveau européen : une politique agricole forte ; une harmonisation des règles sociales, fiscales et environnementales ; des outils de régulation des marchés et une stratégie dynamique d'exportation (notamment l'ouverture complète de tous les marchés). Sont aussi demandés un règlement pour lutter contre les pratiques commerciales déloyales et la levée des freins du droit de la concurrence communautaire pour accroître le pouvoir de négociation des producteurs.

« Nous voulons du concret »

Au 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme.

Après avoir lu cette lettre d'engagement, « nous n'avons pas l'habitude de vous forcer la main, a expliqué Céline Ferlay, vice-présidente de la FDSEA, aux trois parlementaires présents. Mais aujourd'hui la crise est très forte et des entreprises sont au bord de la faillite. Il est vital d'en prendre conscience pour faire évoluer les choses. Nous voulons du concret. »
Premier à s'exprimer, le député Hervé Mariton (LR) pour qui « l'avenir de la France n'est pas un concours de la plus petite taille d'exploitation ». A propos des normes, « il faut une logique de résultats », a-t-il indiqué. Il s'est dit d'accord avec la contractualisation, l'étiquetage de l'origine des produits et les sanctions contre les pratiques commerciales déloyales. En revanche, il a estimé contradictoire l'ouverture complète des marchés avec l'obligation d'approvisionnement local de la RHD. « Il faut réduire les coûts de production et muscler l'agriculture », a-t-il ajouté, jugeant positives (même si tardives) les récentes annonces du Premier ministre en matière de baisse des charges sociales. De son côté, le sénateur Gilbert Bouchet (LR) a regretté le rejet par l'Assemblée nationale d'une proposition de loi du Sénat destinée à encourager la compétitivité de l'agriculture. Et le député Patrick Labaune (LR), également président du conseil départemental de la Drôme, a mis l'accent sur le dispositif Agrilocal, « un exemple parfait pour tendre vers un approvisionnement local de la RHD et qui a vocation à s'étendre auprès des lycées, hôpitaux... de la région ». Par ailleurs, en matière de compétitivité, il a pointé les écarts de coût du travail au sein de l'Union européenne, « la France ayant le coût le plus élevé ».
Tous trois ont signé la lettre d'engagement. Les quatre autres parlementaires - les députés Nathalie Nieson (PS) et Franck Reynier (UDI) ainsi que les sénateurs Marie-Pierre Monier et Didier Guillaume (PS) - devaient être contactés cette semaine. Le 1er mars au soir (au moment du bouclage de notre journal), le député Franck Reynier avait signé et le sénateur Didier Guillaume s'était engagé à la faire.

Christophe Ledoux

Discours / Il est grand temps que l'Etat simplifie pour permettre aux agriculteurs d'exercer sereinement leur métier, estime le président de la FDSEA de la Drôme.

« 2015 a été une année difficile »

Didier Beynet a dénoncé les retards de l'administration dans le traitement de certains dossiers et appelé l'État à tenir sans délai ses promesses de simplification.
« Avec la sécheresse et la chaleur qui ont touché un grand nombre d'agriculteurs et de productions, 2015 a été une année difficile, a expliqué Didier Beynet, président de la FDSEA de la Drôme. Mais aussi et surtout du fait de l'instabilité réglementaire, d'absence de visibilité, d'exigences de plus en plus fortes des administrations et bien sûr en raison de prix d'achat toujours à la baisse. »
Fustigeant une Pac « inimaginable », il a dénoncé la forme et le coût d'un dispositif de déclarations devenu bien trop complexe. Par ailleurs, il a pointé les retards de l'administration dans la parution de l'arrêté fermage ou encore le paiement de certaines aides (Pac, calamités inondation). « A quand des pénalités pour l'administration ?, a-t-il déclaré. Il est facile d'être exigeant avec les agriculteurs lorsque l'on ne l'est pas avec soi-même. »
Didier Beynet a appelé l'État à tenir sans délai ses promesses de simplification. Et il a vivement critiqué la mise en œuvre de la complémentaire santé obligatoire, ce qui complique en particulier la tâche des employeurs de saisonniers.
« Nous sommes tenaces »
Concernant la cartographie des cours d'eau du département (12 000 km), Didier Beynet a dénoncé une procédure réalisée à l'origine sans les agriculteurs. « Mais nous sommes tenaces et avons repris la main, a-t-il fait remarquer. Aujourd'hui, nous attendons que ce travail soit pris en compte à sa juste valeur. Etre ou ne pas être un cours d'eau, la question ne devrait plus se poser en Drôme. Nous y serons attentifs. »
Une autre préoccupation est la prolifération des dégâts de sangliers. « Il est grand temps de trouver une solution avec les chasseurs et peut être même avec l'administration », a dit Didier Beynet.
Soulignant aussi la bonne santé de certaines filières ainsi que d'autres points positifs (lire article ci-.......), il a par ailleurs demandé aux nouvelles majorités du Département et de la Région de reconnaître pleinement l'agriculture « pour tout ce qu'elle apporte en termes d'emplois directs mais aussi indirects avec l'agroalimentaire, l'agrofourniture, la cosmétique, la parapharmacie et le tourisme ».
En conclusion, il a rappelé les multiples actions syndicales pour obtenir une juste rémunération. « Nous avons obtenu des engagements de la part des distributeurs. C'est à la fois peu et beaucoup : peu car ce ne sont que des signatures et beaucoup car ils se sont engagés au-delà de ce qu'ils avaient fait jusqu'à maintenant. Mais ce n'est qu'un début, il va falloir maintenir la pression, associer les transformateurs, les coopératives et aussi l'Etat ainsi que les parlementaires ». A ces derniers, FDSEA et JA leur ont demandé de signer une « lettre d'engagement » (lire article ci-.............).
C. L.

 

Michel Joux , président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes /

« Nous avons besoin de rentabilité et de revenu »

Michel Joux , président de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, intervenant au 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme.
Invité du 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme, le président de la toute nouvelle FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, Michel Joux, a mis l'accent sur les crises agricoles. « 10, 15 peut-être 20 % des producteurs vont faire faillite si rien n'est fait, a-t-il mis en garde. Nous avons besoin de rentabilité et de revenu. » Sur ce point, il a mis l'accent sur la nécessité d'obtenir des relations commerciales équilibrées avec un cadre législatif intégrant les enseignes de la grandes distribution, les interprofessions et les consommateurs. « Quelques centimes de plus sont à obtenir pour maintenir et développer l'agriculture, a-t-il indiqué. Pour attaquer les marchés internationaux, a-t-il ajouté, il faut d'abord récupérer de la valeur ajoutée sur le marché français. »
Il a aussi évoqué la transparence des marges. Malgré la création en 2010 d'un observatoire des prix et des marges, « le système reste opaque, a-t-il estimé. Certaines entreprises préfèrent payer une amende plutôt que de publier leurs résultats. »
Enfin, en réponse à l'euroscepticisme de Patrick Labaune (lire encadré « ils ont dit »), « nous sommes pro-européens, a déclaré Michel Joux. Car l'agriculture doit beaucoup à l'Europe. »

 

 

Ils ont dit…

 

Sébastien Richaud,nouveau président des Jeunes Agriculteurs de la Drôme, intervenant lors du 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme.

« Le revenu de nos fermes ne cesse de baisser, a constaté le nouveau président des Jeunes Agriculteurs de la Drôme, Sébastien Richaud. Il faut des prix et moins de contraintes. Où est l'harmonisation des normes européennes ? », a-t-il demandé. Sur le sujet de l'installation, « la mobilisation des JA a fini par payer, a-t-il fait remarquer. Le montant de la DJA a augmenté et les prêts bonifiés sont maintenus. » Par ailleurs : « Les agriculteurs sont les premiers écologistes. Si l'on veut pérenniser l'écologie, investissons dans nos jeunes. »

 Patrick Labaune, député et président du conseil départemental de la Drôme, intervenant lors du 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme.

« Je suis un eurosceptique et j'ai toujours voté contre les décisions de l'Union européenne, a déclaré Patrick Labaune, député et président du conseil départemental de la Drôme. L'Europe n'existe plus. » Par ailleurs, assurant que le Département continuera à soutenir l'agriculture, « nous serons présents au Salon de l'agriculture ».

 

Anne-Claire Vial, présidente de la chambre d'agriculture de la Drôme.

« Il faut arrêter de gérer le “vivre ensemble” avec des normes et en dénigrant les corps intermédiaires, a considéré Anne-Claire Vial, présidente de la chambre d'agriculture de la Drôme. Elle a aussi invité chacun à propager largement certaines vérités : « Les agriculteurs ont semé plus de 300 000 kilomètres de bandes enherbées » ; « Les industries agroalimentaires et l'agriculture représentent 1,6 million de salariés. » ; « L'espérance de vie des agriculteurs est supérieure de trois ans à celle de la moyenne de la population française. »

 

Clara Thomas, sous-préfet de l'arrondissement de Die, intervenant lors du 70ème congrès de la FDSEA de la Drôme.

« Nous sommes conscients de la sur-administration, de l'empilement des normes, des retards de paiement, a indiqué Clara Thomas, sous-préfet de l'arrondissement de Die. A propos des déclarations Pac : « Vous pouvez compter sur les services de la DDT et de la chambre d'agriculture. » S'agissant des dégâts de gibiers : « 88 % proviennent de sangliers. L'Etat a été réactif. » Sur le plan de soutien à l'élevage : « 52 dossiers (162 000 euros) sont éligibles au aides du volet A et un abondement a été obtenu pour 20 dossiers de plus. » Sur le volet sanitaire en aviculture : « Les contaminations salmonelles commencent à baisser en Drôme. » Clara Thomas a par ailleurs évoqué les mesures de soutien à l'agriculture annoncées par le Premier ministre le 17 février (baisse de 7 points des cotisations sociales, année blanche sociale…). A propos du loup : « La stratégie mise en place a fini par payer. Le nombre de tirs de défense est passé de 15 à 100 et les arrêtés de tirs de prélèvement ont été validés juridiquement quatre fois de suite. »